Libye : l’Otan réaffirme sa volonté de voir Kadhafi quitter le pouvoir

Si l’intervention militaire en Libye ne fait pas l’unanimité au sein de l’Otan, les 28 pays membres ont réussi à transcender momentanément leurs divergences en réaffirmant leur objectif commun : la chute de Mouammar Kadhafi. Mais les Brics ont fait part de leur opposition à l’usage de la force en Libye.

Des rebelles libyens font le V de la victoire, près d’Ajdabiya, le 13 avril 2011. © AFP

Des rebelles libyens font le V de la victoire, près d’Ajdabiya, le 13 avril 2011. © AFP

Publié le 14 avril 2011 Lecture : 4 minutes.

Quatre semaines après le début de l’intervention militaire internationale en Libye, la situation semble évoluer vers le statu quo. Sur le terrain les combats s’enlisent autour de la ville stratégique d’Ajdabiya. Et dans les états-majors, les manœuvres diplomatiques piétinent. Réunis ce jeudi à Berlin, les 28 pays de l’Otan ont pourtant mis entre parenthèse leurs divergences sur l’intervention militaire pour insister sur leur objectif commun : la chute de Mouammar Kadhafi.

Lors d’une conférence de presse commune avec son homologue allemand Guido Westerwelle, le ministre français des Affaires étrangères Alain Juppé, a rappelé que Paris, contrairement à Berlin, était « pour une intervention militaire. (…) Mais la divergence porte sur les moyens », selon Juppé qui précise : « Sur le fond nous sommes d’accord pour dire qu’il n’y a pas de solution militaire et qu’il faut une solution politique. »

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Dès le début de la crise libyenne, les ministres des Affaires étrangères des 28 pays de l’Alliance atlantique, avaient réagi contradictoirement. Tout le monde n’est pas d’accord, notamment, avec l’axe Paris-Londres. Mercredi soir, le président français, Nicolas Sarkozy, et le Premier ministre britannique, David Cameron, convenu de la nécessité d’accroître « la pression militaire » sur Kadhafi. Ce dernier reste, selon eux, « déterminé à maintenir son effort de guerre contre sa propre population ». Seulement sept pays des 28 de l’Otan (États-Unis, Belgique, Canada, Danemark, France, Norvège et Royaume-Uni) effectuent des frappes contre les chars et les dépôts de munitions libyens. Sollicitée, l’Espagne a refusé de s’engager dans la voie des bombardements.

La France et le Royaume-Uni ont demandé, sans succès jusqu’à présent, que davantage d’alliés bombardent avec eux les troupes de Mouammar Kadhafi, plus isolé que jamais. Une position partagée par les États-Unis, dont la secrétaire d’État, Hillary Clinton, a dénoncé mercredi les « attaques sauvages et continues » du régime Kadhafi contre des civils et de « nouvelles atrocités », en faisant état d’informations selon lesquelles les forces du « Guide » ont fait usage de leur artillerie lourde contre des zones résidentielles de Misrata (ouest) et ont volontairement coupé l’eau et l’électricité dans la ville. Dans un premier temps, les États-Unis avaient pris le commandement de la coalition, avant d’annoncer le retrait de leurs appareils d’attaque au sol. Mais ils ont révélé mercredi que des avions de combats américains bombardaient toujours de manière occasionnelle les défenses anti-aériennes libyennes.

Aide financière à la rébellion

Parallèlement aux discussions militaires, le soutien aux insurgés s’accroît. Mercredi, lors d’une réunion à Doha, le groupe de contact sur la Libye a décidé la création d’un fonds d’aide à la rébellion. Ce groupe, constitué d’une vingtaine de pays, sous la coprésidence de la Grande-Bretagne et du Qatar, a pour vocation d’assurer le pilotage politique et la coordination de l’ensemble des efforts de la communauté internationale en faveur de la Libye.

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Selon son communiqué, le groupe de contact a décidé « la mise en place d’un mécanisme financier temporaire » pour doter le Conseil national de transition (CNT, organe politique de la rébellion) « des moyens pour gérer les aides et répondre aux besoins urgents » des régions qu’il contrôle. Le groupe a également décidé de fournir « un soutien matériel » à la rébellion dans le strict respect des résolutions 1970 et 1973 de l’ONU, qui instaurent notamment un embargo sur les armes.

Interrogés sur la portée de cette décision, les ministres britannique et italien des Affaires Etrangères, William Hague et Franco Frattini, ont semblé diverger. M. Hague a évoqué la fourniture de moyens de communication, mais M. Frattini a estimé que « la résolution 1973 n’interdit pas de fournir des armes, des armes non offensives, des armes d’autodéfense ».

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Le ministre britannique des Affaires étrangères William Hague, le prince héritier du Qatar, cheikh Tamim ben Hamad Al-Thani et le chef de l’ONU Ban Ki-Moon lors d’une conférence sur la Libye à Doha, le 13 avril 2011.
© AFP

De même, le Premier ministre du Qatar, Hamad ben Jassem ben Jabr Al-Thani a souligné que « le peuple libyen a le droit d’assurer sa défense face aux attaques continues des forces pro-Kadhafi » et que « l’autodéfense nécessite des équipements, qui ne soient pas offensifs mais défensifs ». Son pays a d’ailleurs été accusé par Tripoli de fournir « des missiles français de type Milan aux rebelles à Benghazi ».

Le chef de la diplomatie française, Alain Juppé, a pour sa part précisé qu’il était envisagé d’aider les rebelles « à se financer, à se renforcer » mais qu’il « n’a pas été question de livraisons d’armes ».

Les Brics haussent le ton

Outre ses divisions internes, l’Otan doit désormais prendre en considération une nouvelle position divergente : celle des cinq pays émergents dits « Brics » – Brésil, Russie, Inde, Chine et Afrique du Sud. Réunis jeudi à Sanya, en Chine, ils se sont prononcés contre l’usage de la force en Libye et au Moyen-Orient. Seule l’Afrique du Sud avait voté en faveur de la résolution 1973 de l’ONU ouvrant la voie aux frappes aériennes en Libye, les quatre autres pays – notamment Chine et Russie, membres permanents du Conseil de sécurité de l’ONU – s’étant abstenus et disant craindre des victimes civiles.

« Nous partageons le principe selon lequel l’usage de la force doit être évité », affirment les Brics dans un projet de déclaration conjointe. Le président russe Dmitri Medvedev a été plus loin en déclarant jeudi que la « résolution de l’ONU n’autorisait pas les frappes menées par l’Otan en Libye ». Il a en outre affirmé que les quatre autres pays des Brics partageaient cet avis. (avec AFP)

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