Libye : les appels se multiplient en faveur d’une zone d’exclusion aérienne

Le monde arabe et les Occidentaux semblent d’accord pour demander à l’ONU de créer une zone d’exclusion aérienne au-dessus de la Libye. Une mesure qui pourrait néanmoins se heurter au véto de la Russie et de la Chine, ce qui laisserait à Kadhafi les mains libres pour continuer à bombarder les civils libyens.

Mouammar Kadhafi arrive à l’hôtel Rixos de Tripoli, le 8 mars 2011. © AFP

Mouammar Kadhafi arrive à l’hôtel Rixos de Tripoli, le 8 mars 2011. © AFP

ProfilAuteur_PierreFrancoisNaude

Publié le 9 mars 2011 Lecture : 4 minutes.

Quelle que soit l’efficacité réelle de la mesure, la création d’une zone d’exclusion aérienne au-dessus de la Libye, pour tenter d’empêcher les forces de Mouammar Kadhafi de bombarder des civils, fait l’objet d’un consensus de plus en plus large. Les appels en sa faveur se multiplient, comme à l’Organisation de la conférence islamique (OCI).

À l’occasion d’une réunion extraordinaire convoquée mardi par l’organisation, son secrétaire général Ekmeleddin Ihsanoglu s’est déclaré favorable à cette option. « Nous nous joignons à ceux qui demandent l’établissement d’une zone d’exclusion aérienne et demandons au Conseil de sécurité [de l’ONU] de prendre ses responsabilités en ce sens », a déclaré Ekmeleddin Ihsanoglu, tout en réaffirmant son opposition à une intervention militaire directe en Libye.

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Lundi soir, dans une déclaration au terme d’une réunion à Abou Dhabi, les monarchies arabes du Golfe se sont elles aussi déclarées favorables à la mise en place de cette mesure « pour protéger les civils ». Enfin, la Ligue arabe a prévu, elle aussi, une réunion de crise samedi et devrait adopter, sauf surprise, la même ligne.

Forte du soutien de nombreux pays arabes et musulmans, l’idée continue de faire son chemin chez les Occidentaux. Le président américain Barack Obama et le Premier ministre britannique David Cameron ont convenu mardi de poursuivre la planification de « toute la gamme » d’actions possibles, dont l’imposition d’une zone d’exclusion aérienne. Pour la secrétaire d’État Hillary Clinton, toute décision d’imposer une telle zone doit être prise par l’ONU et non par les États-Unis.


Des insurgés libyens courent se mettre à couvert lors d’un raid aérien près de Ras Lanouf, le 8 mars 2011.
© AFP

Vers une résolution du Conseil de sécurité ?

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Paris et Londres préparent justement un projet de résolution au Conseil de sécurité de l’ONU sur ce sujet, qui pourrait être présenté vendredi, mais son adoption semble se heurter pour l’instant aux réticences de Moscou et Pékin. Le vice-président américain Joe Biden doit rencontrer à ce propos le président russe Dmitri Medvedev mercredi à Moscou pour tenter de surmonter des divergences dont le premier à profiter est le clan Kadhafi.

Malgré les sanctions internationales contre lui et ses proches – gel des avoirs, interdiction de voyages -, l’ouverture d’une enquête de la Cour pénale internationale (CPI) pour crimes contre l’humanité et son isolement sur la scène internationale (les États-Unis et l’UE affichent désormais ouvertement leur soutien aux opposants), le leader libyen s’accroche au pouvoir. Ses forces s’efforcent de stopper la progression vers l’ouest des insurgés qui contrôlent la région orientale pétrolière ainsi que certaines localités de l’Ouest.

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L’aviation a encore bombardé mardi la ville pétrolière de Ras Lanouf, base la plus avancée de l’opposition dans l’Est, faisant un blessé et touchant un immeuble. La banlieue ouest du port, à environ 300 km au sud-ouest de Benghazi, a été pilonnée et trois personnes ont été blessées, les rebelles parlant d’un déluge de feu. À l’ouest de Tripoli, l’opposition contrôlait Zenten mais la ville était encerclée, selon un témoin français.


Carte de la situation et des forces en présence en Libye.
© AFP

Réunion de l’Otan

Les forces loyalistes ont lancé parallèlement un assaut sur Zawiyah, le bastion des insurgés le plus proche de la capitale, selon un ancien responsable libyen qui a fait défection, Mourad Hemayma. « Kadhafi veut prendre [Zawiyah] avant mercredi. La communauté internationale doit agir », a-t-il dit, affirmant que les chars avaient pris d’assaut la ville. « Les civils sont attaqués directement », accuse un site de l’opposition, mais le clan Kadhafi dément tout bombardement de Zawiyah.

Face à l’escalade des combats, les Occidentaux se concertent jeudi et vendredi à Bruxelles au sein de l’Otan et de l’UE, pour tenter d’aider l’opposition sans enfreindre le droit international ni déstabiliser la région. Des représentants américains et européens ont rencontré des représentants du Conseil national de transition mis en place par la rébellion à Benghazi, épicentre de l’insurrection (1 000 de km à l’est de Tripoli).

Alors que les violences prennent des allures de guerre civile dans ce pays pétrolier, le marché redoute une crise prolongée qui affecterait les approvisionnements mondiaux et imposerait un recours aux stocks stratégiques de brut, ce qui catapulterait le baril à plus de 200 dollars.

Lors d’un entretien téléphonique avec le Premier ministre grec Georges Papandréou, Kadhafi a mis en garde contre toute ingérence de l’Occident dans son pays. Puis dans la soirée de mardi, il s’est rendu dans un hôtel de Tripoli où sont confinés la grande majorité des journalistes étrangers pour des interviews à des chaînes télévisées. Dans un entretien diffusé par la chaîne d’information française LCI, il a accusé les Occidentaux de « complot colonialiste » contre son pays. (Avec AFP)

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