Le couvre-feu décrété à Tunis, le ministre de l’Intérieur limogé

Le gouvernement tunisien a pris les premières mesures pour mettre fin aux émeutes dans le pays. Le Premier ministre Mohamed Ghannouchi a ainsi annoncé l’éviction du ministre de l’Intérieur et la libération des manifestants détenus. Mais cela n’a pas empêché les affrontements de toucher la capitale mercredi. Le couvre-feu y a été décrété, et les syndicats ont appelé à la grève générale pour vendredi à Tunis.

Des forces de l’ordre tunisiennes près de Sidi Bouzid, le 10 janvier 2011. © AFP

Des forces de l’ordre tunisiennes près de Sidi Bouzid, le 10 janvier 2011. © AFP

ProfilAuteur_PierreBoisselet

Publié le 12 janvier 2011 Lecture : 3 minutes.

Tunis a bien tenté de faire tomber la pression mercredi, mais rien ne semble y faire. Dans la matinée, le Premier ministre, Mohamed Ghannouchi avait annoncé la libération de toutes les personnes arrêtées pendant les émeutes au cours d’une conférence de presse.

Le chef du gouvernement avait simultanément révélé le limogeage du ministre de l’Intérieur, Rafik Belhaj Kacem. Un « comité d’investigation sur la question de la corruption », dénoncée par l’opposition et des ONG, va également être créé, a annoncé Ghannouchi.

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Le ministre tunisien de l'Intérieur limogé, Rafik Belhaj Kacem.
Le ministre tunisien de l’Intérieur limogé, Rafik Belhaj Kacem.
© Reuters

Prétexte du vandalisme

Mais les violences meurtrières se poursuivent et semblent se répandre dans toute la Tunisie. D’après le gouvernement, selon un bilan établi mardi soir, celles-ci auraient fait 21 morts (en hausse de deux tués depuis le dernier bilan). Certains syndicats et l’opposition parlent de 50 victimes, rien qu’à Kasserine.

De fait, la situation ne s’améliore pas. Le couvre-feu a ensuite été instauré à Tunis de 20 heures locales à 5 h 30. La mesure était dans l’air : depuis lundi, il était vivement, conseillé aux commerçants de fermer boutique sous prétexte de risque de  vandalisme.

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Vers 12 heures, au centre de Tunis, le quartier de l’avenue Bourguiba et toutes les rues collatérales ont été le siège d’affrontements entre les forces de l’ordre et des civils. Les policiers et les Brigades de l’ordre public (BOP) ont chargé la foule sans provocation de sa part. 

À Sfax, les manifestations prévues ce matin, ont été très suivies tandis qu’à Douz (sud de la Tunisie), un professeur d’université, Hatem Bettaher, est mort en essuyant des tirs des forces armées. Un témoin cité par l’AFP faisait état de deux morts dans cette dernière ville. 

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Journées cruciales

Les journées de jeudi et vendredi seront cruciales, à Tunis, au programme grève générale et manifestations organisées par les syndicats.

Mardi soir déjà, des affrontements ont touché la banlieue de Tunis – notamment la cité Ettadhamen [solidarité, en arabe], située à 15 km du centre.

L’armée avait pourtant été déployée dans la capitale mercredi matin. Des renforts militaires, soldats en armes, camions, jeeps et blindés, ont fait leur apparition. Un blindé était également visible devant la cité Ettadhamen.

Le chef du Parti communiste des ouvriers de Tunisie (PCOT, interdit en Tunisie), Hamma Hammami, a été interpellé mercredi à son domicile, près de Tunis, d’après son épouse Radia Nasraoui.

Réactions internationales

La porte-parole de la chef de la diplomatie européenne Catherine Ashton a condamné mercredi l’usage « disproportionné » de la force par la police en Tunisie. « Cette violence est inacceptable, les auteurs doivent être identifiés et traduits en justice », a déclaré Maja Kocijancik. « Nous sommes inquiets du recours à la force disproportionné de la police envers les manifestants pacifiques », a-t-elle ajouté, précisant que l’UE demandait une enquête à ce sujet.

Quant aux États-Unis, ils se sont dit hier « profondément préoccupés par les informations faisant état d’un usage excessif de la force de la part du gouvernement tunisien », selon les paroles de Mark Toner, un porte-parole du département d’État.

Un général limogé ?

Selon des sources de l’opposition, des dissensions auraient vu le jour au sein de l’armée tunisienne. D’après elles, le chef d’état-major de l’armée de terre, le général Rachid Ammar aurait été limogé pour avoir refusé de donner l’ordre aux soldats de réprimer les émeutes et exprimé des réserves sur un usage excessif de la force.

Il aurait été remplacé par le chef des renseignements militaires Ahmed Chbir. Ces informations n’ont pas été confirmées par Tunis. (avec AFP)

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