Louis Gaston Mayila : « Le Gabon est mal gouverné, Ali Bongo doit ouvrir le débat »
Ex-président du Conseil économique et social gabonais, Louis Gaston Mayila est également l’ancien vice-président du Parti démocratique gabonais (PDG). Aujourd’hui, cet avocat de 64 ans est l’un des fondateurs d’une des deux plus puissantes coalitions de partis d’opposition au Gabon, l’Alliance pour le changement et la restauration (ACR), qui a soutenu la candidature de Pierre Mamboundou à la présidentielle d’août 2009. Il négocie actuellement un accord de gouvernement avec le pouvoir. Interview.
Jeuneafrique.com : Que pensez-vous de la prestation de serment d’André Mba Obame comme président élu du Gabon ?
Pour moi la question du coup d’État électoral est réglée. Le président Ali Bongo Ondimba est certes mal élu, mais il est en place. Il faut s’en accommoder. Néanmoins, la bonne question est de savoir pourquoi cet homme politique en est venu à commettre un acte aussi grave ? À l’ACR, nous avons dit que la résolution de ce problème ne devait pas privilégier la voie répressive. Pourquoi radier de la fonction publique les ministres du gouvernement de Mba Obame ? C’est une mauvaise interprétation de la loi, qui garantit le respect des libertés publiques. Le pays est mal gouverné. Il faut que le président ouvre le débat…
Mais sur quoi voulez-vous débattre exactement ?
La transparence des élections [législatives prévues fin 2011, qui seront manifestement anticipées, NDLR] passe par l’introduction de la biométrie dans l’élaboration des listes électorales. On fabrique déjà des cartes d’identité nationales grâce à cette technologie. Pourquoi hésiter quand il s’agit de l’appliquer aux cartes électorales ? En plus, un pays ami se propose de financer l’opération… Le rôle de la Cour constitutionnelle, qui est comparable à une sorte de deuxième tour où le parti au pouvoir gagne toujours, doit également être discuté.
Un conseiller du président, Michel Essonghe, a pourtant exclu le retour de l’arbre à palabre…
Je regrette mais le Gabon a toujours marché ainsi. Omar Bongo Ondimba discutait, reconnaissait qu’il s’était trompé, tenait compte des avis contraires. Je suis de ceux qui ont claqué la porte quand il y avait des désaccords et sont revenus quand ils étaient aplanis. Discuter, ce n’est pas toujours marchander. On ne peut tout de même pas passer notre temps à applaudir ! J’ai l’impression que les Gabonais qui ont une certaine expérience gênent…
Mais votre coalition, l’ACR, discute déjà avec Ali Bongo pour entrer au gouvernement. Ne lui en avez-vous pas parlé ?
Nous avons mandaté le président de l’ACR, Pierre Mamboundou, pour négocier avec le pouvoir. Les deux parties ne sont pas tombées d’accord sur une plate-forme gouvernementale. Nos émissaires sont toujours en contact et les négociations se poursuivent. La vérité est que beaucoup de divergences subsistent entre nous. Il faut arrêter avec les effets d’annonce. L’interdiction brutale d’exporter le bois en grumes a fait des dégâts. Personnellement, dans la scierie que j’exploite depuis trente ans, il a fallu mettre plus 300 personnes au chômage. Ce n’est pas acceptable. La journée continue va nous faire perdre des points de croissance. Nous voulons le retour d’un scrutin à deux tours.
Que se passerait-il si l’ACR n’entrait pas au gouvernement ?
Dans ce cas, mon vœu est que l’opposition aille aux prochaines législatives en rangs serrés contre le PDG. Dans la situation actuelle, le parti au pouvoir est minoritaire et ne peux en aucun cas l’emporter.
Personnellement, êtes-vous prêt à accepter un poste de ministre ?
Non. Par le passé, j’acceptais un portefeuille après avoir arrêté une feuille de route avec le président. Dans tous les ministères où je suis passé, j’avais un plan et j’ai laissé une empreinte. Dans les conditions actuelles, est-ce qu’on me laissera travailler pour le pays comme je le souhaite ?
Propos recueillis par Georges Dougueli
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