Justice : quatre Kenyans accusent l’Angleterre de tortures à l’époque coloniale
L’action devant la justice anglaise de quatre Kenyans torturés pendant la révolte Mau Mau (1952-1961) ravive le passé colonial de la Grande-Bretagne. Et pourrait entraîner de nouveaux procès pour des faits similaires commis au Nigeria, en Palestine ou en Malaisie.
Quatre Kényans contre la puissante Angleterre. Ndiku Mutua, Jane Muthoni Mara, Wambugu wa Nyingi et Paulo Nzili, tous ont porté plainte contre le gouvernement britannique pour tortures et mauvais traitements. Et tous demandent réparation.
Historique, le procès s’est ouvert jeudi dernier devant la Haute Cour de Justice après huit années de bataille juridique sur la légitimité de la plainte. Le gouvernement estimait qu’on ne pouvait le tenir responsable de faits commis il y a plus de cinquante ans.
Pendant deux semaines, la Grande-Bretagne sera donc confrontée aux exactions qui ont été commises lors de la sanglante répression de la révolte Mau Mau, entre 1952 et 1961. Bilan : plus de 10 000 morts parmi les Kényans, pour 32 Blancs assassinés.
Le grand-père d’Obama parmi les victimes
Les combattants Mau-Mau formaient une société secrète dominée par les Kikuyus qui menaient des actions violentes contre l’administration coloniale. Ironie de l’histoire : parmi les quelque 150 000 personnes emprisonnées, qui étaient loin d’appartenir tous au mouvement Mau Mau, figurait aussi le grand-père de l’actuel président américain, Barack Obama. Un élément qui pourrait peser à l’heure des débats, si la tentation d’éclipser les crimes coloniaux était encore de mise.
À l’ouverture des débats, les plaignants ont raconté jeudi au juge Richard McCombe les tortures qu’ils ont endurées pendant les années passées dans les camps. À l’époque, selon leurs avocats, ces hommes âgés de 70 à 90 ans ont subi « des actes inqualifiables de torture et de mauvais traitements ». Détenus des années sans chef d’inculpation, deux d’entre eux affirment avoir été castrés par leurs gardes, une autre violée et un dernier suspendu par les pieds et battu avec des bâtons. « Je veux la justice pour mourir en paix », a déclaré l’un des plaignants, Wambugu wa Nyingi.
La porte ouverte à de nouveaux procès
Ils réclament des excuses de la Grande-Bretagne ainsi que l’ouverture d’un fonds pour dédommager les victimes de la répression. Car leur jugement pourrait bien faire jurisprudence pour le millier de Kenyans concernés qui sont encore en vie. Voire pour d’autres actions qui pourraient être menées contre l’administration coloniale britannique…
Car dans le cadre du procès, le Foreign Office a rendu publiques quelque 2 000 caisses de documents secrets sur ses anciennes colonies, dont une trentaine sur la rébellion Mau Mau. Certaines boîtes contiendraient des informations explosives sur le rôle du Royaume-Uni lors d’autres crises coloniales : les révoltes arabes en Palestine dans les années 1930, à Chypre en 1955 ou pendant l’insurrection communiste en Malaisie en 1948… Un grand déballage en vue au sujet des pages les plus sombres de l’histoire coloniale britannique. (avec AFP)
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