Libye : percée des rebelles autour de Tripoli, mystérieuses négociations à Djerba
Des négociations entre des représentants du régime de Kadhafi et « plusieurs parties » se dérouleraient sur l’île tunisienne de Djerba et peut-être à Tunis, ce que les rebelles ont cependant démenti. Sur le terrain, ces derniers gagnent du terrain.
Tripoli est désormais cernée. Après d’intenses combats dimanche, les rebelles affirment contrôler plusieurs villes : la « majeure partie » de Zawiyah, à une quarantaine de kilomètres à l’ouest de la capitale libyenne, mais aussi Gharyane à 50 km au sud, et Sorman à une soixantaine de kilomètres à l’ouest. Selon un porte-parole de la rébellion, les insurgés contrôlent aussi les 15 km de route entre Zawiyah et Sorman, ce qui prive la capitale de sa voie habituelle d’approvisionnement depuis la Tunisie.
« Il devient de plus en plus clair que les jours de Kadhafi sont comptés, que son isolement est de plus en plus important chaque jour », a déclaré le porte-parole de la Maison Blanche, Jay Carney, tandis que la porte-parole du département d’État, Victoria Nuland, annonçait que les États-Unis étaient « très encouragés par la progression des rebelles ». Mais l’avenir de la rébellion se joue aussi sans doute en Tunisie.
Depuis le mois d’avril, l’île tunisienne de Djerba, proche de la Libye, joue un rôle central dans les contacts plus ou moins formels que Tripoli arrive à maintenir avec le reste du monde, y compris avec les rebelles. L’existence de négociations secrètes assez avancées a été confirmée lundi à l’AFP par plusieurs sources concordantes, mais démenties officiellement.
Alors que des appareils sud-africain (un jet triple réacteurs) et qataris (deux hélicoptères militaires) se trouvaient lundi sur l’aéroport de Djerba, des « pourparlers se sont déroulés la nuit dernière dans un hôtel sous haute garde », a indiqué une source proche des milieux sécuritaires tunisiens. « Des cortèges de voitures escortés ont passé la frontière dimanche au point de passage de Ras Jedir, près de Djerba », a-t-on ajouté de même source. Ont été présents parmi les négociateurs plusieurs ministres et responsables sécuritaires pro-Kadhafi dont les noms n’ont pas été dévoilés.
À Tunis aussi ?
Selon l’agence tunisienne TAP, les ministres libyens de la Santé et des affaires sociales, Ahmed Hijazi et Ibrahim Cherif, ont séjourné dimanche à Djerba, où ils ont rejoint le chef de la diplomatie libyenne Abdelati Obeidi. Des négociations sont en cours « avec plusieurs parties étrangères », ajoutait l’agence sans donner d’autres précision.
De sources hôtelières, on a appris également qu’une forte demande d’hébergement de personnalités libyennes a été enregistrée dimanche dans des palaces à Gammarth, dans la banlieue nord de Tunis, où avait résidé la semaine derrière le ministre des Affaires étrangères Abdelatti Obeidi. L’ex-ministre jordanien des Affaires étrangères Abdul Ilah al-Khatib, envoyé spécial du secrétaire général de l’ONU Ban Ki-moon, est également arrivé lundi à Tunis. Et il a déclaré être venu en Tunisie pour se joindre aux pourparlers engagés entre des responsables du régime de Mouammar Kadhafi et de la rébellion. Selon lui, des négociations poussées se dérouleront à Tunis.
Pourtant, à New York, l’ONU a démenti une quelconque participation, assurant ne disposer d’« aucune information concrète concernant des pourparlers qui auraient lieu en Tunisie entre le Conseil national de transition (CNT) et les autorités de Tripoli ». Et à Benghazi, le vice-président du CNT, Abdel Hafiz Ghoga, a lui aussi démenti toute discussion avec le régime, « que ce soit en Tunisie ou ailleurs ».
Par ailleurs, des affrontements ont opposé dans la nuit de dimanche à lundi à Ben Guerdane, près de Ras Jedir, des pro-Kadhafi libyens ou tunisiens qui avaient franchi le point de contrôle dans de grosses voitures 4X4 et des partisans de la rébellion qui célébraient « la fin de Kadhafi ». Les combats ont pris fin après après l’intervention des unités de protection de l’ordre public (POB) tunisiennes à 2 heures du matin (01H00 GMT).
Renforts militaires
Ces événements interviennent alors que des renforts militaires exceptionnels avaient été constatés dimanche à Ras Jedir, côté libyen du poste frontalier entre la Libye et la Tunisie, alors que des blessés étaient arrivés dimanche par les pistes sahariennes. « Il y a une présence sans précédent d’unités sécuritaires pro-Kadhafi, avec blindés et armes lourdes du côté libyen du passage frontalier », avait indiqué un témoin.
À Tunis, enfin, des fortifications ont été érigées autour de l’ambassade de Libye à Tunis, entourée de hauts barbelés sous la garde l’armée. Ce dispositif renforcé a été placé après une tentative menée par des Libyens d’ériger le drapeau de la rébellion sur l’édifice situé sur une grande artère de Tunis.
(Avec AFP)
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