Tunisie : le RCD dans la ligne de mire
Alors qu’un gouvernement d’union nationale comporte quelques membres du RCD, le parti du président déchu Ben Ali, la pression populaire contre les anciens caciques du pouvoir ne diminue pas. D’autant que la famille Ben Ali se serait enfuie avec 1,5 tonne d’or.
La pression s’accentue sur le Rassemblement constitutionnel démocratique (RCD), ou du moins ce qu’il en reste… Des manifestations ont éclaté un peu partout à Tunis et dans le centre-ouest. Comme dans les villes de Regueb et de Sidi Bouzid, foyer de la révolte qui a emporté le régime de l’ex-président Zine el-Abidine Ben Ali.
Après avoir perdu leur leader, qui s’est exilé en Arabie saoudite, les membres du RCD sont désormais la cible des mobilisations qui exigent leur exclusion des moindres recoins du pouvoir.
« On peut vivre avec seulement du pain et de l’eau, mais on ne peut plus vivre avec le RCD », scandaient les manifestants à Regueb. Même son de cloche à Tunis. « La révolution continue ! RCD dehors! », ont crié dans la capitale plusieurs centaines de manifestants réunis en deux groupes sur l’avenue Habib Bourguiba, l’un devant le théâtre municipal de Tunis, l’autre devant l’ambassade de France. « On ne veut personne du RCD dans le gouvernement, y compris le Premier ministre [Mohammed Ghannouchi, NDLR] », a déclaré un manifestant.
"Mourir pour les martyrs"
Les protestations se sont faites radicales. « Avec notre sang et notre âme, nous sommes prêts à mourir pour les martyrs », criaient encore les manifestants, en référence aux dizaines de Tunisiens tués dans la répression de la révolte par le régime de Ben Ali.
Finalement, des policiers anti-émeutes ont dispersé peu à peu les manifestants à l’aide de canons à eau et de tirs de grenades lacrymogène, mais en faisant preuve de retenue. Les policiers ont restreint cette fois l’usage de la force, tentant d’établir une discussion avec les protestataires.
« Le couvre-feu est en vigueur et les manifestations sont interdites. On nous a signalé la présence de provocateurs et d’extrémistes. On essaye d’intervenir sans violences. On est en train de dialoguer, d’essayer de les convaincre de se disperser », expliquait un officier de police sur les lieux.
Mais sur les fronts judiciaire et associatif, la résistance s’organise aussi. Deux organisations non gouvernementales (ONG), Transparency International et Sherpa, ont déclaré leur intention de porter plainte à Paris contre X pour « corruption », en visant implicitement le président tunisien déchu Zine el-Abidine Ben Ali, a annoncé lundi leur avocat, Me William Bourdon.
« Nous allons déposer plainte à Paris sous deux jours pour corruption, blanchiment et recel d’abus de biens sociaux », a précisé Me Bourdon. Et il se pourrait que, sous la pression des nombreux ressortissants tunisiens vivant en France, Paris se montre plus coopératif dans cette procédure que dans d’autres de même nature, visant des chefs d’État subsahariens.
1,5 tonne d’or
Le porte-parole du gouvernement François Baroin a ainsi affirmé lundi que la France se tenait « à la disposition des autorités constitutionnelles tunisiennes » pour examiner le sort des biens immobiliers en France de ben Ali et de son entourage. Le gouvernement a également saisi la cellule antiblanchiment du ministère de l’Économie, Tracfin, pour empêcher la fuite des avoirs financiers détenus en France par l’ex-président tunisien et ses proches.
« Ces menaces sont insuffisantes car elles ne peuvent empêcher l’évaporation des avoirs financiers du clan Ben Ali », a cependant estimé Me Bourdon. L’avocat a par ailleurs fait valoir que « la question de la restitution des avoirs de l’ancien dirigeant était centrale » dans le mouvement qui a abouti au départ du dictateur tunisien.
La seconde épouse de Ben Ali, Leïla Trabelsi, et la famille de cette dernière, cristallisent toutes les haines pour s’être accaparées les richesses du pays en utilisant l’appareil d’État. Le quotidien français Le Monde, qui cite des sources à la présidence française, a d’ailleurs confirmé lundi la rumeur selon laquelle le clan Ben Ali a fui la Tunisie avec 1,5 tonne d’or. Une information démentie par la Banque centrale de Tunisie. (Avec AFP)
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