Congo : polémique autour des « CDD », les coiffures à durée déterminée
Pour ou contre le tissage ? La perruque cousue sur les cheveux est devenue la coiffure n° 1 de la Congolaise. Mais cette mode soulève un vent de contestation. Parmi ses contempteurs, ceux et celles qui la trouvent non hygiènique et pas assez « africaine ».
Dans la famille des CDD (Coiffures à Durée Déterminée), je demande le tissage. Ces perruques cousues sur des cheveux préalablement nattés sur le crâne remportent un franc succès auprès de la Congolaise moderne. Ces postiches lisses, bouclés ou frisés sont devenus la coiffure par excellence de ces dames qui les préfèrent, pour diverses raisons, à leurs mèches ou leurs tresses traditionnelles.
On en trouve de toutes les marques et de toutes les qualités sur les étals des marchés de Brazzaville. Pour la plupart des femmes, c’est leur côté pratique et esthétique qui l’emporte sur toute autre considération. Un tissage se pose souvent au bout d’une vingtaine de minutes et se garde beaucoup plus longtemps que des tresses qui demandent plusieurs heures de travail, pour être retirées la semaine suivante. « On peut le garder pendant un mois ou deux, ça vous évite d’aller pendant un moment chez le coiffeur », explique Virginie, femme au foyer.
Un prix accessible
Au-delà de l’aspect pratique de cette coiffure, c’est aussi son prix accessible qui lui garantit son succès. On la trouve sur le marché à partir de 2 500 F CFA (3,85 euros), alors qu’il faut compter à partir de 1000 F CFA (1,55 euros) pour se faire des tresses chaque semaine. Un argument économique qui a fini par convaincre certains hommes. Car en général, au Congo, ce sont eux qui assurent les dépenses de ces dames et spécialement en matière de beauté.
Mais tout le monde n’est pas convaincu. Du côté des détracteurs du tissage, il y a ceux qui dénoncent son côté peu hygiénique. « Ce n’est pas très propre, les femmes les gardent tellement longtemps sur elles, que ça sent mauvais. Je suis un homme qui aime toucher… On rencontre une jungle de fils enchevêtrés, on dirait des lianes dans une forêt impénétrable », se plaint Patrice Mpassi, animateur à la télévision congolaise.
On trouve également des femmes parmi ceux qui restent hermétiques à la nouvelle vague. « Les cheveux, il suffit de les entretenir pour qu’ils soient beaux. Les tissages étouffent le cuir chevelu, résultat : les cheveux sont ternis et cassants », soutient Gaenette, qui arbore fièrement une coupe afro.
Fronde contre les vrais-faux cheveux
Tissages ou mèches, les CDD nourrissent la controverse. Une véritable fronde souffle contre les vrai-faux cheveux, accusés en particulier de nuire à la beauté de la femme noire en l’acculturant. « C’est un véritable problème d’identité, une forme d’aliénation, un déni de sa propre personnalité. C’est l’usurpation de l‘identité de la femme noire », fustige Joseph Kounkou, sociologue.
En outre, il existe deux types de fibres, le synthétique et les « 100% human hair » (cheveux collectés dans des temples hindous ou importés de Chine). Mais on y trouve parfois du crin d’animaux comme le yack, comme c’est indiqué en petit sur l’emballage. Ce qui, évidemment, en laisse plus d’un(e) perplexe.
« Que ce soit synthétique, je comprends, mais alors les vrais cheveux, ça me sidère. Les cheveux c’est vivant, comment peut-on porter les cheveux de quelqu’un? C’est morbide, une vraie aberration ! » s’exclame Alain. Francis, plus radical, ajoute : « Pour moi, les femmes qui arborent tous ces postiches sont des femmes paquet-cadeau : faux cheveux, faux ongles, faux cils, faux seins… faux esprit ! » Des critiques de puristes qui ne font pas ciller la Congolaise urbaine, qui entend gérer son temps – et son argent – comme elle l’entend. Parce qu’elle le vaut bien ?
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