Au moins quatre morts par balles à Abidjan

Au moins quatre personnes ont été tuées à Abidjan jeudi matin, tandis que plusieurs regroupements de manifestants pro-Ouattara étaient dispersés par les forces de l’ordre.  Les autorités armées fidèles à Laurent Gbagbo avaient hermétiquement bouclé le périmètre autour du siège de la télévision d’État ivoirienne, dont veulent s’emparer les partisans de Ouattara.

Deux blessés à terre à Abidjan, le 16 décembre, après la dispersion d’un rassemblement. © AFP

Deux blessés à terre à Abidjan, le 16 décembre, après la dispersion d’un rassemblement. © AFP

ProfilAuteur_PierreBoisselet

Publié le 16 décembre 2010 Lecture : 4 minutes.

Le Premier ministre d’Alassane Ouattara , Guillaume Soro, a demandé aux partisans du président de « ne  pas se laisser distraire par cette dictature des chars, et à réclamer la liberté de l’information pluraliste par les médias d’Etat ». Depuis le début de la matinée ce jeudi 16 décembre, des milliers de militants pro-Ouattara sont descendus dans la rue à Abidjan et se dirigent vers la RTI, la télévision d’Etat qui reste un pilier du régime de Laurent Gbagbo.

Au moins quatre personnes ont été tuées par balles à Abidjan jeudi matin. Les corps de trois d’entre elles ont été vus par un photographe de l’AFP dans le quartier d’Adjamé, au nord d’Abidjan. Selon des témoins, les victimes auraient été tuées par les forces de l’ordre restées fidèles au président Laurent Gbagbo. Des coups de feu avaient été entendus dans ce quartier, alors que des jeunes pro-Ouattara barraient la route et jetaient des pierres.

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À Koumassi, le corps d’une autre victime tuée par balles, a été vu par un journaliste de l’AFP alors qu’il était emporté par la Croix rouge.

Selon Guillaume Soro, il y aurait au moins trente morts à Abidjan – vingt selon les Forces de sécurité (FDS, fidèles à Gbagbo), qui font aussi état de cinq tués dans leurs rangs (dont trois brûlés vifs dans un immeuble) et de deux soldats « pris en otages » par les Forces nouvelles (FN) de Guillaume Soro. On compterait aussi vingt morts à Tiébissou (Centre). En cause dans cette dernière ville, selon le camp Ouattara, des milices de mercenaires venus du Liberia qu’aurait recrutés Gbagbo. À Yamoussoukro, les affrontements d’hier auraient fait deux morts, selon la même source.

Par ailleurs, des échanges de tirs nourris avec des armes de gros calibre (les détonations étant entendues à plus d’un kilomètre) entre les FN participant à la protection de Ouattara et les FDS étaient encore entendus aux abords de l’hôtel du Golf à 12 heures (locales et GMT). Les tirs se sont cependant arrêtés vers 14h, alors que la pluie commençait à tomber sur Abidjan.

Imposant déploiement des forces de l’ordre

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Dès les premières heures de la journée décisive de jeudi, les forces de l’ordre restées fidèles au président sortant Laurent Gbagbo, qui se maintient au pouvoir après un coup d’État institutionnel, ont montré leur détermination à ne pas laisser les militants du camp opposé, celui du président élu Alassane Dramane Ouattara, atteindre leurs objectifs.

Ce dernier avait appelé mardi à marcher sur le siège de la RTI (Radio télévision ivoirienne, média d’État, contrôlé par les partisans de Laurent Gbagbo) et la Primature (où le Premier ministre d’Alassane Ouattara, Guillaume Soro, veut installer son gouvernement).

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Les forces de l’ordre ont rapidement dispersé les quelques centaines de partisans d’Alassane Ouattara qui avaient commencé à se rassembler dès 8 heures (locales et GMT) dans le quartier d’Abobo (nord d’Abidjan) afin de préparer la marche.

Une quinzaine de membres des Forces de défense et de sécurité (FDS), fidèles à Laurent Ggagbo, ont utilisé des gaz lacrymogènes.

À Cocody, quartier qui abrite le siège stratégique de la RTI, les FDS bouclaient tout le périmètre autour du bâtiment. Des véhicules blindés ainsi que des membres des FDS armés de kalachnikov occupaient les deux extrémités de la voie menant à l’établissement.

Charles Blé Goudé, le ministre de la Jeunesse et de l’Emploi de Laurent Gbagbo, et surtout chef des patriotes pro-Gbagbo, avait promis d’agir « bientôt » après l’appel du camp d’Alassane Ouattara.

« Je peux accepter […] que des gens soient à Bouaké (centre et QG de l’ex-rébellion) et nous narguent, mais tenir de tels propos sous nos nez, c’est […] nous déclarer clairement la guerre », avait-t-il affirmé.

À Yamoussoukro (centre), des sympathisants de M. Ouattara ont tenté de défiler mercredi, mais en ont été empêchés par les forces fidèles à Gbagbo. Plusieurs manifestants ont été blessés par balles, selon les initiateurs de la marche, des témoins et une source hospitalière.

Mises en garde de Luis Moreno-Ocampo

Devant cette flambée de violences, le procureur de la Cour pénale internationale (CPI), Luis Moreno-Ocampo a réagi. Il a prévenu jeudi qu’il engagerait des poursuites contre quiconque serait responsable de violences meurtrières en Côte d’Ivoire, dans un entretien à la télévision France 24.

« S’ils commencent à tuer des gens, alors c’est un crime et nous engagerons des poursuites contre eux », a déclaré le procureur, faisant référence aux différents acteurs de la crise ivoirienne.

« Nous n’avons choisi aucun camp dans cette affaire. Quiconque se rend coupable de cela [des crimes], quel que soit son bord, sera poursuivi », a-t-il ajouté.

Moreno-Ocampo menace ainsi les groupes en Côte d’Ivoire qui « planifient des attaques et nous le savons. Et je veux leur dire clairement : si vous faites cela, si vous commettez des crimes, vous serez poursuivis. C’est un message clair ». Avant de conclure : « La leçon de cette histoire est que la violence est un billet pour la prison, pas pour le gouvernement. » (Avec AFP)

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