Égypte : un prêche recommande aux dirigeants arabes de ne pas « arrêter l’Histoire »

Le théologien Youssef al-Qardaoui, mentor des Frères musulmans, a exhorté les dirigeants arabes à ne pas réprimer les mouvements pro-démocratiques et à être plus à l’écoute de leurs peuples. Un prêche qui s’est tenu sur la place Al-Tahrir, noire de monde, une semaine après la chute de Moubarak et alors que le monde arabe est secoué par une vague de révoltes sans précédent.

Manifestants place Tahrir le 18 février 2011 au Caire. © AFP

Manifestants place Tahrir le 18 février 2011 au Caire. © AFP

ProfilAuteur_PierreFrancoisNaude

Publié le 18 février 2011 Lecture : 2 minutes.

Ils étaient de nouveau plusieurs dizaines de milliers place Al-Tahrir, en plein centre du Caire, ce vendredi pour fêter le départ d’Hosni Moubarak, qui a démissionné il y a tout juste une semaine, le 11 février. À cette occasion, le théologien qatari d’origine égyptienne, Cheikh Youssef al-Qardaoui, s’est exprimé sur la vague de révoltes pro-démocratiques qui a enflammé le monde arabe cette semaine, du Bahreïn à la Libye, en passant par le Yémen.

Très écouté dans le monde arabe, le cheikh a appelé les leaders arabes à être en phase avec leur peuple. « Je m’adresse aux dirigeants arabes : n’arrêtez pas l’Histoire. Le monde a changé, le monde avance et le monde arabe a changé de l’intérieur », a-t-il lancé devant une place noire de monde. « Mon message aux dirigeants arabes est qu’ils ne se lancent pas dans des discours creux, mais qu’ils engagent avec les peuples un dialogue constructif », a dit le théologien, très influent notamment chez les Frères musulmans, mais qui s’affirme indépendant.

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Atmosphère de liesse

Avant la prière, les manifestants s’étaient rassemblés dans une atmosphère de liesse, agitant des drapeaux égyptiens, avec même un orchestre militaire en grand uniforme jouant des airs patriotiques devant la foule ravie. « C’est une fête, nous sommes très heureux, Moubarak est parti. Je pense que nous allons revenir toutes les semaines, tous les vendredis », déclare l’un des manifestants.

Car la mobilisation vise aussi à maintenir une certaine pression sur le Comité suprême des forces armées qui a pris le pouvoir. La « coalition des jeunes de la révolution », un groupe de militants pro-démocratie qui a participé au déclenchement de la révolte le 25 janvier, a demandé que la manifestation de vendredi soit l’occasion « de se souvenir des martyrs de la liberté, de la dignité et de la justice ». Dans un message sur Facebook, elle réclame aussi « la libération immédiate de tous les détenus » arrêtés lors des manifestations anti-Moubarak, et le remplacement de l’actuel gouvernement, formé pendant les derniers jours de Moubarak au pouvoir et chargé par l’armée d’expédier les affaires courantes.

Doutes sur l’armée

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Selon Gamal Eid, un avocat du Réseau arabe pour l’information sur les droits de l’homme, « des centaines de personnes sont détenues ». Certaines par l’armée, « mais leur nombre exact n’est pas connu ». « Si les personnes arrêtées ne sont pas libérées, sans parler des prisonniers politiques plus anciens, cela montrerait que l’armée n’est pas sincère dans ses promesses de réformes politiques », a déclaré à l’AFP Mohamed Waked, un des organisateurs de la manifestation. Les organisations Amnesty International et Human Rights Watch confirment ces doutes en faisant état de témoignages de manifestants torturés par des militaires. Mais pour l’heure, l’armée reste populaire en Égypte – surtout parce qu’elle n’a pas tiré sur les manifestants.

Elle a aussi répondu aux principales revendications des Égyptiens. Jeudi, trois anciens ministres dont celui de l’Intérieur Habib el-Adli (honni par une grande partie de la population), et Ahmad Ezz, un influent homme d’affaires proche du fils de l’ancien président, Gamal Moubarak, ont été arrêtés pour malversations financières et placés en détention provisoire. L’armée a également confirmé une hausse de 15 % des salaires des fonctionnaires et des retraites, alors que le pays connaît une vague de grèves et de mouvements sociaux. (Avec AFP)

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