Maroc – Législatives : dans l’attente des résultats

Vendredi 25 novembre au Maroc, quelque 13 millions d’électeurs ont été invités à élire leurs 395 députés. Principal enjeu de ces premières législatives depuis la nouvelle Constitution : le taux de participation. Reportage de notre envoyé spécial.

À 15 heures, au Maroc, le taux de participation s’élevait à 22,4% des inscrits. © Abdelhak Senna/AFP

À 15 heures, au Maroc, le taux de participation s’élevait à 22,4% des inscrits. © Abdelhak Senna/AFP

Publié le 25 novembre 2011 Lecture : 3 minutes.

Maroc : législatives anticipées 2011
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Maroc : législatives anticipées 2011

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Plus encore que l’éventualité d’une percée des islamistes, le véritable enjeu du vote de ce vendredi 25 novembre, au Maroc, était le taux de participation. Lors des dernières législatives en 2007, seulement 37% des inscrits avaient voté, plongeant la classe politique toute entière dans une profonde perplexité.

À 15 heures, le taux de participation s’élevait à 22,4% des inscrits, selon l’agence de presse officielle. Un chiffre légèrement supérieur à celui enregistré à la même heure en 2007. A la fin de la journée, il s’élevait à environ 45 %. Près de 40 000 bureaux de vote étaient ouverts dans tout le royaume jusqu’à 19 heures locales (GMT).

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Ces derniers jours, le ministère de l’Intérieur et les partis ont accentué leurs appels à voter avec une débauche de moyens (affichage, spots télévisés et radio, SMS) pour éviter la réédition de la gifle de 2007. « Nous travaillons nuit et jour depuis des semaines », explique un caïd à Casablanca. Représentant du ministre de l’Intérieur au niveau des arrondissements, le caïd supervise les moqaddem qui ont vérifié les listes électorales, distribué au porte-à-porte les avis de vote comportant les adresses et numéro de bureau aux citoyens inscrits. « Nous sommes comme des traiteurs, la fête se poursuit sans nous », ajoute le caïd, sourire en coin.

Vote timide

Dans un bureau de la préfecture casablancaise d’Aïn Sebaâ Hay Mohammadi, l’affluence était pourtant modeste le matin. Les électeurs cherchaient patiemment la salle pertinente, dans une organisation parfois défaillante. Ceux qui ne trouvent pas leur nom sur les listes sont invités à envoyer un SMS au 2727, numéro relié à un serveur informatique du ministère de l’Intérieur.

Après avoir retrouvé l’endroit où il devait se rendre, le bureau numéro 241, Adil a présenté sa carte nationale d’identité, s’est isolé pour cocher son bulletin de vote unique portant les symboles de la vingtaine de listes concurrentes. « J’ai voté blanc même si son bulletin sera comptabilisé parmi les scrutins nuls », nous a-t-il confié.
Dans le quartier populaire de l’ancienne médina, les bureaux étaient désertés à 13 heures. Mais juste après la fin de la prière du vendredi, des dizaines de votants ont afflué dans l’école Fatima Al Fihriya pour « accomplir leur devoir national », selon l’expression de Abdalhak, avocat.

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Beaucoup sont venus en famille, s’interpellant dans les couloirs de l’école, promettant leurs voix aux représentants des candidats présents sur place et qui ne relâchaient pas leurs efforts, malgré la fin officielle de la campagne la veille à minuit. « La consigne de fin de campagne n’est pas respectée partout », confirme Kamal Lahbib, coordinateur du collectif associatif pour l’observation des élections. Près de 2 000 observateurs ont été accrédités par les autorités. À Fès, des heurts auraient ainsi opposé des supporters de candidats, provoquant une intervention des autorités.

Valeur de test

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Le scrutin a valeur de test, près de cinq mois après l’adoption d’une Constitution renforçant les pouvoirs du Parlement et du chef du gouvernement mais préservant la suprématie du roi, Commandeur des croyants. La participation aux élections se réduit régulièrement depuis 1963, date des premières élections législatives, battant chaque fois des records à la baisse (67% en 1984, 62% en 1993, 58% en 1997, 50% en 2002).

Un taux de participation inférieur ou sensiblement égal à celui de 2007 serait lu comme un désaveu du train de réformes dans lequel s’est engagé Rabat depuis le début du Printemps arabe ». Pour sa part, le Mouvement de contestation du 20 février appelle au boycott, demandant des changements plus profonds. « Je n’irai pas voter parce que je refuse d’accréditer cette mascarade politique. Les élections n’y changeront rien », tonne Salim, 23 ans. La compétition entre partis, dit-il, « ne me concerne pas ».

L’inconnue PJD

Pariant sur leur virginité politique, les islamistes du Parti de la justice et du développement (PJD, opposition) ont mené une campagne agressive. Sous la houlette de leur secrétaire général, le tonitruant Abdelilah Benkirane, ils espèrent tirer profit des divisions de la majorité sortante. Alors que la Koutla qui regroupe les partis de l’Istiqlal, de l’Union socialiste des forces populaires (USFP) et du Parti du progrès et du socialisme, lance discrètement des appels du pied aux islamistes, les huit partis de l’alliance pour la démocratie (surnommé G8 par la presse marocaine) se posent en opposants aux opposants.

Par la voix de son leader, Salaheddine Mezouar, ministre des Finances sortant et président du Rassemblement national des indépendants (RNI), le G8 espère former une majorité suffisante pour mener le prochain gouvernement. « Je vais voter RNI pour empêcher les islamistes d’arriver au pouvoir », affirme Mohammed, 29 ans et architecte. Mais très confiants, les partisans du PJD attendent les résultats. Verdict samedi 26 novembre, « Inch’allah ! »

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Par Youssef Aït Akdim, envoyé spécial à Casablanca

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