Tunis réhabilite sa médina

Au coeur de la capitale tunisienne, la réhabilitation du marché central est une réussite. Elle a respecté l’esprit du lieu, baromètre de l’économie et de l’humeur locales.

Les travaux ont permis de doubler le nombre d’étals, désormais près de 570. © Nicolas Fauqué

Les travaux ont permis de doubler le nombre d’étals, désormais près de 570. © Nicolas Fauqué

Publié le 26 juillet 2013 Lecture : 3 minutes.

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Dossier urbanisme : quelles villes demain ?

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Affecté et désorganisé par la révolution jusqu’à en paraître anarchique, Tunis peut cependant s’enorgueillir d’expériences de revalorisation urbaine réussies. Si celles réalisées dans la médina ont été assez spectaculaires et récompensées à plusieurs reprises par le prix Aga-Khan d’architecture, celles touchant au patrimoine colonial n’en sont pas moins importantes. Elles ont permis de conserver la fonction première d’édifices essentiels à la vie du cœur de la capitale tunisienne. C’est notamment le cas du marché central, îlot stratégique qui constituait déjà l’un des principaux pôles de la ville à la fin du XIXe siècle. Sa réhabilitation, achevée en 2007, illustre l’aboutissement d’une réflexion – bien menée, bien exécutée et, une fois n’est pas coutume, vraiment « durable » – sur le rapport du citoyen à sa ville.

Tout est frais, le choix est vaste, et on y rencontre une foule de connaissances.

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Convoités par les promoteurs immobiliers, les quelque 12 255 m2 du fondouk El-Ghala (« caravansérail des fruits ») auraient pu être livrés à la spéculation foncière et disparaître pour laisser place à des tours de verre et de béton. Mais ce bijou d’architecture coloniale, propriété de la ville, est une véritable institution pour les Tunisois, qui y ont leurs habitudes depuis des générations. « Pas un dimanche sans emplettes au marché central, confirme un habitant d’un quartier résidentiel de la périphérie. Tout est frais, le choix est vaste, et on y rencontre une foule de connaissances. » Pas question, donc, de le dénaturer.

Désuet

L’Association de sauvegarde de la médina (ASM) a néanmoins décidé de lui donner une seconde vie, en réhabilitant la halle au charme désuet mais assez délabrée. Un pari audacieux, qui entrait dans le cadre du programme de l’Agence française de développement (AFD) visant à améliorer les conditions de vie des populations en soutenant les investissements dans les infrastructures urbaines et rurales, ainsi que dans les équipements marchands des collectivités locales. L’expertise de l’ASM et le concours financier de l’AFD – à hauteur de 2,6 millions d’euros sur un coût global de 3,7 millions d’euros – ont permis au marché de faire peau neuve en quatre ans, sans jamais fermer ses portes pendant les travaux. 

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Rénovation complète de la halle centrale en bois, de la couverture en toile des espaces extérieurs, restructuration des halles périphériques, modernisation des équipements du marché (désormais aux normes d’hygiène et de sécurité), optimisation de l’espace, devenu plus fonctionnel… Entièrement réhabilité, le lieu n’a pas pour autant perdu son âme. Chaque aile, dont la célèbre halle aux poissons, a conservé sa fonction première. Pourtant, le nombre d’étals a été doublé : on compte aujourd’hui 370 points de vente de fruits et légumes, 96 de poisson, 24 de viande, 28 de volaille et 50 de produits alimentaires variés.

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Heures de pointe

Desservant l’arrondissement de Bab Bhar (15 000 ménages), le premier marché de Tunis est de plus en plus attractif. On y vient de toute l’agglomération et il fournit environ 700 emplois permanents. Sa rénovation a permis de mieux organiser les flux des commerçants, des chalands et des marchandises. « Ici, aux heures de pointe, on peut recevoir 1 000 clients à la fois sans que ça pose de problèmes. La principale difficulté, c’est l’accès en voiture », explique Habib, locataire d’un stand de fruits. 

Dans la morosité ambiante d’un centre-ville chaotique et difficile à vivre, le marché central se démarque : il est une valeur sûre et un espace de développement économique et humain durable, en totale cohérence avec les modes de vie des Tunisois. Un îlot d’unité qui tient de la création collective, « le plus fort symbole de la société », affirme l’architecte Leïla Ammar. En pleine expansion, Tunis change d’échelle et se pense autrement, mais le marché central, lui, continue avec succès de se réinventer tous les jours depuis plus de un siècle.

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