Libye – Syrie : les entreprises occidentales, artisans de la censure dictatoriale ?

Que serait un régime autoritaire sans sa censure ? Rien. Et les entreprises occidentales spécialisées dans la sécurité et le renseignement l’ont bien compris. Interdites la plupart du temps dans les pays démocratiques d’où elles sont originaires, les technologies de contrôle de l’information se vendent en revanche très bien ailleurs. Par exemple en Libye ou en Syrie. Embarrassant.

L’Occident s’insurge contre les censures organisées grâce à leurs technologies. © AFP

L’Occident s’insurge contre les censures organisées grâce à leurs technologies. © AFP

Publié le 30 août 2011 Lecture : 2 minutes.

Dans l’ancien fief de Mouammar Kadhafi, c’est la filiale du groupe français Bull, Amesys, qui a profité de la méfiance du dictateur à l’égard d’Internet. Un reportage du Wall Street Journal dans un ancien QG des services de sécurité libyens et des images tournées par la BBC ont confirmé que les Français, alors en concurrence avec des firmes chinoises et sud-africaines, auraient fourni un système d’interception des communications baptisé Eagle. Un nom peu énigmatique pour un logiciel qui a, entre autres, la possibilité d’espionner les courriels.

Bull et sa filiale Amesys, qui s’enorgueillissent de travailler pour des ministères français, la Défense et l’Intérieur, ou encore pour l’armée américaine, n’ont pas confirmé l’existence du client libyen, désormais peu recommandable. On le comprend : sur un livre d’or, la signature de Kadhafi peut faire désordre.

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Bachar al-Assad et la technologie américaine

Mais l’ex-guide libyen n’est pas le seul à avoir bénéficié des prouesses technologiques développées par les entreprises occidentales. Le dirigeant syrien Bachar al-Assad, pour sa part toujours en poste, se serait offert les services d’une entreprise américaine appelée Blue Coat, que le site reflets.info qualifie de « maître artisan de la censure syrienne ».

« Quelques tests menés directement depuis la Syrie nous ont permis de mettre en lumière l’utilisation de proxys filtrants et certainement d’outils de Deep Packet Inspection (DPI – méthode de contrôle et de blocage d’informations Internet) par le gouvernement syrien grâce aux technologies américaines fabriquées par la firme BlueCoat. » explique reflets.info.

Nécessaire réglementation

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Peut-on cependant blâmer les firmes du secteur des méthodes de filtrage d’Internet de dérive autocratique ? Assurément non. Car, loin d’une portée politique, l’intérêt de ces entreprises est avant tout commercial. Si les États démocratiques utilisent ces techniques dans le domaine de la lutte contre la pédophilie par exemple, les clients les plus prometteurs restent en effet les régimes dictatoriaux, soucieux de contrôler l’opposition.

Surtout, c’est en toute légalité que ces firmes occidentales commercialisent leurs produits, quelque soit le régime. Ainsi s’il est « cocasse » de constater que les gouvernements occidentaux s’insurgent contre les censures, en grande partie organisées grâce aux technologies de leur propre pays. Il n’y a qu’une conclusion à en tirer : celle d’une nécessaire réglementation du secteur.
 

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