Amnesty : malgré les révolutions arabes, les progrès des droits humains restent fragiles

Dans son rapport 2011 sur la situation des droits de l’homme dans le monde, Amnesty international note que les changements historiques à l’œuvre dans le monde arabe restent « sur le fil du rasoir ». En matière de droits de l’homme, beaucoup reste donc à faire.

Nelson Mandela, désigné « Ambassadeur de Conscience » par Amnesty International. © Alexander Joe / AFP / Archives

Nelson Mandela, désigné « Ambassadeur de Conscience » par Amnesty International. © Alexander Joe / AFP / Archives

Publié le 13 mai 2011 Lecture : 3 minutes.

Du Moyen-Orient au Maghreb, la contestation se propage. Des citoyens – ou des sujets – aspirant à davantage de liberté et de justice n’hésitent plus à se lever pour protester. Quoi de plus encourageant que la chute des régimes autoritaires en Tunisie et en Égypte ? Le développement des moyens de communication et des réseaux sociaux a changé la donne et constitue désormais une arme indispensable pour les militants. Voilà de quoi, a priori, faire avancer de manière significative le respect des droits humains. Mais il ne faudrait pas s’avancer trop vite. Car ces changements historiques restent pour l’instant « sur le fil du rasoir », selon Amnesty International, qui a publié le 13 mai, 50 ans après sa création, son rapport annuel sur la situation des droits humains dans le monde en 2010.

Si la bataille s’engage autour du contrôle de l’accès à l’information, les gouvernements tentent tant bien que mal de reprendre la main sur les nouvelles technologies et de les utiliser à l’encontre des militants. « Le mouvement se heurte à une violente riposte de la part des forces de répression, a affirmé Geneviève Garrigos, présidente d’Amnesty International France. La communauté internationale doit saisir cette occasion et faire en sorte que 2011 voit se confirmer les changements annoncés. »

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Les droits des Africains bafoués

La liberté d’expression est toujours malmenée à travers le monde : des restrictions spécifiques sont recensées dans 89 pays ; des prisonniers d’opinion dans 48 pays ; des cas de torture et d’autres mauvais traitements dans 98 pays et des procès inéquitables dans 54 pays. Alors que le continent a fêté l’année dernière le cinquantenaire des indépendances de 1960, les droits les plus fondamentaux des Africains continuent à être bafoués. En Afrique subsaharienne, des conflits persistants causent toujours d’importants dommages (Darfour, Centrafrique, Somalie, RDC…) Et, des violences ont entaché le processus électoral dans de nombreux pays, sans que leurs auteurs soient punis (Éthiopie, Burundi, Guinée, Côte d’Ivoire…) Petit tour d’horizon des droits de l’homme sur le continent…

– Côte d’Ivoire : En décembre, le président sortant Laurent Gbagbo refusait de reconnaître les résultats du scrutin présidentiel, proclamés en décembre. Le pays a alors été plongé dans l’impasse et les atteintes aux droits humains se sont multipliés : meurtres, enlèvements, disparitions… Les forces de sécurité ont déployé des moyens excessifs pour disperser les manifestations, rendant le recours à la force systématique. Les combattants et les sympathisants des Forces nouvelles (coalition de groupes armés contrôlant le Nord du pays depuis 2002) se sont également rendus responsables d’atteinte aux droits humains (tortures, détentions arbitraires…)

– Guinée : Amnesty International a relevé en 2010 de nouveaux cas de torture et autres mauvais traitements imputables aux forces de sécurité. Des dizaines de Guinéens ont été arrêtés et placés arbitrairement derrière les barreaux. L’organisation les considère comme des « prisonniers d’opinion. »

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– Cameroun : la liberté d’expression est encore mise à mal, le gouvernement continuant de restreindre les activités des opposants et des journalistes. Les élections prévues à la fin de l’année 2011 approchent et Amnesty redoute qu’une période d’instabilité ne s’installe dans le pays.

– Tunisie : encore une fois, la liberté d’expression a été sévèrement muselée en 2010. Avant la chute de ben Ali, les critiques à l’égard du gouvernement n’étaient pas possibles. En guise de réponse, ce dernier harcelait, menaçait voire emprisonnait les contestataires. Le moratoire sur les exécutions a été maintenu, mais des condamnations à mort ont tout de même été prononcées.

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– Égypte : Les dispositions législatives sur la diffamation ont permis l’inculpation de nombreux journalistes et de détracteurs du gouvernement en 2010. Sans compter que les recours à la torture et aux mauvais traitements restaient très courant durant l’ère Moubarak. Là encore, les responsables agissaient en toute impunité : 185 personnes ont été condamnées à mort et quatre prisonniers au moins ont été exécutés.

– Libye : Avant l’explosion de la rébellion, la dissidence n’avait toujours pas droit de cité. Si quelques libérations ont été signalées, des centaines de prisonniers étaient encore maintenus en détention arbitraire pour des motifs de sécurité dans les geôles de Mouammar Kadhafi, dont certaines ont été ouvertes depuis par les rebelles. Au moins 18 exécutions ont été signalées en 2010. Et les conclusions de l’enquête sur le massacre en 1996 de plusieurs centaines de détenus de la prison d’Abou Salim par les forces de sécurité n’ont pas été rendues publiques.

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