Législatives gabonaises : tous gagnants ?

Après les législatives gabonaises du 17 décembre, les deux camps crient victoire. Le parti présidentiel, parce qu’il a remporté l’écrasante majorité des sièges ; l’opposition, car elle estime que son appel au boycott a été suivi. Analyse.

Des militants du l’Union du peuple gabonais (UPG) dans les environs de Libreville en 2007. © AFP

Des militants du l’Union du peuple gabonais (UPG) dans les environs de Libreville en 2007. © AFP

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Publié le 2 janvier 2012 Lecture : 3 minutes.

Un fait est accepté par tous : le Parti démocratique gabonais (PDG, au pouvoir) est crédité de 114 sièges sur les 120 que compte l’Assemblée nationale. Avec ses alliés du Rassemblement pour le Gabon (deux élus) etdu Centre des libéraux réformateurs (un député), la majorité compte désormais 117 sièges à la Chambre haute.

Pour le reste, la classe politique ne s’accorde sur rien. Chaque camp interprète à sa manière le déroulement et l’issue des législatives du 17 décembre. Pour le parti présidentiel, les urnes ont parlé. La majorité absolue lui donne les coudées franches pour appliquer le programme d’Ali Bongo Ondimba, élu en août 2009.

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La victoire a même une saveur particulière : n’avait-on pas prédit au président une défaite électorale et une humiliante cohabitation avec ses anciens amis de l’ex-Union nationale, résolus à lui couper les ailes ? Même si elle est reconnue par la Commission électorale nationale autonome et permanente (Cenap), la faible participation (34,28 %) n’entache ni la régularité du scrutin ni la légitimité des élus, se convainc-t-on au PDG.

"Assemblée nationale de type soviétique"

En face, ses adversaires, tout en contestant la régularité de l’élection comme l’Union du peuple gabonais (UPG) qui a annoncé son intention de déposer un recours contre des « fraudes massives », sont eux aussi paradoxalement satisfaits de l’écrasante majorité obtenue par le PDG. « Ils sont tombés dans le piège. La nature du régime est celle d’un parti unique, qui ne tolère aucun contre-pouvoir », raillent les activistes de la société civile. Le jour du vote, la coalition regroupant les principaux ténors de l’opposition a refusé de présenter des candidats et appelé la population à « rester à la maison ». « Le mot d’ordre a été respecté, car 90 % [sic] des électeurs [746 000 inscrits, NDLR] n’ont pas voté. Comment ne pas y voir le signe d’un soutien de la population à notre appel au boycott ? », souligne Marc Ona Essangui, l’activiste à l’origine de ce front du refus, qui dénonce « un recul démocratique sans précédent avec la mise en place d’une Assemblée nationale de type soviétique ».

Jean-François Ndongou, le ministre de l’Intérieur, soutient, lui, que la faiblesse de la participation n’a rien à voir avec le boycott : « Le taux de participation est relativement le même depuis 1996. On ne dépasse pas les 40% lors des élections locales. En 2009, le taux était de 44% lors de la présidentielle…»

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Les partisans du boycott répliquent que les leaders de l’opposition ou des partis alliés qui ont été battus, comme Pierre-Claver Maganga Moussavou (Mouila), Jean-Valentin Léyama(Moanda), Louis-Gaston Mayila (Fougamou), Séraphin Ndaot Rembogo (Port-Gentil) ou Paul Mba Abessole (Kango),ont été sanctionnés pour avoir accepté de participer à une élection sans biométrie ni garanties de transparence.

Dialogue

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Pour faire voter les projets de loi élaborés par le gouvernement, le PDG n’a plus besoin d’alliés. C’est le principal avantage que cette formation tire de sa large victoire. De son côté, la société civile propose l’ouverture d’un dialogue avec le pouvoir. « Il n’est pas question d’aller quémander des postes, précise Marc Ona. Nous voulons discuter de réforme des institutions, de transparence électorale…» Mais il n’est pas sûr que ce genre de discussions soit une priorité pour Ali Bongo. Des pourparlers tenus pendant de longs mois avec feu Pierre Mamboundou n’ont abouti à rien. Et puis, le président a toujours affiché son horreur des marchandages et des compromissions. Mais pourquoi s’interdire les compromis ?

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Par Georges Dougueli, envoyé spécial à Libreville

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