Libye : la chute de Kadhafi, un nouveau souffle pour le printemps arabe ?

La chute du régime de Mouammar Kadhafi pourrait constituer un tremplin pour les contestations dans le monde arabe. D’abord en Syrie et au Yémen… mais peut-être aussi  en Algérie.

Benghazi en liesse le 22 août 2011. © AFP

Benghazi en liesse le 22 août 2011. © AFP

Publié le 23 août 2011 Lecture : 3 minutes.

Bientôt trois dictateurs au tableau de chasse du printemps arabe ? Rien n’est encore sûr, mais les chef d’État arabe semblent subir un effet domino – même si leur chute est plus ou moins rapide (et plus ou moins aidée de l’étranger). De fait, il aura fallu quelques semaines aux peuples tunisien et égyptien pour renverser de manière plutôt pacifique Zine el-Abidine Ben Ali et Hosni Moubarak, alors qu’en Libye six mois d’une guerre civile avec intervention internationale n’ont toujours pas eu raison de Mouammar Kadhafi – dont le régime semble cependant en fin de parcours.

Quel sera la conséquence de la chute du régime libyen pour les autres pays de la région où la contestation sévit déjà depuis plusieurs mois ? « Voir tomber un nouveau dirigeant (…) va encourager les autres mouvements d’opposition dans le monde arabe », pressent Jane Kinninmont, analyste à l’institut britannique Chatham House. « Peut-être que d’ici fin 2011, cinq dirigeants arabes seront tombés », ajoute la chercheuse, faisant référence au président syrien Bachar al-Assad et à son homologue yéménite Ali Abdallah Saleh.

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En Syrie, le bilan de ces cinq mois de soulèvement populaire est lourd. Quelque 2 200 personnes ont trouvé la mort dans les manifestations qui secouent le pays et le régime ne montre que quelques légers signes d’inflexion. Quant au président yéménite, il reste hospitalisé en Arabie Saoudite suite à un attentat, mais continue d’annoncer régulièrement son retour.

Révolutions pacifiques

À la différence de la Libye, les populations syrienne et yéménite semblent vouloir conserver le caractère pacifique de leurs révolutions, et ne solliciter aucune forme d’aide étrangère. Ibrahim Sharqieh, directeur adjoint du Brookings Doha Center, estime que « cette première révolution arabe [en Libye] à triompher par les moyens militaires et avec une aide de puissances étrangères ne constituera pas un modèle » pour les autres contestataires de la région. « Je suis convaincu que le soulèvement pacifique se poursuivra dans le reste du monde arabe », analyse-t-il.

La Libye servirait donc, non pas de modèle pour les pays arabes, mais d’encouragement. Pour Salam Kawakibi, directeur de recherches à l’initiative arabe de réforme, le cours des révolutions yéménite et syrienne, pour l’instant sans résultats, pourrait en effet changer grâce à une nouvelle donne libyenne. Si elle se confirme, la prise totale de Tripoli « va redonner espoir à la révolution arabe, après les frustrations des mois derniers ».

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Qu’en est-il des proches voisins de la Libye ? Jane Kinninmont parie que la chute de Kadhafi aura des conséquences en Algérie, « le pays le plus concerné, surtout en raison de sa proximité géographique avec la Libye ». Le Maroc quant à lui, « a annoncé des réformes assez globales, alors que le régime algérien a pu jusqu’à présent réprimer avec succès les protestations mais ne semble pas capable de mener une réforme politique », explique-t-elle.

Ingérences étrangères

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En Libye, l’imminence de la chute de Mouammar Kadhafi ne laisse pas sans inquiétudes. Depuis 42 ans sous la coupe d’un dictateur, le pays risque d’avoir des difficultés à surmonter les défis qui l’attende. Salam Kawakibi craint notamment que « les islamistes extrémistes » tentent de récupérer la révolte. Mais plus encore, le chercheur s’effraie des ingérences étrangères. « Les pays qui sont intervenus militairement en Libye en invoquant des raisons humanitaires avaient en perspective les marchés qui vont s’ouvrir et la reconstruction », dit-il.

Le pays dispose en effet de nombreuses ressources pétrolières, il est l’un des principales puits de pétrole du continent, avec 44 milliards de barils. « Je crains qu’après la libération de la Libye, outre le prix économique inévitable, il n’y ait un prix politique à payer, le pays devenant très proche de la politique occidentale » conclut Salam Kawibi. Mais une chose est sûre : l’après Kadhafi demeure totalement incertain.

(Avec AFP)

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