Ouganda : le premier procès pour crimes de guerre vise un ex-membre de la LRA
Un ancien colonel de l’Armée de résistance du Seigneur (LRA) est jugé depuis lundi à Gulu, dans le nord de l’Ouganda, pour crimes de guerre. Le prévenu nie son implication dans les massacres de civils perpétrés pendant vingt ans par le mouvement rebelle de Joseph Kony.
Devant une salle d’audience pleine à craquer, Thomas Kwoyelo a réfuté les 53 chefs d’accusation à son encontre. Le procès de cet ancien commandant de l’Armée de résistance du Seigneur (LRA) commandée par Joseph Kony s’est ouvert lundi à Gulu, principale ville du nord de l’Ouganda. Accusé de crimes de guerre, l’ex-colonel du mouvement de guérilla a comparu devant une chambre spéciale de la Haute Cour de justice, créée par l’Ouganda pour enquêter sur les crimes commis depuis vingt ans par la LRA.
Dirigé à partir de 1988 par Joseph Kony – aujourd’hui en fuite -, la LRA est accusée de massacres de civils, de mutilations et d’enrôlements forcés d’enfants. Selon l’acte d’accusation, « toutes les attaques ont été soit commises par [Thomas Kwoyelo] soit menées en toute connaissance de sa part ».
"Justice doit être rendue"
Devant la chambre spéciale de la Haute Cour de justice, le prévenu, 39 ans, a farouchement nié avoir commis ou commandité des assassinats, des prises d’otage, des destructions de biens d’autrui et des blessures.
« Les Ougandais et la communauté internationale savent que justice doit être rendue et elle sera rendue. Ceci indépendamment de qui gagne et de qui perd », a déclaré à l’ouverture des débats le président d’audience, le juge Yorokamu Bamwiine.
Les faits présumés remontent à 1986, quelques mois après l’accession au pouvoir par les armes de l’actuel président ougandais Yoweri Museveni. Un mouvement de guérilla naît dans le nord du pays pour s’opposer à Museveni, lequel venait de chasser du pouvoir un conseil militaire composé de gradés originaires du Nord. L’actuel président avait lui-même présenté sa propre rébellion comme une lutte contre le Nord. Les combats n’ont vraiment cessé qu’avec le lancement d’un processus de paix en 2006. Ils ont fait plusieurs dizaines de milliers de morts et 1,8 million de déplacés.
Chassée d’Ouganda, la LRA reste aujourd’hui active en Centrafrique et dans le nord-est de la République démocratique du Congo (RDC). Jusqu’à présent, les rebelles capturés ou qui se rendaient à l’armée ougandaise ont tous été graciés ou libérés, en vertu d’une loi d’amnistie. Certains ont même été intégrés dans l’armée ougandaise et participent désormais aux opérations contre la LRA.
Kony et la CPI
Depuis dix ans, 12 906 rebelles ont bénéficié de la loi d’amnistie. Mais Joseph Kony et trois de ses plus proches lieutenants restent sous le coup de mandats d’arrêt pour crimes de guerre et contre l’humanité émis en 2005 par la Cour pénale internationale (CPI). En avril 2008, après 20 mois de négociations, Kampala et la LRA ont finalisé un accord de paix, mais Joseph Kony a toujours refusé de le signer, exigeant (sans succès) l’arrêt des poursuites de la justice internationale.
« Des poursuites pour crimes de guerre menées sur place sont essentielles pour s’assurer que les auteurs de crimes graves commis pendant le conflit dans le nord de l’Ouganda n’échappent pas à la justice », a affirmé Elise Keppler, de l’organisation Human Rights Watch, dans un communiqué.
« Mais les procès doivent être équitables et crédibles, et les témoins doivent être protégés. Ce premier procès servira de test pour savoir si ces critères sont respectés », a-t-elle ajouté. Entre 80 et 90 témoins ont été cités à comparaître devant le tribunal de Gulu. (avec AFP)
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