Égypte – ramadan : les dattes de la révolution

En Égypte, la datte est désormais sujette à un marketing « révolutionnaire ». Les diverses variétés de ce fruit avec lequel de nombreux musulmans rompent le jeûne du mois de ramadan ont été renommées en fonction des acteurs, des lieux et des événements de « la révolution du 25 Janvier. »

Une marchande de dattes du Caire, le 15 août 2009. © Amr Abdallah Dalsh/Reuters

Une marchande de dattes du Caire, le 15 août 2009. © Amr Abdallah Dalsh/Reuters

Publié le 9 août 2011 Lecture : 2 minutes.

2011, un ramadan sous le signe de la révolution
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2011, un ramadan sous le signe de la révolution

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Elles s’appelaient Nancy Agram ou Haïfa Wahby, du nom de célèbres chanteuses libanaises. Mais en ce ramadan 2011, les différentes variétés de dattes ont changé d’appellation pour se mettre au parfum de la révolution égyptienne. Les variétés les plus chères ont été surnommées « martyrs de la révolution », « place al-Tahrir », « dattes des révolutionnaires » ou encore « dattes de la démission », en référence au départ de l’ancien dictateur Hosni Moubarak, le 11 février.

Si le conseil suprême des forces armées, qui dirige actuellement la transition du pays, suscite la colère des militants et des forces politiques, la plupart des Égyptiens restent reconnaissants aux militaires de ne pas avoir tiré sur la foule pendant les manifestations. C’est pourquoi l’une des meilleures variétés du marché, vendue à 7,75 livres égyptiennes (environ 1 euros) le kilo, s’appelle désormais « al geish «  (« l’armée », en arabe).

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Les caciques et les "hordes" de l’ancien régime

Quant aux caciques de l’ancien régime, ils n’ont pas été oubliés. Leurs noms servent désormais à désigner les variétés les moins chères : il y a celui de Ahmed Ezz, l’homme d’affaire proche de Gamal Moubarak et accusé de détournement de fonds publics, ou encore celui de Habib el-Adly, l’ex-ministre de l’Intérieur accusé de corruption et du meurtre des 850 manifestants de la révolution du 25 Janvier.

Certaines variétés, de qualité moindre encore, ont également été surnommées « les hordes de l’ancien régime » ou encore « Torah Land », un clin d’œil à la prison de Torah, dans la banlieue du Caire, où sont emprisonnés les deux fils de Hosni Moubarak ainsi que les anciens collaborateurs du raïs.

Suivant la tradition prophétique, de nombreux musulmans rompent le jeûne du mois sacré en consommant des dattes. Mais l’inflation économique annuelle qui a atteint les 12% n’a pas épargné ce fruit, dont l’Égypte est le premier producteur mondial avec une récolte annuelle de 1  400 000 tonnes. Alors que les prix varient normalement entre 2,5 et 30 livres égyptiennes (0,30 et 3,5 euros) le kilo en fonction du commerçant et de la qualité du produit, il faut désormais compter une hausse d’environ 35%, ce qui donne à ce ramadan 2011 un goût bien amer.

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De l’optimisme aux consommateurs

Les marchands de datte rivalisent donc d’imagination pour redonner de l’optimisme aux consommateurs et écouler leur stock. D’après l’agence Reuters, c’est en 2001 qu’ils ont commencé à renommer leurs marchandises en fonction de l’actualité nationale et internationale. Après le 11 septembre, les dattes « Oussama Ben Laden » étaient disponible dans tous les souks du Caire. Une opération marketing aussi juteuse qu’agressive…

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Avec ce succès initial, l’habitude ne s’est pas perdue : en 2003, c’est Saddam Hussein qui avait été mis à l’honneur, au moment où l’Irak était envahi par les États-Unis. En 2006, en signe de soutien au Hezbollah, alors en guerre avec Israël, certaines variétés avaient été surnommée « Hassan Nassrallah », du nom du leader libanais.

Et en 2010 enfin, la meilleure variété de dattes avait été surnommée Hassan Shehata, en hommage à l’entraîneur de l’équipe nationale de football qui remportait alors, pour la troisième fois consécutive, la Coupe d’Afrique des nations.

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