Rébellion touarègue : pourquoi le Mali suspecte la France de jouer double jeu

Alimentée par les déclarations de certains ministres français, la tension entre le Mali et la France est montée d’un cran avec le déclenchement de la rébellion touarègue, le 17 janvier dernier. Bamako suspecte Paris d’avoir fait un « deal » avec le MNLA. Explications.

Amadou Toumani Touré et Nicolas Sarkozy surmonteront-ils les tensions entre leurs pays ? © AFP/Montage J.A.

Amadou Toumani Touré et Nicolas Sarkozy surmonteront-ils les tensions entre leurs pays ? © AFP/Montage J.A.

Publié le 9 mars 2012 Lecture : 2 minutes.

C’est un haut gradé de l’armée malienne, un habitué de la présidence, qui parle. « Pour nous, Mohamed Ag Najem [le chef d’état-major de la rébellion touarègue, NDLR] a fait un compromis avec l’Otan et la France en abandonnant Kadhafi en pleine crise libyenne, affirme-t-il. Le marché était que s’il quittait le sud de la Libye, la France l’aiderait au mieux dans ses revendications au Mali. En plus, Paris a fait en sorte que Niamey ferme les yeux sur le passage du convoi de Ag Najem en direction du Nord Mali ».

La rébellion du Mouvement national de libération de l’Azawad (MNLA) qui a commencé ses attaques le 17 janvier, a été aussitôt condamnée par la Cedeao, l’Union africaine (UA) et les États-Unis. Mais pas explicitement par la France ni par l’Union européenne (UE). En outre, alors que de violents combats avaient lieu au Nord-Mali, le ministre français des Affaires étrangères Alain Juppé, déclarait le 7 février devant le Sénat français : « La rébellion touarègue a remporté récemment d’importants succès militaires au Nord du fleuve Niger. (…) Un cessez-le-feu immédiat est pour nous impératif ».

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Nationalisme anti-français

Dès le lendemain de cette déclaration pour le moins maladroite, la presse malienne se déchaînait contre la France. À titre d’exemple, le bihebdomadaire malien « Le challenger » titrait le 10 février : « La France et le Nord-Mali : les masques commencent à tomber ! »

Le climat ne s’est pas amélioré après les propos du ministre français de la Coopération, Henri De Raincourt, le 21 février, toujours devant le Sénat. « Le non-respect des accords d’Alger de 2006, venant après l’échec de ceux de 1992, a incontestablement alourdi le climat entre les Touaregs et les gouvernements maliens », a-t-il assuré.

La présence d’au moins quatre porte-paroles du MNLA sur le sol français n’est pas non plus au goût de tout le monde au Mali. « La manière dont les médias français traitent le dossier des rebelles touaregs n’est pas juste, car ce sont des bandits armés », estime une source proche du gouvernement.

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Coopération militaire

Reste que sur le plan de la coopération militaire, Paris continue d’aider Bamako. Notamment en assurant l’entretien complet des avions de surveillance du territoire de type Tétras, offerts au Mali par la France… en dépit du fait que le président malien Amadou Toumani Touré (ATT) a refusé à Nicolas Sarkozy l’installation d’une base militaire française à Mopti dans le cadre la lutte contre Al-Qaïda au Maghreb islamique (Aqmi).

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L’appui de la France à l’armée malienne empêche donc Bamako d’accuser ouvertement Paris de soutenir la rébellion touarègue. Laquelle a bien compris la complexité de ces enjeux, en insistant dans sa communication sur son opposition aux djihadistes. Et en prétendant réussir à lutter contre ces derniers – là où précisément le Mali a jusqu’à présent échoué.

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Par Baba Ahmed, à Bamako

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