La révolution déstabilise l’économie tunisienne
Plus que tout, l’économie d’un pays a besoin de stabilité pour maintenir sa croissance. Or, la révolution qui vient de se dérouler en Tunisie a détraqué la vie économique au quotidien et altéré la confiance des investisseurs. Mais les milieux d’affaires restent confiants et tablent sur un rebond rapide.
Il y a eu quelques jours de flottement. Depuis vendredi 14 janvier, jour où le président tunisien Zine el-Abidine Ben Ali a quitté pouvoir et pays sous la pression du peuple, les commerces ont fermé, les boutiques ont été désertées, les banques ont baissé leur rideau de fer. Dans la confusion générale, qui régnait déjà depuis près d’un mois dans la rue, les pillages se sont multipliés et les stocks se sont vidés.
Mais depuis mercredi 19 décembre, la menace des pénuries semble s’éloigner, même si la vie économique continue de tourner au ralenti. « Il faut que la population se remette au travail, car il y a du travail : il faut notamment réparer ce qui a été endommagé » lors des pillages, estime Tayeb Souissi, patron d’une grande surface spécialisée dans le bricolage en périphérie de Tunis.
Une chef d’entreprise basée à Tunis dans le secteur de l’import-export de produits agricoles, qui préfère rester anonyme, explique néanmoins que le travail continue d’être entravé par la situation. « On a repris avec prudence nos activités. Nos chauffeurs effectuent des déplacements de longue durée et en raison de l’état d’urgence [qui comprend un couvre-feu de 20h00 à 5h00, NDLR], ils sont encore restreints. Nous avons enregistré des pertes considérables », confie-t-elle.
Perte de confiance
Il faudra du temps avant un réel retour à la normale. Le ministre de l’Intérieur Ahmed Friaa a annoncé que les récentes violences avaient coûté au pays 1,6 milliard d’euros de pertes (environ 4 % du PIB). D’après le quotidien Le Temps, « 43 agences bancaires ont été détruites, 66 espaces commerciaux saccagés, 11 établissements industriels rasés ». Et, signe de la perte de confiance de l’économie globale, l’agence de notation financière Moody’s a abaissé d’un cran la note de la Tunisie au lendemain de la fuite à l’étranger de l’ex-président Ben Ali.
Priorité numéro un, donc, rétablir le lien avec les partenaires. Et avec la France notamment, dont les milieux d’affaires entretenaient des rapports stables avec la galaxie Ben Ali. Quelque 1 250 filiales d’entreprises françaises sont physiquement présentes dans ce pays, employant plus de 110 000 personnes. Une présence qui s’illustre en particulier dans les domaines de l’industrie, de la manufacture et de la confection, ainsi que dans les services et l’aéronautique.
« Tout le monde vivait sur l’idée que le régime était fort et bien installé, sa chute brutale a été une immense surprise », souligne un expert français. Cette période de flottement pourrait « poser un problème pour certains » partenaires français, a souligné la patronne des patrons français, Laurence Parisot. La présidente du Medef (Mouvement des entreprises de France) a aussi salué la révolte populaire et en encouragé la démocratisation du pays.
Relancer le tourisme
Le tourisme, fer de lance de l’économie tunisienne, est aujourd’hui au point mort. Le secteur emploie plus de 350 000 personnes sur dix millions d’habitants. La majorité des étrangers qui séjournaient dans les stations balnéaires sont rentrés au moment des premières émeutes, en décembre.
Mais les responsables restent optimistes, croyant en leur retour rapide. La révolution tunisienne, même si elle a généré « une baisse nette » des arrivées de touristes, sera « bénéfique » à long terme pour le tourisme du pays, a estimé l’ambassadeur de Tunisie en Espagne, Mohamed Ridha Kechrid.
« L’ordre est rétabli et à partir de maintenant, les touristes peuvent revenir », a-t-il ajouté. Pour lui, une fois que des élections démocratiques auront été organisées, « la Tunisie sera encore plus belle, plus crédible, et cette opération de changement sera bénéfique pour le tourisme tunisien et pour l’économie ». (avec AFP)
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