Somalie : les Shebab ignorent la famine et mettent des millions de vie en danger

Alors que les Nations unies ont alerté la communauté internationale sur la situation en Somalie, les miliciens Shebab, qui contrôlent une partie du pays, continuent de nier la gravité de la crise. Une ignorance qui menace des millions de personnes.

Près de la moitié de la population somalienne, soit 3,7 millions de personnes, sont en crise. © OCHA Somalie

Près de la moitié de la population somalienne, soit 3,7 millions de personnes, sont en crise. © OCHA Somalie

Publié le 22 juillet 2011 Lecture : 2 minutes.

« Il y a une sécheresse en Somalie mais pas de famine, ce qui est déclaré par l’Organisation des Nations unies (ONU) est faux à 100%. » Cette déclaration, vendredi, de Cheikh Ali Mohamoud Rage a en quelque sorte remis les pendules à l’heure et effacé la surprenante sortie médiatique d’un des responsables du mouvement. Sous couvert d’anonymat, celui-ci avait avoué mercredi : « La déclaration de famine dans des régions de Somalie par l’ONU est bienvenue et nous voudrions voir l’aide arriver jusqu’à la population. »

Cette phrase n’avait pas manqué d’étonner, notamment dans les rangs des ONG. Ainsi, interviewée sur France Info jeudi matin, la présidente de Médecins sans frontières (MSF), Marie-Pierre Allié, restait prudente tout en se félicitant de la nouvelle. Et, de fait, le doute était permis : depuis 2009, les ONG sont invariablement repoussées du territoire par ces mêmes milices Shebab, d’une « implacable brutalité », selon les mots sans équivoque de Human Rights Watch.

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Dix à douze millions de personnes touchées dans la région

L’invitation du « Shebab anonyme », mercredi, s’avère donc vraisemblablement être une prise de position isolée. Et les ONG restent interdites de séjour dans les zones contrôlées par les combattants islamistes, affiliés à Al-Qaïda. « Les groupes interdits précédemment ne sont pas les bienvenus pour travailler dans les zones sous notre contrôle », a ainsi annoncé Cheikh Ali Mohamoud Rage dans sa mise au point de vendredi.

Implacable, mais incapable de masquer l’ampleur de la crise humanitaire qui touche la Corne de l’Afrique, et en particulier la Somalie, dont l’instabilité politique et l’absence de gouvernement effectif n’arrangent rien.

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Selon les Nations unies, ce sont 10 à 12 millions de personnes qui seraient touchées par la plus grave sécheresse depuis 60 ans dans la région. Mercredi, le Bureau de la coordination des affaires humanitaires de l’ONU (Ocha) estimait en conséquence que la famine touchait deux régions du sud de la Somalie, précisément contrôlées par les Shebab : le sud de Bakoul et du Shabelle inférieur. « Près de la moitié de la population somalienne, soit 3,7 millions de personnes, est maintenant en crise, dont environ 2,8 millions dans le Sud », a ainsi déclaré Mark Bowden, le coordinateur humanitaire de l’ONU pour la Somalie.

Une famine incontestable

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La sécheresse, aggravée par l’instabilité politique, a poussé des milliers de Somaliens à rejoindre le Kenya et l’Éthiopie voisins. Plus de 135 000 d’entre eux l’ont fait depuis le début de l’année, dont 54 000 pour le seul mois de juin, selon le Haut-Commissariat des Nations unies pour les Réfugiés (HCR), qui estimait, mardi 5 juillet, qu’« un quart des 7,5 millions de Somaliens sont désormais soit déplacés internes, soit réfugiés dans d’autres pays ».

Ainsi, les camps de réfugiés ne cessent de grossir, comme celui, surpeuplé, de Dadaab, au Kenya, le plus grand du monde. Il voit arriver chaque jour des victimes de malnutrition sévère, notamment les enfants, atteints pour 30% à 40% d’entre eux, toujours selon le HCR. Et les chiffres sont plus alarmants encore pour les camps situés en Éthiopie puisque le pourcentage y dépasse 50%.

Or on parle de famine, selon l’Ocha, quand le taux de malnutrition aiguë est supérieur à 30% chez les enfants et que le taux de mortalité dépasse deux décès par jour pour 10000 habitants. Celui de la Somalie se situe à 7,4 pour 10000 habitants. Ce qui ne laisse pas place au doute quant à l’urgence de la situation. Sauf, peut-être, chez les Shebab.

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