Prince Johnson : « Ils pensaient que je n’étais pas pertinent et maintenant je suis faiseur de roi »

L’ancien chef de guerre Prince Johnson, impliqué dans la guerre civile dans les années 90, a annoncé qu’il soutiendra la présidente sortante Ellen Johnson Sirleaf au second tour de l’élection présidentielle au Liberia. Le bourreau de Samuel Doe devenu un « bon chrétien », explique pourquoi et comment il monnaye cet « arrangement ».

Prince Johnson est arrivé troisième au premier tour de l’élection présidentielle au Liberia. © AFP

Prince Johnson est arrivé troisième au premier tour de l’élection présidentielle au Liberia. © AFP

Publié le 20 octobre 2011 Lecture : 2 minutes.

On sait donc depuis mardi que Prince Johnson soutiendra Ellen Johnson Sirleaf au second tour de l’élection présidentielle au Liberia. Son colistier James Supuwood mène actuellement des négociations « à Monrovia avec des responsables de l’UP (Union présidentielle) », a-t-il indiqué mercredi. Une curieuse union que l’ancien chef de guerre, arrivé en troisième position au premier tour, explique peu à peu. Ses motivations sont multiples mais entrent globalement dans le prisme d’un opportunisme acharné.

Pour le sulfureux Johnson, c’est tout sauf Tubman. En premier lieu parce que le candidat du Congrès pour le changement démocratique, Winston Tubman, qui affrontera Ellen Johnson Sirleaf au second tour, est soutenu par Georges Weah. Prince Johnson ne pardonne pas à l’ancien footballeur et candidat malheureux à l’élection présidentielle en 2005 d’avoir refusé d’être son colistier en 2011. Georges Weah lui reproche son implication dans la guerre civile qui, de 1989 à 2003, a fait quelque 250.000 morts. Une implication dénoncée noir sur blanc par le rapport de la commission vérité et réconciliation (TRC), dont les recommandations appellent à des sanctions contre Prince Johnson.

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Or le Congrès pour le changement démocratique (CDC) de Winston Tubman a fait de l’application de ses recommandations son cheval de bataille. Une autre bonne raison pour Johnson de ne pas soutenir Tubman. « Parce que je ne veux pas aller à La Haye (siège de la Cour pénale internationale, CPI), je préfère m’arranger avec Ellen Johnson Sirleaf, qui a aussi été épinglée par la TRC », a-t-il ainsi expliqué mardi.

"Le moins diabolique des deux démons"

Mais bien qu’il la prêche, Le « ticket Tubman-Weah » n’est, selon lui, pas intéressé par la réconciliation. « Tous ont sauté dans un camp et ce camp ne reflète pas la réconciliation. Beaucoup d’entre eux ont prêché la guerre », assure-t-il. La présidente sortante Ellen Johnson Sirleaf serait par conséquence « le moins diabolique des deux démons ».

Également citée dans le rapport de la TRC comme l’une des personnes ne devant pas occuper de postes officiels pendant 30 ans pour avoir soutenu l’ancien chef de guerre Charles Taylor, président de 1997 à 2003, Ellen Johnson Sirleaf a très vaguement commenté l’annonce de ce soutien de poids. La récente Prix Nobel de la paix a simplement indiqué qu’elle était « prête à travailler avec tous les Libériens », car «je me dois de continuer à œuvrer pour la paix et la réconciliation ».

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En position de force, Prince Johnson savoure son retour en grâce. « Je suis l’une des forces les plus puissantes du pays. Ils pensaient que je n’étais pas pertinent et maintenant je suis faiseur de roi », jubile-t-il. Un statut qu’il compte bien monnayer au prix fort, en exigeant « 30 % du gouvernement si l’UP (d’Ellen Johnson Sirleaf) remporte l’élection » en échange de son soutien. Un vrai trésor de guerre.

Chef de faction lors de la guerre civile, Prince Johnson est réputé notamment pour avoir fait filmer en 1990 ses hommes torturant à mort le président Samuel Doe pendant que lui-même buvait une bière. Un crime dont il a avoué être le responsable. Après 12 ans d’exil au Nigeria, il est rentré au Liberia en 2004, en prêchant la paix et la réconciliation. « Le sénateur Johnson d’hier, lors de son combat contre Doe, n’est pas le sénateur Johnson d’aujourd’hui. Il est un chrétien «born again». Il est un homme de Dieu », déclare-t-il à propos de lui même.

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