Après la bataille, le renouveau de la presse ivoirienne en question

La presse proche d’Alassane Ouattara fêtait lundi son grand retour et l’installation du nouveau président ivoirien. Quant aux autres quotidiens, fidèles soutiens de l’ex-chef d’État Laurent Gbagbo, ils n’ont pu reparaître pour cause de pillages ou par peur.

L’édition du 18 avril 2011 du Patriote, quotidien pro-Ouattara © Issouf Sanogo / AFP

L’édition du 18 avril 2011 du Patriote, quotidien pro-Ouattara © Issouf Sanogo / AFP

Publié le 19 avril 2011 Lecture : 2 minutes.

Deux camps à couteaux tirés et quelques indépendants esseulés. C’est le paysage médiatique qui subsistait en Côte d’Ivoire fin mars à l’arrêt de la publication des titres alors que les combats redoublaient dans Abidjan. Connue pour ses prises de position partisanes et sa virulence, la presse ivoirienne était aussi divisée que le pays.

Vague pro-Ouattara dans les kiosques

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Lundi matin, une semaine tout juste après la capture de Laurent Gbagbo, la presse pro-Ouattara ne boudait pas son plaisir. « Gbagbo est tombé, la Côte d’Ivoire renaît avec ADO », surnom du nouveau président, s’enthousiasmait en une Le Patriote, quasi-organe officiel du Rassemblement des républicains (RDR) de M. Ouattara. « La Côte d’Ivoire renaît à la vie », renchérissait Nord-Sud, saluant « la chute du dictateur » Gbagbo.

Mais pas question de perdre tout sens critique. « Pour l’heure nous nous attelons à la consolidation du nouveau pouvoir », justifie Lanciné Bakayoko, journaliste au sein de ce quotidien. « Mais lorsque tout sera en place dans un contexte démocratique, nous serons très critiques, en surveillant l’action gouvernementale. Nous n’aurons pas un comportement moutonnier », assure-t-il à l’AFP.

La presse dite « bleue », pro-Gbagbo, n’est pas encore là pour leur donner la réplique. Notre Voie, journal du Front populaire ivoirien (FPI) de l’ex-président, était absent des kiosques. « Nos locaux ont été pillés, saccagés. Il n’y a rien à récupérer », explique le rédacteur en chef Aboulaye Villard Sanogo. « Nous nous attelons à reconstituer nos entreprises, c’est ce qui explique que nous ne pouvons paraître. Et cela peut durer. » Les journalistes de ce quotidien violemment anti-Ouattara vivent dans la crainte des règlements de comptes. « Les journalistes pro-Gbagbo sont tous réfugiés quelque part », ajoute M. Sanogo.

Fidèlité à l’employeur

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Mais certains titres sont plus pragmatiques, comme Fraternité-Matin, le quotidien d’État. La mutation est assez spectaculaire. Dans sa dernière édition, « Frat-Mat » accablait « les rebelles d’Alassane Ouattara », alors que ce lundi, il faisait sa une sur l’appel à la réconciliation du « président de la République Alassane Ouattara ». Son rédacteur en chef, Abel Doualy, justifie ce changement : « Nous exécutons notre mission […] qui est celle de rendre compte de façon fidèle de la vie quotidienne des Ivoiriens, tout en sachant que le pouvoir en place est notre premier employeur. »

Si certains responsables du titre préfèrent rester « cachés », par crainte de représailles,  pour ceux qui ont choisi de participer à la nouvelle aventure, c’est une chape de plomb qui s’est levée. « Il n’y avait plus de critique au sein du journal, le pouvoir nous demandait de faire comme la RTI » (télévision d’État),  redoutable instrument de propagande, regrette un journaliste. Un autre assure même avoir entendu l’un de ses chefs passer cette consigne : « Ne cherchez pas à être intelligents quand on vous demande d’être bêtes ! »

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Après des mois de propagande, la presse ivoirienne est plus que jamais en quête de renaissance.(Avec AFP)

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