Côte d’Ivoire : Gbagbo appelle au dialogue, les tirs continuent à Abobo
En perte de vitesse, Laurent Gbagbo appelle au « dialogue interivoirien » dans le cadre de l’UA, tout en rejetant la position de l’institution panafricaine qui reconnaît la pleine et entière légitimité du président élu Alassane Ouattara. Pendant ce temps, les combats continuent à Abobo, où les obus des forces fidèles au président sortant ont fait au moins 25 morts, selon l’ONU.
Mis en difficulté sur le terrain, isolé diplomatiquement, Laurent Gbagbo fait le dos-rond et tend la main à ses rivaux. Dans un compte-rendu du Conseil des ministres de jeudi lu par le porte-parole du gouvernement, Ahoua Don Mello, sur la RTI, le président ivoirien sortant, « prend acte des cadres de discussion proposés par l’Union africaine et attend le Haut représentant mandaté par l’institution pour envisager le schéma de dialogue interivoirien, seul gage de sortie pacifique de la crise, seul moyen pour préserver la sécurité des citoyens ».
On s’en souvient, les 10-11 mars à Addis-Abeba, le Conseil de paix et de sécurité (CPS) de l’UA avait décidé de réunir « d’ici deux semaines » sous les auspices de l`UA et de la Cedeao (Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest) des négociations entre les parties ivoiriennes « pour mettre au point les modalités d`application des propositions » du panel de chefs d’États, qui incluent un gouvernement d’union nationale sous la présidence de Ouattara. Seul problème : Laurent Gbagbo a rejeté en bloc lesdites propositions… Et on voit mal comment sa récente volonté de dialogue ne serait pas perçue, une nouvelle fois, comme une mesure totalement dilatoire par le camp Ouattara.
Peu avant et contre toute vraisemblance, le gouvernement Gbagbo avait nié être responsable des obus qui sont tombés jeudi sur un marché à Abobo, faisant de 25 à 30 morts selon l’ONU. « Pour nous, c’est un vrai complot. On était en Conseil des ministres [qui a étudié la possibilité de décréter l’état d’urgence, NDLR] et c’est à la sortie que nous apprenons que les soldats de l’armée régulière ont tiré sur la foule », a indiqué, Ahoua Don Mello. « C’est clair et net, il y a une synergie entre l’ONU, la France, les rebelles contre la Côte d’Ivoire », a-t-il affirmé, tout en évitant d’accuser les Forces de défense et de sécurité (FDS).
Selon l’ONU, qui a accusé les forces pro-Gbagbo, l’attaque à l’arme lourde à Abobo pourrait être plus grave encore qu’un crime de guerre. « Nous condamnons les attaques avec des obus sur des zones avec des civils […] à Abobo à Abidjan hier [jeudi] », a déclaré Rupert Colville, porte-parole du Haut commissariat, lors d’un point presse. « Il est difficile » de ne pas arriver à la « conclusion qu’il s’agit de crimes […] possiblement d’un crime contre l’humanité », a-t-il dit.
Enquête du gouvernement Gbagbo
Des accusations que Don Mello réfute catégoriquement. « Ce jeudi 17 mars, Abobo n’était pas un théâtre d’opération pour les forces régulières. C’est une zone qui est actuellement partagée entre deux factions rebelles avec des intentions très contradictoires. » Pourtant, de nombreux témoins ont fait état de ratissages des FDS, non seulement à Abobo, mais aussi dans d’autres quartiers de la capitale. Il y a « les rebelles se réclamant de Ouattara et d’autres d’un "commando invisible". Voilà la situation à Abobo… », a ajouté M. Don Mello.
« Nos services sont en train d’enquêter sur ces opérations » mais, selon le porte-parole, « l’Onuci cherche désespérément des prétextes pour arracher un mandat à l’ONU, comme ils l’ont fait pour la Libye, pour avoir les moyens pour intervenir en Côte d’Ivoire ». « Nous dénonçons la partialité et le mutisme de l’ONU alors que cette institution n’a pas réagi quand des rebelles ont massacré 30 villageois à Anokoua Kouté [à Abobo, NDLR], il y a deux semaines », a encore lancé Don Mello. Un bilan équivalant à celui de l’attaque de jeudi…
Quelle que soit la réalité de ces affirmations, Abobo a été de nouveau la cible dans la nuit de jeudi à vendredi de tirs à l’arme lourde, ont rapporté plusieurs habitants. « Hier [jeudi] vers minuit [locale et GMT], on a entendu des tirs d’arme lourde. On s’est mis sous le lit, à même le sol, de peur d’être tués », a raconté une habitante. Les tirs ont été confirmés par plusieurs témoignages. (Avec AFP)
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