Immolation par le feu : une méthode de révolte qui se répand au Maghreb
En Tunisie, tout est parti d’un suicide par immolation, avant que la colère populaire ne renverse en quelques semaines le régime de Ben Ali. Ce geste tragique ne cesse depuis de se répéter dans d’autres pays d’Afrique du Nord, où plusieurs personnes ont tenté de se donner la mort par le feu afin de protester contre leurs conditions de vie ou contre la politique menée dans leur pays.
Comme si la révolution en Tunisie avait renforcé la détresse des populations voisines. Actuellement le Maghreb est en proie à des manifestations publiques de désespoir : comme Mohammed Bouazizi à Sidi Bouzid (Tunisie), plusieurs personnes ont tenté de se suicider en s’immolant par le feu. En Algérie d’abord, où Mohcin Bouterfi, 37 ans, père de famille sans emploi et sans logement, s’est mis le feu samedi devant une mairie de la région de Tebessa – près de la frontière avec la Tunisie. Il a d’abord été donné pour mort, suite à ses blessures, dimanche 16 janvier, avant qu’une source hospitalière ne démente cette information lundi. L’homme serait toujours en soins intensifs dans un état critique. Par ce geste désespéré, il entendait « dénoncer l’attitude de mépris affichée à son égard par les élus de cette commune », selon des habitants de la région.
Après la Tunisie, l’Algérie
En Algérie encore, trois autres tentatives similaires ont eu lieu ces derniers jours. Un homme qui venait de s’enflammer a pu être sauvé mercredi dernier par un employé de la sous-préfecture de Bordj Menaïel, où il venait d’apprendre qu’on lui refusait un logement social. Vendredi soir, un jeune homme de 27 ans a été hospitalisé avec des brûlures au second degré, selon le quotidien algérien El Watan. Les raisons de son geste ne sont pas encore connues. Et dimanche, c’est un autre Algérien, sans emploi, qui a été sauvé par des policiers alors qu’il avait aspergé son corps d’essence devant le siège de la sûreté de wilaya (département) de Mostaganem.
Égypte et Mauritanie aussi
La contagion a fini par atteindre l’Égypte. Lundi 17 janvier, au Caire devant l’Assemblée du peuple, Abdo Abdelmoneim s’est à son tour immolé par le feu. Mais « un policier qui se trouvait à proximité est arrivé à éteindre les flammes et l’homme a rapidement été emmené dans une ambulance » pour être conduit dans un hôpital, selon un témoin. Il aurait voulu protester contre le fait « qu’il n’avait pas reçu de coupons pour acheter du pain pour son restaurant », selon l’agence officielle Mena.
En Mauritanie aussi, la contestation passe désormais par des gestes désespérés. Yacoub Ould Dahoud, 43 ans, un homme d’affaires aisé selon ses proches, a arrêté lundi dans la matinée sa voiture devant le Sénat à Nouakchott, non loin de la présidence. Il s’est aspergé d’un liquide inflammable à l’intérieur de son véhicule, avant d’y mettre le feu, selon des témoins de la scène. Des journalistes prévenus quelques minutes auparavant, ont raconté qu’il entendait témoigner de son mécontentement au sujet de « la situation politique du pays » et dire sa « colère contre le régime en place ».
En attendant le Soudan ?
Face à la montée des tensions, c’est toute la région qui commence à paniquer. Le chef de l’opposition islamiste soudanaise, Hassan al-Tourabi, a même qualifié de « probable » un soulèvement au Soudan similaire à celui mené par les Tunisiens depuis le mois de décembre. Le pays est en pleine scission, le Sud-Soudan ayant voté un référendum dont les résultats devraient probablement conduire à son indépendance. Par ailleurs, le Soudan est en proie à une inflation galopante du prix des denrées alimentaires de première nécessité.
« Ce pays a connu d’autres soulèvements populaires dans le passé, ce qui est s’est passé en Tunisie est un rappel. Il est probable que cela se produise au Soudan au Soudan, si cela ne se produit pas il y aura un bain de sang, car le pays entier est armé », a-t-il déclaré lundi. (avec AFP)
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