Beatrice Bee Arthur, style et métissage à la Dakar Fashion Week
Du 6 au 10 juillet s’est tenue la Dakar Fashion Week, où treize stylistes, en majorité d’Afrique de l’Ouest, sont venus présenter leur collection. Rencontre avec une créatrice russo-ghanéenne dont la double appartenance culturelle fait des étincelles : Beatrice Bee Arthur.
Beatrice Bee Arthur se repère de loin et c’est ce qu’elle veut. Famille et amis lui demandent d’ailleurs si elle n’est pas déprimée quand ses cheveux ne sont pas teints en blond et coiffés en pétard et s’il n’y a pas au moins quelques paillettes sur ses vêtements. Rose flashy aux lèvres, rose sur le ruban qui tient sa chevelure et sur sa ceinture en satin, bleu azur autour des yeux, talons blancs vertigineux… De la couleur pour une créatrice russo-ghanéenne qui ne tient pas en place.
Bee métissée
Âgée de 41 ans, la styliste a vécu entre Odéssa, en Ukraine, et Accra, la capitale du Ghana. Son père, un boursier venu étudier la médecine en Russie, « est non seulement reparti avec un diplôme mais aussi avec une blonde aux yeux bleus », rigole Bee, son nom d’artiste. Résultat, ses créations, sont comme elle, multicolore et multiculturelle.
« Je travaille avec les mêmes tissus que les Ghanéens mais cela plaît aussi aux Russes. Je mélange les cultures, par exemple en cousant des symbolismes ghanéens avec l’alphabet cyrillique ou en cousant les broderies des poupées russes sur du tissu ghanéen », raconte celle qui a habillé, entre autres, l’épouse de Kofi Annan.
Pour la Dakar Fashion Week 2011, elle a apporté des « créations qui brillent car je sais que les Sénégalais aiment ça ». Sur le podium, cela donne une robe avec un dos en wax où sont tamponnées des roses brillantes, une tenue filet où est superposé un dessin arabesque (sa signature) sur la poitrine, une robe longue noire légèrement transparente où l’on devine un tanga pailleté couleur argent.
"Pas une styliste africaine"
Mais Beatrice Bee Arthur donne aussi dans le plus classique, pour sa clientèle aisée qui a besoin de tenue de travail. « Si je ne faisais que des paillettes, je ne vivrais pas de mon métier », précise la styliste, qui fait aussi de la traduction et des apparitions à la télévision ghanéenne, pour l’émission « Today’s women ». Licenciée en espagnol et en sociologie, la créatrice a commencé à dessiner des vêtements lors de ses études en Espagne. À son retour à Accra, elle trouve un travail au ministère du tourisme, mais « l’administration, très conservatrice », ne lui plait pas. Sa priorité sera donc la mode.
Afrique du sud, Cameroun, Burkina-Faso et maintenant Sénégal, Beatrice Bee Arthur, qui rêve de défiler à Moscou, refuse qu’on la qualifie de « styliste africaine ». « Je ne veux pas être invitée seulement parce que je suis africaine et que je suis la caution ethnique, dit-elle. Nous sommes toujours "ghettoisés", les Africains se retrouvent toujours avec les Africains, dans des magazines africains… Je ne supporte pas ça ».
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