Paris recommande aux familles françaises de partir, la Cedeao se prépare à intervenir

 Les autorités françaises recommandent aux familles de leurs ressortissants de quitter la Côte d’ivoire. Á l’heure où chacun redoute une escalade de la violence dans le pays, aucun scénario n’est pourtant écrit d’avance. Même l’intervention militaire de la Cedeao, dont les plans sont désormais officialisés, paraît extrêmement compliquée.

Des Ivoiriens sur le point de quitter Abidjan le 30 décembre 2010. © AFP

Des Ivoiriens sur le point de quitter Abidjan le 30 décembre 2010. © AFP

ProfilAuteur_PierreFrancoisNaude

Publié le 31 décembre 2010 Lecture : 3 minutes.

Une explosion de violences d’une ampleur catastrophique en Côte d’Ivoire est-elle inévitable ? À moins qu’une intervention militaire de la Cedeao ne soit sur le point d’arriver – personne n’osant véritablement croire à la réussite de la médiation des trois chefs d’État envoyés par l’organisation ouest-africaine à Abidjan mardi dernier, et qui doivent y retourner lundi prochain… Autre perspective calamiteuse : va-t-il y avoir un soulèvement d’une partie des Forces armées nationales de Côte d’Ivoire (Fanci), encore loyales à Laurent Gbagbo ? Ou encore ces trois hypothèses peuvent-elles se produire en même temps ? 
En prévision de toutes ces éventualités, dont aucune n’est vraiment rassurante pour la stabilité de la Côte d’Ivoire, la France a finalement recommandé vendredi à toutes les familles de ses ressortissants qui résident avec des enfants dans le pays de partir. Le communiqué du ministère des Affaires étrangères indique également que la rentrée scolaire dans les écoles françaises est reportée. Une annonce qui intervient alors que le bruit des armes qu’on aiguise se fait chaque jour plus aigu.
Dérapages inévitables
D’un côté, le camp du président illégitime Laurent Gbagbo recrute de plus en plus de jeunes miliciens dans l’Ouest et à Abidjan en prévision d’une épreuve de force avec la communauté internationale. Le leader des jeunes « patriotes », Charles Blé Goudé, a d’ailleurs appelé à « libérer à mains nues » à partir du 1er janvier prochain l’hôtel du Golf où s’est retranché le président élu Alassane Dramane Ouattara. Une menace qui fait craindre le pire : des dérapages seraient bien-sûr inévitables, quelque 800 Casques bleus ayant pour mandat de protéger le président élu et les fonctionnaires de l’Onuci.
Mais du côté de la Cedeao, qui a menacé le camp Gbagbo d’utiliser la « force légitime » contre lui, on se prépare aussi à l’action : Laurent Gbagbo n’a visiblement aucunement l’intention de laisser le pouvoir, et toute négociation avec lui paraît vouée à l’échec. Les responsables militaires d’Afrique de l’Ouest ont donc préparé des plans d’intervention, et annoncent désormais que ceux-ci sont officialisés. Ils pourraient mobiliser au moins 2 000 à 3 000 hommes.
« Ça va entraîner beaucoup d’affrontements entre partisans de Gbagbo et Ouattara », s’alarme Kwesi Aning, chef du département pour la prévention et la résolution des conflits, au Centre international de maintien de la paix « Kofi Annan », basé au Ghana. Gbagbo dispose d’« un fort soutien, il ne va pas se rendre facilement », assure-t-il.
Force multilatérale ?
Surtout, l’intervention aurait peu de chance de réussir rapidement, ce qui pourrait contribuer au renforcement du président sortant. Le général à la retraite Ishola Williams, secrétaire exécutif du Groupe panafricain de stratégie et de recherche politique affirme même qu’une « intervention militaire en Côte d’Ivoire ne va pas réussir ». Selon lui, Gbagbo est un politicien « très intelligent », qui a le soutien de la hiérarchie militaire et des jeunes de la rue mobilisés par Charles Blé Goudé.
En outre, aucun pays n’a à ce jour officiellement annoncé sa participation à cette force régionale. Le Ghana, voisin de la Côte d’Ivoire, a même annoncé jeudi qu’il n’enverrait pas de troupes, faute d’effectifs suffisants de son armée nationale. Le Nigeria, poids lourd de la région et pays le plus peuplé du continent avec plus de 150 millions d’habitants, devrait être le principal contributeur, mais il doit aussi mobiliser ses troupes pour sa sécurité intérieure, qu’il a déjà le plus grand mal à assurer à quatre mois d’élections générales cruciales pour le président par intérim, Goodluck Jonathan. (Avec AFP)

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