CAN 2012 : les Guinéens provisoirement réconciliés autour du Syli national

La Coupe d’Afrique des Nations (CAN 2012) qui s’ouvre au Gabon et en Guinée Équatoriale a un grand mérite en Guinée : elle réconcilie les différentes tendances politiques du pays autour du Syli, l’équipe nationale de football.

Les Guinéens sont persuadés que le Syli brillera pendant la CAN 2012. © AFP

Les Guinéens sont persuadés que le Syli brillera pendant la CAN 2012. © AFP

silver

Publié le 21 janvier 2012 Lecture : 3 minutes.

« Le Centre commercial El Kairaba Touré soutient le Syli national ». La banderole de vingt mètres de long qui trône sur le très populaire marché de Madina de Conakry est visible à cent mètres. C’est un fait : au jour de l’ouverture officielle de la 28e édition de la Coupe d’Afrique des Nations (CAN) de football, la capitale de la Guinée vit au rythme du Syli (Éléphant en Malinké) national. Depuis l’élection présidentielle de 2010, le pays essaye de construire une réconciliation rendue difficile par un demi-siècle de dictature civile (Sékou Touré) et militaire (Lansana Conté et Moussa Dadis Camara) et des tensions ethniques palpables dans presque toutes les sphères de la vie quotidienne.

Le président Alpha Condé « supporteur numéro un du Syli », comme s’amusent à dire ses partisans, a installé une Commission provisoire de chargée de la réconciliation nationale (CPCRN) présidée par Mgr Vincent Koulibaly, archevêque de Conakry et Elhadj Mamadou Saliou Camara, imam de la mosquée Fayçal de Conakry. Sa tâche n’est pas facile, d’autant que les violations des droits de l’homme, y compris des crimes de masse (massacres du 28 septembre 2009), ont été nombreuses.

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Mali – Guinée : premier test pour Dussuyer

L’équipe nationale guinéenne emmenée par son entraîneur, le Français Michel Dussuyer, entre en compétition mardi, face aux Aigles du Mali. Et les Guinéens se mettent à rêver. « Cette fois-ci, si nous ne prenons pas la coupe, c’est qu’on est maudit », ironise Alpha, un militant inconditionnel de l’opposition et fervent supporteur du Syli. Cette situation met la pression sur l’entreprise publique Électricité de Guinée (EDG). « Elle doit s’arranger pour nous donner du courant, prévient Alpha, afin qu’on regarde nos matchs sans être délestés ». Lors de Mondiaux ou de CAN précédents, des coupures électriques ont provoqué dans des quartiers chauds de la capitale des manifestations spontanées, souvent violentes, qui ont été dispersées par la police.

Même si les chances de la Guinée face à des équipes comme la Côte d’Ivoire, le Ghana ou le Sénégal semblent un peu minces, les Guinéens pensent tout de même que cette fois-ci, le Syli ira loin dans la compétition et pourrait même remporter la coupe. Du coup, un véritable business s’est créé autour des pachydermes guinéens : drapeaux tricolores (rouge-jaune-vert), grands ou petits vendus aux bords des routes, tee-shirts, brassards, foulards, etc., à l’effigie des joueurs Pascal Feindouno, Ismaël Bangoura, Abdoulaye Sadio Diallo…. Et des entreprises se surprennent à faire de la philanthropie. À l’image de l’entreprise minière Rio Tinto qui a offert 750 000 dollars à l’équipe nationale et à la Fédération guinéenne de football (Feguifoot).

Les bonnes finances du Syli

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Le gouvernement n’est pas en reste, et sonne la mobilisation. Le premier ministre Mohamed Saïd Fofana a annoncé un budget de participation pour l’équipe nationale à la CAN de 66 milliards de francs guinéens, soit 7 millions d’euros, quand le ministre des Sports, l’ex-emblématique capitaine du Syli, Titi Camara, initie des séances de lectures coraniques dans les mosquées.

En Guinée, qu’ils soient forestiers, Malinké, Peuls, Soussous (les principales ethnies du pays) ou supporteurs du Rassemblement du peuple de Guinée (RPG de Condé), de l’Union des forces démocratiques de Guinée (UFDG de Cellou Dalein Diallo), de l’Union des forces républicaines (UFR de Sydia Touré) et de l’Union pour le progrès de la Guinée (UPG de Jean Marie Doré), tous sont « derrière le Syli », selon l’expression consacrée dans le pays. Une réconciliation provisoire certes, mais qui est loin d’être le cas en Côte d’Ivoire. Au pays des Éléphants de Didier Drogba, des personnalités importantes du camp de Laurent Gbagbo, réfugiées au Ghana, ont ouvertement appelé leurs partisans à supporter les… Blacks stars du Ghana !

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Par André Silver Konan, envoyé spécial à Conakry

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