Printemps arabe : le rôle des blogueurs débattu à Tunis

Lundi, la troisième « Rencontre des blogueurs arabes » s’est ouverte à Tunis. Alors que plusieurs cyberactivistes sont pressentis pour obtenir le prix Nobel de la paix, cette édition sera placée sous le signe d’une réflexion, sur le rôle de ces « stars » du web pendant, mais aussi après les révolutions.

Nasser Weddady (G), Leila Nachwati (C), Manal Hassan (2e D) et Hassen Youssef (D) le 3 octobre 2011. © AFP

Nasser Weddady (G), Leila Nachwati (C), Manal Hassan (2e D) et Hassen Youssef (D) le 3 octobre 2011. © AFP

Publié le 4 octobre 2011 Lecture : 3 minutes.

Sont-ils les héros des révolutions, ceux qui ont permis au Printemps arabe d’aboutir, de mener à la chute des dictatures ? Ce qui est indiscutable, c’est que les blogueurs arabes ont eu un rôle décisif pendant les révoltes populaires, notamment en Égypte et en Tunisie. Déjouant la censure, ils ont été le porte-voix dans le monde des manifestants pendant des semaines et des mois. À tel point qu’aujourd’hui, l’un de ces cyberactivistes est sur le point de décrocher la récompense suprême, obtenir le prix Nobel de la paix 2011.

C’est dans ce contexte que s’est ouverte lundi  la « troisième rencontre des blogueurs arabes », à Tunis. Après Beyrouth en 2008 et 2009, le premier pays du printemps arabe a cette fois-ci été choisi comme terre d’accueil de cette nouvelle édition. Pendant trois jours, ces cyberactivistes venus d’Égypte, de Syrie, du Liban ou encore d’Arabie Saoudite, vont discuter autour de leur rôle dans la société, mais aussi de leurs limites.

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Si le rôle des réseaux sociaux dans les mouvements contestataires qui ont mené à la chute des régimes en place a été largement salué dans le monde entier, certains regrettent pourtant l’importance parfois surévaluée qu’on leur donne, et n’hésite pas à se livrer à une autocritique. « Il y a beaucoup d’égos dans la blogosphère », reconnaît un participant de la rencontre.

Twitter n’a pas fait la révolution

« Ce n’est pas twitter, ce n’est pas facebook qui ont fait les révolutions », avance pour sa part Riadh Guerfali, allias Astrubal, membre du site collectif tunisien Nawaat. « Ici, nous sommes les enfants de ceux qui ont été emprisonnés, torturés, de ceux qui ont vraiment sacrifié leur vie », admet-il.

Certaines « stars » internet sont aussi l’objet de violentes critiques, à l’instar de Lina Ben Mhenni, la « tunisian girl ». En lice pour devenir prix Nobel (décerné vendredi à Oslo), tout comme deux autres cyberactivistes égyptiens, elle était la star des photographes et caméras lundi à l’ouverture de la rencontre des blogueurs. Sur le net par contre, c’est plutôt une campagne de dénigrement à laquelle elle a droit. La jeune femme tient donc à relativiser sa nomination : « il faut reconnaître le cyberactivisme comme un mouvement qui peut changer les choses, mais il ne faut pas oublier que la révolution tunisienne a commencé sur le terrain » lance-t-elle.

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L’importance des réseaux sociaux dans les révolutions arabes est aussi à relativiser en fonction des pays concernés. En Syrie les blogueurs n’ont « aucune » influence, selon la Syrienne Razan Ghazzawi, qui les estime à une trentaine tout au plus à l’intérieur du pays. « Ils ne sont pas organisés, et si la plupart d’entre eux vont manifester sur le terrain, ils ne le racontent pas sur leur blog », explique-t-elle.

Quant à la Libye, « il n’y avait guère que 5% de la population connectée et active sur internet, mais le conflit a favorisé le développement de la blogosphère », raconte Ghazi Gheblawi.

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Quel avenir pour les blogueurs ?

Les participants de la rencontre se posent aussi la question de l’avenir, du rôle à jouer après les révolutions. « Aujourd’hui, nous n’avons plus d’impact. Et nous avons perdu notre engagement », déplore un participant dans la salle. Alors certains poursuivent leur engagement et optent pour la politique par exemple. Astrubal est candidat sur une liste indépendante pour les élections de l’Assemblée constituante, tout comme six autres bloggueurs dans le pays.

« C’est bien beau de gueuler mais quand on a la possibilité d’y aller pour défendre les valeurs pour lesquelles on se bat depuis des années, il faut le faire. De plus, je suis enseignant de droit constitutionnel et c’est une assemblée constituante que la Tunisie doit élire », raconte Asturbal.

Peut-être fera-t-il mieux que ces « confrères », qui ont tenté avant lui de faire le grand saut en politique. Slim Amamou, star du web tunisien, a été un éphémère secrétaire d’État à la Jeunesse dans le gouvernement formé après la chute de Ben Ali. Il en a démissionné quelques semaines plus tard, tout comme Lina Ben Mhenni, qui a quitté ses fonctions au sein de la Haute instance.

(Avec AFP)

 
 

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