Jack Lang : « La suite logique serait que Laurent Gbagbo s’en aille »

L’ancien ministre socialiste Jack Lang, Commandeur dans l’ordre du mérite ivoirien depuis mars 2008, a écrit à Laurent Gbagbo pour lui demander de céder la place au président élu Alassane Ouattara. Non sans avoir, dans un premier temps, reconnu la défaite électorale de son ami du bout des lèvres… Interview.

Laurent Gbagbo et son ami Jack Lang en ballade à Abidjan, en mars 2008. © AFP / Issouf Sanogo

Laurent Gbagbo et son ami Jack Lang en ballade à Abidjan, en mars 2008. © AFP / Issouf Sanogo

Clarisse

Publié le 13 décembre 2010 Lecture : 2 minutes.

Après moult tiraillements, les socialistes français ont donc réussi à accorder leurs violons au sujet de la présidentielle ivoirienne en appelant à « respecter les résultats de l’élection et le travail de la Commission électorale indépendante ». Mais à quel prix ? Présence de Guy Labertit, le « Monsieur Afrique » du PS, à l’investiture de Laurent Gbagbo ; fronde du député des Landes, Henri Emmanuelli, contre les médias accusés de lynchage partisan à l’encontre de son ami Laurent Gbagbo ; communiqué officiel tardif reconnaissant la victoire d’Alassane Ouattara… Encore une fois, les socialistes français n’ont pas brillé par leur unanimité. Jack Lang, qui se revendique ami de Laurent Gbagbo, explique à Jeuneafrique.com pourquoi, dans une lettre du 5 décembre, il a demandé au président du Front populaire ivoirien (FPI) d’accepter la victoire de son rival Alassane Ouattara.

Jeuneafrique.com : Pourquoi avoir écrit à Laurent Gbagbo ?

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Jack Lang : Ma lettre n’a qu’un seul objectif : convaincre le président Laurent Gbagbo d’accepter les règles qu’il a lui-même contribué à fixer. Ces derniers jours, il est la cible de toutes les critiques et il est de bon ton de le vilipender. Mais, à regarder objectivement, bien qu’il ait pu commettre des erreurs, il a maintenu debout ce pays à un moment où il était agressé, divisé, déchiré. Il est parvenu, avec d’autres leaders ivoiriens, à rétablir la paix et à organiser, pour la première fois, des élections pluralistes en Côte d’Ivoire.

La suite logique de ces avancées, ce serait que Laurent Gbagbo reconnaisse les résultats proclamés par cette Commission électorale indépendante, qui bénéficiait de la confiance de l’ensemble des candidats, et s’en aille. J’ai soutenu sa candidature et j’aurais été très heureux qu’il remporte la majorité. Mais, soutenir une candidature, c’est une chose, encourager la violation des règles du jeu démocratique en est une autre. L’amitié pour une personne n’implique pas l’acceptation inconditionnelle de tous les actes qu’elle pose.

Êtes-vous surpris, déçu de l’attitude de Laurent Gbagbo ?

Je suis surtout triste. Pour Laurent Gbagbo lui-même, pour la Côte d’Ivoire et pour l’idée que je me fais de la démocratie. En même temps, je ne veux pas m’ériger en juge suprême, mais on ne peut pas changer les règles tout simplement parce qu’elles ne vous sont pas favorables.

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Avez-vous essayé de parler à Laurent Gbagbo ?

Oui, mais sans succès. J’ai néanmoins pu m’entretenir avec quelques-uns de ses proches, dont je tairai les noms, pour faire passer le même message qu’aujourd’hui. Laurent Gbagbo serait en accord avec le travail effectué depuis plusieurs années en reconnaissant la victoire d’Alassane Ouattara. Et ce dernier l’y aiderait en acceptant une solution d’union nationale. Si je peux être utile comme médiateur ou comme conciliateur, je n’hésiterais pas. Mais je n’ai pas été sollicité, pour l’instant.

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Que peut la France, y compris militairement ?

On ne peut pas demander à la France tout et son contraire. On attend d’elle qu’elle respecte la souveraineté d’un peuple et qu’elle ne se mêle pas de sa politique intérieure. L’accord militaire liant nos deux pays n’est valable que pour la protection des ressortissants français. Je ne peux pas imaginer que la France se mêle de régler ce conflit politique. Pour le futur, d’ailleurs, il faut envisager le retrait de toutes ces forces militaires françaises stationnées en Afrique, car elles sont source de confusion.

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