Tunisie : les voies du web porno bientôt impénétrables ?

Le sort des sites pornographiques en Tunisie sera déterminé dans les jours à venir. La cour d’appel de Tunis doit se prononcer sur un éventuel retour du système de filtrage internet, lié à la protection des mineurs. De nombreux tunisiens redoutent le spectre d’une nouvelle censure.

La jsutice tunisienne rendra sa décision sur la pornographie en ligne le 18 juillet. © AFP

La jsutice tunisienne rendra sa décision sur la pornographie en ligne le 18 juillet. © AFP

Publié le 8 juillet 2011 Lecture : 3 minutes.

Jouir de la Toile en toute liberté, tel est le fantasme de nombreux tunisiens. Pourtant, à mesure qu’elle avance vers la démocratie, la Tunisie se trouve confrontée à une problématique qui agite tous les pays libres : comment concilier protection de la population et liberté d’internet ?

La pornographie online devant la justice

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Examiné par la cour d’appel de Tunis depuis lundi, le sort de la pornographie en ligne est désormais entre les mains du juge. Le 26 mai dernier, en première instance, la justice tunisienne donne raison à trois avocats qui avaient déposé une plainte, convaincus que la pornographie est dangereuse pour les plus jeunes et « contraire aux valeurs arabo-musulmanes ». L’Agence tunisienne d’Internet (ATI) est alors sommée de « censurer » le web, selon les propres mots du  juge.

Mais l’ATI, sous l’impulsion de son PDG Moez Chakchouk, nommé depuis février, conteste cette décision, soucieuse de se libérer de l’image de « censeur », qu’elle avait acquise sous le régime Ben Ali. Elle demande la suspension du jugement à la cour. La requête est rejetée par la justice le 13 juin et l’ATI se voit obligée de mettre progressivement en œuvre le filtrage. Le verdict du procès en appel est attendu pour le 18 juillet et les tunisiens découvriront alors si « Ammar 404 », le système de censure qui avait cours sous Ben Ali, pénètrera à nouveau la Toile tunisienne.

Une censure anti-révolutionnaire ?

En attendant, depuis le 15 juin, les pages à contenus pornographiques sont bloquées. Les premiers réseaux concernés sont les administrations, les ministères, les maisons de jeunes et les cybercafés. Les particuliers bénéficient quant à eux de quelques jours de répit.

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Un débat intense entoure l’affaire. Parents et partisans d’un islam rigoriste souhaiteraient que soit mise en place une capote de protection, afin de pouvoir surfer en toute sécurité. Mais de nombreux Tunisiens y voient un nouveau musèlement de la liberté d’expression. Ce qu’ils veulent, adeptes ou non du « film pour adultes », c’est éviter le retour d’une censure qui les a toujours menottés. Sur Twitter, les messages vont bon train pour s’insurger contre cette interdiction du porno. En jeu, une valeur, celle de la révolution : liberté !

Comme partout dans le monde, les sites pornographiques sont largement plébiscités sur le territoire tunisien. Sept d’entre eux apparaissaient parmi les 100 sites les plus consultés, quelques semaines après la libération du Web. Dans les faits, même avec la mise en place d’un dispositif de filtrage, l’accès aux contenus pornographiques reste possible. Il faut dire que les Tunisiens se sont habitués à contourner la censure, quelle qu’elle soit. Pour accéder aux contenus interdits, les ruses technologiques ou le téléchargement illégal restent de mise.

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Facebook et le « porno underground »

Les sites classés X disponibles sur la Toile ne sont donc que la partie visible de l’iceberg. Depuis peu, le « porno underground » s’introduit aussi dans les sites communautaires. Hypocrisie que d’interdire le X, alors que Facebook regorge de scènes torrides. Et cette fois, ce sont les Tunisiens eux-mêmes qui entrent dans l’arène. Les court-métrages amateurs made in Tunisia circulent parmi les 1,3 millions d’utilisateurs Facebook du pays. De quoi donner des sueurs (froides celles-ci), aux mères et pères de famille.

Les FAI, solution du compromis

La solution de compromis pourrait être l’installation de filtres par les fournisseurs d’accès à internet (FAI). C’est notamment cet argument qu’utilisera l’ATI lors du procès en appel. « Ce n’est pas à l’ATI de censurer, a expliqué Moez Chakchouk au site français libération.fr, c’est aux fournisseurs d’accès de proposer des solutions à leurs clients, de mettre en œuvre des techniques de contrôle parental et de filtrage. »

L’ATI ne se privera pas non plus de rappeler le coût engendré par la censure. Coût technique avec un ralentissement inévitable du réseau, coût financier ensuite, estimé par son PDG à 1,2 millions de dinars par an (611 336 euros). Une dépense bien trop élevée pour l’ATI qui, depuis qu’elle n’est plus l’instrument de censure de Ben Ali, ne reçoit plus aucune subvention à ce titre.

Alia Chérif Chammari, avocate tunisienne, membre de la Haute instance, donne son avis sur le procès de la pornographie en ligne.

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