Étonnants Voyageurs : les ambassadeurs de la culture face aux lycéens de Ségou
Deuxième journée de rencontres pour la caravane du festival Étonnants Voyageurs qui arpente le Mali pour sa huitième édition, du 22 au 28 novembre 2010. Portraits de deux ambassadeurs de la culture à Ségou : Fodé Moussa Sidibé et Aziz Siten’k.
Après le lycée Michel Allaire, les artistes de la caravane du festival Étonnants Voyageurs ont été reçus à Ségou. Ainsi, l’écrivain malien Fodé Moussa Sidibé, la journaliste française Valérie Marin La Meslée et le slammeur ivoirien d’origine malienne Aziz Siten’k sont allés à la rencontre des élèves de deux lycées ségoviens, Mandiouma Keïta et Cabral.
Perte d’identité
D’un côté, Fodé Moussa Sidibé incarne la culture malienne ancestrale. Ce docteur ès lettres passé par l’université de la Sorbonne (Paris, France) est un spécialiste reconnu de la confrérie des maîtres chasseurs Donso. Il a notamment traduit certains de leurs chants et de leurs récits – et a mis son savoir au service d’un roman : La révolte de Zangué, l’ancien combattant, publié par les éditions La Sahélienne.
Actuellement, il est professeur à l’Institut supérieur de management et d’entrepreneuriat de Bamako. Sa présence parmi les lycéens suscite une intense curiosité : comment devient-on chasseur? Que reste-t-il de la culture des chasseurs dans le Mali d’aujourd’hui ? Qu’est-ce qui menace nos traditions? Les questions sont nombreuses et, en professeur habitué des salles de cours, Fodé Moussa Sidibé y répond avec science. « La première menace qui pèse sur nos traditions, c’est nous-mêmes, dit-il. Nous nous sommes affranchis de nombre d’entre elles pour devenir des hommes du monde. Pour autant, nous ne devons pas perdre notre identité. » Pédagogue, il explique que plus de 60 % des chansons d’Oumou Sangaré viennent aujourd’hui du répertoire de Toumani Koné, c’est à dire directement de la tradition des chasseurs.
Clouant au pilori les pères fouettards de la culture, il se fait le promoteur de l’écrit, même quand c’est aux dépens de l’orthographe ou de la syntaxe. « Les manuscrits de Tombouctou sont écrits avec des caractères arabes, mais dans nos langues ! Alors n’hésitez pas : si vous avez quelque chose à raconter, une histoire de votre grand-mère ou n’importe quoi d’autre, allez-y, utilisez l’alphabet français. Plus tard, vous corrigerez les fautes ou vous trouverez quelqu’un qui vous aidera à mettre en forme votre texte. Le fond sera là : c’est le principal ! »
Poésie spectacle
Face à lui, Aziz Siten’k représente une jeunesse qui a trouvé un nouveau moyen d’expression pour sa culture, en l’occurrence le slam. Cette façon de déclamer popularisée en France par Grand Corps Malade, il l’a découverte en 2006 en écoutant un artiste béninois sur Radio France internationale (RFI). « Déjà, à l’école, je récitais des poésies et j’étais passionné par l’écriture, raconte-t-il. Dans le slam, j’ai retrouvé tout cela, mais c’était encore plus vivant, la poésie devenait spectacle. » Et sous le soleil de Ségou, le spectacle prend.
Aziz Siten’k raconte les origines du slam, et sa naissance au Mali au travers du collectif Aslama qu’il a rejoint. Ils sont cinq comme lui à, aujourd’hui, tenter de faire vivre le slam en terre malienne. Kalire, Stepho, Bouba Chaman, Jazz, tous se démènent pour communiquer leur passion… tout en tentant de sortir leurs albums, pour la plupart finalisés sur leurs ordinateurs. Là n’est pas la tâche la plus aisée. Aziz Siten’k a déjà 16 titres en réserve mêlant zouglou, R’n’B et slam.
Mais de cela il ne parle pas face aux lycéens : ce qu’il souhaite avant tout, c’est les faire participer. Malheureusement, les quelques aléas de l’organisation ne permettent pas la tenue d’ateliers créatifs. Ce sera pour une autre fois…
Les ambassadeurs de la culture vont maintenant quitter Ségou pour rejoindre Bamako, où l’écrit sera célébré quatre jours durant. Mais une idée reste, insistante : quand est-ce que le slammeur écrira un texte sur les chasseurs du Mali ? Bientôt, sans doute.
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