À Paris, le Maghreb des livres célèbre la révolution tunisienne
La Tunisie est l’invitée d’honneur de l’édition 2011 du Maghreb des livres, qui se tient les 5 et 6 février à la Mairie de Paris. Un bel hasard du calendrier : cette célébration des lettres tunisiennes intervient au lendemain de la révolution qui chassé Ben Ali du pouvoir. Entretien avec Georges Morin, président de « Coup de soleil », l’association organisatrice de l’événement.
La 17e édition du Maghreb des livres se tiendra à l’Hôtel de ville de Paris les 5 et 6 février, avec la présence de 136 auteurs conviés cette année. La manifestation est organisée par l’association « Coup de soleil », fondée il y a 25 ans par l’ancien instituteur de Constantine Georges Morin. Conçue au départ comme une séance de dédicace des livres par leurs auteurs, le rassemblement s’est transformé au cours des années en un festival des lettres maghrébines, ponctué de rencontres, de débats, de lectures et de projections de films.
Chaque année, à tour de rôle, un État du Maghreb est mis à l’honneur, avec un coup de projecteur sur la littérature du pays hôte, mais aussi sur son infrastructure éditoriale, le mécénat cultuel, l’histoire des idées…
Confidences de Georges Morin sur cette édition 2011, les origines et l’histoire du Maghreb des livres.
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"Spécial Tunisie"
« Je vous assure d’emblée, je n’y suis pour rien dans le déclenchement de la révolution tunisienne ! "Qu’est-ce que c’est cette histoire, me disent mes amis, tu nous prépares un Maghreb des livres pour février, et comme par hasard il y a une révolution en janvier !" J’ai dû jurer mes grands dieux que …
Plaisanterie à part, le « Spécial Tunisie » est un accident de calendrier. Il s’inscrit dans la formule de la rotation triennale qui régit cette manifestation depuis nos débuts. L’année dernière, c’était le Maroc. L’année prochaine, ce sera l’Algérie. Il était difficile de bousculer la programmation, arrêtée depuis longtemps. Mais comment ne pas parler de l’actualité ? Plusieurs coups de projecteurs sur la production littéraire et intellectuelle tunisienne étaient déjà prévus. Nous n’avons rien changé, seulement ajouté une rencontre à une heure de grande affluence [le samedi soir] pour que les intellectuels tunisiens réunis puissent porter témoignage. »
"La parole retrouvée"
« Il s’agit d’amis, d’auteurs et d’universitaires qui résident en Tunisie. Ils porteront témoignage de ce qu’ils ont vécu pendant ces semaines révolutionnaires et historiques. La rencontre avec ces intellectuels tunisiens a été placée sous le signe de la parole retrouvée car la conquête de la liberté d’expression a été le principal acquis de cette révolution que l’on dit "de jasmin".
Parmi les intervenants de cette soirée, il y aura Mahmoud Ben Romdhane, ancien président mondial d’Amnesty International qui a lui-même subi beaucoup d’indignités sous l’ancien régime. Selon Romdhane, si les intellectuels ont préparé le terrain en amont, ils n’ont pas eu le courage d’aller jusqu’au bout de leur logique. Ce courage, la jeunesse tunisienne l’a eu. C’est elle qui a fait la révolution. Les intellectuels ont pris le train en marche. J’ai invité quelques représentants de la jeunesse tunisienne qui viendront raconter comment ils ont préparé le soulèvement à travers les réseaux sociaux. Cela fait un an qu’ils y travaillent sans imaginer toutefois que leurs actions déboucheraient sur la fuite de Ben Ali ! »
"Mécénat culturel"
Pendant longtemps, le Maghreb des livres a été une grande librairie où les écrivains venaient pour dédicacer leurs livres. Depuis deux ans, nous tâchons de faire durer le plaisir, en organisant des causeries avec les écrivains présents, des tables-rondes, des débats, des hommages à des grands disparus [hommages à l’Algérien Mohammed Arkoun et au Marocain Mohamed Leftah, pour cette 17e édition, NDLR].
Nous avons prévu plusieurs rencontres thématiques autour des sujets comme la famille, l’islam de France, la force de l’histoire. Et enfin un sujet qui me tient particulièrement à cœur, c’est celui du mécénat culturel au Maghreb. J’ai invité trois entrepreneurs privés des trois pays du Maghreb pour venir parler de leurs actions en faveur de la diffusion des livres et de la lecture. Ces hommes ont la passion du livre et n’hésitent pas à payer de leur poche pour que les plus modestes de leurs concitoyens puissent accéder au plaisir de la lecture.
"Première édition en 1995"
« J’ai créé l’association "Coup de soleil" en 1985 avec un groupe de copains maghrébins. Nous étions effarés par la montée spectaculaire des idées du Front national (FN) dans l’opinion populaire française. Pour lutter contre le racisme, nous avons lancé en 1995 le Maghreb des livres. Livre comme antidote contre le poison de la haine !
La première édition a eu lieu dans les locaux du Centre national du livre (CNL). Il y avait 100 livres et 15 écrivains. On avait la salle pour trois heures seulement. C’était un peu vide, un peu formel. Et puis, tout s’est illuminé quand sont arrivés bras dessus bras dessous Rachid Mimouni et Mohamed Choukri, le grand écrivain marocain. On ne pouvait espérer de meilleurs parrains. Ils nous ont porté chance ! »
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