Human Rights Watch demande des comptes sur les morts de la révolution tunisienne

L’ONG américaine Human Rights Watch demande au gouvernement de transition tunisien d’ouvrir des enquêtes judiciaires afin que les crimes commis par la police pendant la période de trouble qui a précédé et suivi la chute du régime de Ben Ali ne restent pas impunis.

Au moins 78 personnes ont trouvé la mort au cours de la révolution tunisienne. © AFP

Au moins 78 personnes ont trouvé la mort au cours de la révolution tunisienne. © AFP

Julien_Clemencot

Publié le 29 janvier 2011 Lecture : 2 minutes.

Le 17 janvier, le ministre de l’intérieur du gouvernement de transition tunisien, Ahmed Friaa, a donné un bilan humain des soulèvements populaires qui ont abouti le 14 janvier à la fuite du président Ben Ali. Le décompte des victimes fait état de 78 tués et 94 blessés. Selon Human Right Watch (HRW), il apparaît évident que la plupart des décès sont consécutifs à des tirs de la police.

Laissées pour compte par l’ancien régime, les régions intérieures de la Tunisie ont été à l’origine de la révolution populaire. Elles en ont payé le prix fort, notamment durant les soulèvements de Tala et Kasserine, entre les 8 et 12 janvier. Au moins 21 personnes y auraient été tuées par balles selon une enquête menée par HRW, dont les conclusions ont été rendues publiques le 29 janvier lors d’une conférence de presse.

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Pour l’ONG de défense des droits de l’homme, même s’il n’est pas possible de reconstituer de manière certaine le film des événements, il apparaît évident que les forces de l’ordre sont responsables et ont intentionnellement cherché à tuer, alors que légalement rien ne le justifiait. Que ce soit pour la sécurité des policiers ou pour toute autre raison.

Réconcilier police et population

Afin de donner des gages de démocratie au peuple tunisien, HRW appelle le gouvernement provisoire à faire toute la lumière sur les meurtres commis par la police, notamment à Kasserine et Tala. « les autorités doivent montrer qu’après des décennies d’impunité, les auteurs de crimes sont désormais tenus de répondre de leurs actes devant la justice », a plaidé Eric Goldstein, directeur adjoint de l’équipe Afrique Moyen-Orient de HRW. Puis d’ajouter à propos de Kasserine et Tala : « Les populations des régions intérieures qui se sentent aujourd’hui marginalisées ne doivent pas rester des citoyens de seconde zone » . Selon le défenseur des droits de l’homme, identifier les coupables aidera aussi à réconcilier les Tunisiens avec leur police qui aujourd’hui est haïe par une partie de la population.

À ce jour, les éléments rassemblés par HRW ne permettent pas de déterminer avec précision les auteurs des crimes. « Les témoins décrivent des unités anti-émeutes portant des uniformes noirs avec des boucliers et des casques , comme les brigades de l’ordre public », indique HRW. Mais il n’est pas certain que d’autres corps spéciaux n’aient pas participé. 

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Au-delà du processus judiciaire, l’ONG a insisté sur une nécessaire évolution des lois. Notamment concernant le droit à manifester et les conditions dans lesquelles les forces de l’ordre peuvent faire usage de la force pour maintenir l’ordre. « Les policiers doivent être mieux entraînés et équipés. Ils doivent évoluer dans leur approche de la sécurité publique », a expliqué Eric Goldstein.

L’ONG a indiqué que des rencontres avaient eu lieu sur ces différents points avec les autorités tunisiennes, dont le président de la commission, Yadh Ben Achour, en charge de la révision de la constitution. HRW précise également que son travail d’enquête ne se limite pas à la période qui précède la chute de l’ex-président Ben Ali, mais concerne aussi les violences qui l’ont suivie. D’autres enquêtes devraient donc être prochainement rendues publiques.

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