Vaccins antirotavirus, une solution simple pour sauver des vies
Contre le rotavirus qui cause la mort de milliers d’enfants africains chaque année, le docteur Samba Ousmane Sow mène son combat en lançant un appel pour que les pays du Sud puissent davantage avoir accès aux vaccins.
Chaque jour, des enfants meurent fatalement dans toute l’Afrique à cause d’une maladie peu connue mais à l’impact dévastateur. Il s’agit du rotavirus. C’est la cause première de la diarrhée aiguë et l’un des problèmes de santé publique les plus aisément évitables de nos jours.
Annuellement dans le monde, le rotavirus tue plus de 500 000 enfants de moins de 5 ans (soit près de 1 400 décès par jour), dont une grande majorité en Afrique subsaharienne et en Asie du Sud. Il entraîne l’hospitalisation de millions d’autres, s’attaque à nos familles et menace l’avenir de nos nations en ciblant ses ressources les plus précieuses : nos enfants.
Mais la vraie tragédie, c’est que tant de morts et de souffrances n’ont pas lieu d’être. Pour les prévenir, il suffirait que les jeunes Africains aient autant accès à des vaccins salvateurs que les enfants des pays industrialisés, où la maladie n’a quasiment aucun impact. Aux États-Unis, les vaccins antirotavirus sont largement disponibles depuis cinq ans, alors que cette infection ne tuait qu’une poignée d’enfants chaque année lorsqu’ils ont été mis sur le marché. En Afrique subsaharienne, où les besoins sont bien plus énormes, c’est une option qui n’existe même pas pour la vaste majorité des enfants.
Les vaccins représentent l’un des meilleurs investissements à long terme pour éviter les maladies et donner aux enfants un bon départ dans la vie. Deux ou trois injections ou quelques gouttes à prendre oralement peuvent les protéger du rotavirus jusqu’à la fin de leur vie. Et c’est aussi l’une des interventions les moins coûteuses pour prévenir la maladie dans un pays comme le nôtre, confronté à de nombreuses priorités sanitaires qui se télescopent.
Le problème, c’est que jusqu’à présent, les vaccins antirotavirus étaient bien trop chers pour des pays pauvres où les ressources en matière de santé sont rares. Et les bailleurs de fonds hésitaient à appuyer le vaccin tant que son coût n’avait pas baissé.
Mais depuis la semaine dernière, les choses semblent s’améliorer. Les enfants des pays en développement vont enfin avoir accès aux mêmes vaccins salvateurs contre le rotavirus que ceux qui vivent dans des pays riches.
Le 6 juin, Gavi Alliance, organisation internationale qui appuie l’introduction de vaccins dans les pays à faibles revenus, a annoncé qu’une compagnie pharmaceutique avait offert d’abaisser substantiellement le prix des vaccins antirotavirus, dont le coût passera à 2,50 dollars (environ 1,70 euros) la dose, soit un tiers du prix le plus bas à l’heure actuelle. Gavi Alliance appuie déjà l’introduction de vaccins aptes à sauver des vies dans les pays africains et prévoit, à présent, d’augmenter rapidement son aide financière aux vaccins antirotavirus.
En même temps, de nouveaux vaccins bon marché se pointent à l’horizon, ce qui nous permettra de continuer nos efforts pour sauver les enfants à long terme. Dans des pays en développement comme l’Inde, certains fabricants sont en train de développer des vaccins contre le rotavirus et autres maladies qui seront aussi sûrs et efficaces – et beaucoup moins chers – que ceux qui existent aujourd’hui. En fait, lorsqu’il a annoncé la baisse du prix du vaccin antirotavirus existant, Gavi Alliance a révélé qu’un vaccin de fabrication indienne, qui devrait arriver sur le marché vers 2015, ne coûtera qu’un dollar US la dose.
C’est une excellente nouvelle pour tous les habitants d’Afrique, où le rotavirus est trop souvent accepté comme un fait inéluctable. On estime qu’un large accès aux vaccins antirotavirus dans les pays à faibles revenus pourrait sauver près de 225 000 enfants de la mort chaque année. D’ailleurs, l’Organisation mondiale de la santé (OMS) recommande vivement d’inclure le rotavirus dans tous les programmes de vaccination tant il est de nature à sauver des vies.
Mais même les vaccins les plus efficaces n’auront un impact que si les malades en ont accès. L’an dernier, il y avait beaucoup de progrès en Afrique pour rendre disponible les vaccins. Le Mali, d’où je viens, a été l’un des tout premiers avec le Burkina Faso et le Niger à lancer un nouveau vaccin contre la méningite A, le MenAfriVac, qui a pu sauver la vie de 15 000 personnes chaque année. D’autres pays, comme le Kenya, sont entrain de lancer un vaccin contre la pneumonie. Nous avons maintenant l’occasion de démontrer le même type de leadership et améliorer ces succès avec le rotavirus.
Nous en appelons à nos gouvernants pour qu’ils collaborent avec Gavi Alliance et considèrent comme immédiatement prioritaire un accès rapide aux vaccins antirotavirus pour tous les enfants du pays. Plus nous attendrons, plus nous perdrons de vies.
Nous exhortons aussi l’industrie pharmaceutique à continuer de rendre la vaccination plus accessible. Baisser le prix des vaccins actuels et créer des opportunités pour d’autres vaccins, meilleurs et moins chers, sont deux démarches qui garantiront que les fonds fournis par Gavi Alliance sauveront davantage de vies. Les pouvoirs publics, les donateurs et les fabricants ont tous un rôle crucial à jouer dans cette démarche.
Enfin, j’espère que la communauté internationale continuera de reconnaître l’importance des vaccins et le fait que ses contributions sont essentielles pour soutenir l’introduction de ces outils dont l’efficacité est prouvée. Car si c’est le rotavirus aujourd’hui, demain on disposera peut-être de nouveaux vaccins contre le paludisme, la typhoïde ou la fièvre dengue.
Les vaccins ne suffiront pas à eux seuls à débarrasser la planète du rotavirus ni à résoudre des problèmes de santé publique persistants. Un assainissement amélioré et le renforcement des systèmes sanitaires restent des problèmes qui doivent mobiliser notre attention à long terme. Mais permettre l’accès aux vaccins antirotavirus est une démarche simple et primordiale pour sauver des milliers de vies dès aujourd’hui.
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