Tunisie : le port de Radès en difficulté

Grève, suspension des importations de matières premières, insuffisances techniques structurelles… Le premier port commercial tunisien tente de sortir la tête de l’eau.

Le terminal n° 1 a été complètement bloqué du 8 au 10 juillet. © Nicolas Fauqué/Imagesdetunisie.com

Le terminal n° 1 a été complètement bloqué du 8 au 10 juillet. © Nicolas Fauqué/Imagesdetunisie.com

Publié le 7 août 2013 Lecture : 3 minutes.

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Transport maritime : ports à prendre

Sommaire

Le 18 juillet, dans son bureau situé dans l’immeuble de l’Office de la marine marchande et des ports (OMMP), Kheireddine Sghair, directeur du port de Radès, ne cachait pas son anxiété. Et pour cause : le terminal numéro 1 (T1) a été totalement bloqué du 8 au 10 juillet. Cette grève spontanée, observée par le personnel de la Société tunisienne d’acconage et de manutention (Stam), a porté un rude coup à l’économie locale, car ce port commercial est le plus important de Tunisie. D’une superficie de 50 ha, le T1 dispose de sept quais dévolus au chargement et au déchargement de conteneurs et d’unités roulantes. À lui seul, il représente 25 % du trafic global de marchandises, 75 % des conteneurs et plus de 80 % des trafics rouliers transitant dans le pays, d’après l’OMMP.

À l’origine de ce débrayage sans préavis, des rumeurs de privatisation des quais 8 et 9. Pourtant, ces derniers sont encore à l’état de projet et leur construction ne débutera pas avant 2014 dans le meilleur des cas.

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Retard

Si aucun bilan financier n’a encore été établi, l’OMMP estime que la dizaine de navires restés en rade, dans l’impossibilité d’accoster, a cumulé vingt-trois jours de retard. Par ailleurs, 3 000 conteneurs et 1 000 véhicules n’ont pu être manutentionnés par la Stam. Cette société publique détient depuis 2005 un contrat de concession exclusif d’une durée de trente ans pour exploiter le T1 du port de Radès.

Cet épisode houleux a provoqué des dysfonctionnements à plusieurs niveaux. Les exportations à destination des ports européens (principalement Barcelone, Gênes et Marseille) ont été ralenties, alors qu’elles représentent 48 % du PIB du pays en 2012, d’après la Banque mondiale. La suspension des importations de matières premières pour les sociétés locales, qui travaillent en flux tendu sur fond de crise économique, a causé des retards et même des arrêts dans leur chaîne de production. En ce mois de ramadan, des produits alimentaires destinés à approvisionner les marchés locaux ont été bloqués quelques jours. À l’instar de l’Union tunisienne de l’industrie, du commerce et de l’artisanat (Utica), de nombreuses voix estiment qu’il faudra des mois pour rattraper le manque à gagner.

Enclavé

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Au-delà de cette grève ponctuelle, le véritable problème est l’insuffisante capacité du port de Radès. Enclavé entre celui de La Goulette, le lac de Tunis et certaines agglomérations de la banlieue tunisoise, il est difficile à agrandir. Par ailleurs, le T1 a été initialement construit avec des jetées destinées à accueillir des navires rouliers équipés de rampes de déchargement des unités roulantes. Or ces quais ne sont pas adaptés au transport de marchandises se faisant par conteneurs, dont le trafic a d’ailleurs dépassé celui des unités roulantes ces dernières années. Enfin, six hangars et différents bâtiments administratifs (contrôle technique, douane, police) situés entre les terre-pleins et les quais entravent également la circulation des marchandises.

« Les difficultés pour charger et décharger se ressentent ; la cadence est ralentie », précise Kheireddine Sghair. Les lourdeurs des formalités administratives, notamment le dédouanement, n’arrangent pas la situation. Quant au prix de stockage pratiqué par le port, à peine 1 dinar par tonne de marchandises, il n’est pas assez dissuasif pour que les clients évacuent au plus vite les produits reçus. « Le port n’a jamais bien fonctionné », déplore un transitaire. Aussi, le directeur du port de Radès n’hésite pas à rappeler que « le barème tarifaire n’a pratiquement pas évolué depuis 1988. Nous souhaitons l’augmenter, mais cela prend du temps car plusieurs ministères [Commerce, Transports] sont concernés par ce dossier ». Conséquence : la congestion du port atteint des sommets. Un conteneur reste en moyenne quinze jours sur le T1 avant d’être évacué, contre quatre à cinq jours maximum dans les ports les plus compétitifs du continent.

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Effet d’annonce

Autre facteur important : le manque de profondeur du canal menant au T1 (entre 9 et 12 m) empêche les navires d’une plus grande capacité d’opérer à Radès et donc de réaliser des économies d’échelle. L’absence d’investissements explique en grande partie toutes ces difficultés. Une étude réalisée en 2012 par le cabinet local Comete Engineering pour le compte de la Confédération des entreprises citoyennes de Tunisie (Conect) souligne qu’« aucun projet significatif de développement et de modernisation des infrastructures n’a été mené. L’autorité portuaire communique depuis plus de dix ans sur des programmes de création de terminaux modernes à conteneurs, d’extension des quais ou encore de création de zones logistiques ». L’an prochain, l’OMMP projette d’étendre le quai numéro 7, de débuter les travaux de construction des quais 8 et 9 et de créer une zone logistique de 50 ha à proximité du T1. Encore un effet d’annonce ?

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