Comment Heineken veut conquérir le continent

Alors que la consommation de bière décolle en Afrique, la stratégie du brasseur néerlandais Heineken s’articule autour de trois axes : multiplier les acquisitions, optimiser la distribution et s’approvisionner localement.

En 2012, le goupe Heineken a racheté la brasserie de Harar. © Heineken

En 2012, le goupe Heineken a racheté la brasserie de Harar. © Heineken

Publié le 16 juillet 2013 Lecture : 3 minutes.

C’est à une véritable offensive africaine que se livre Heineken ces dernières années. Objectifs : contrebalancer des résultats qui s’essoufflent en Europe et juguler l’impact de la hausse du cours de l’orge (celui-ci a bondi de 40 % en 2011 et reste élevé depuis). Le troisième brasseur mondial se recentre donc sur les pays émergents, notamment en Afrique (où il est implanté depuis 1923), alléché par le pouvoir d’achat d’une classe moyenne florissante – une donnée fondamentale alors qu’il se positionne essentiellement sur le segment haut de gamme.

Le succès semble être au rendez-vous. Avec 2,6 milliards d’euros, la région Afrique – Moyen-Orient a représenté 14,4 % du chiffre d’affaires total du groupe, contre 12 % en 2011. La production des 45 brasseries de Heineken sur le continent est, quant à elle, passée de 18,3 millions à 30,4 millions d’hectolitres entre 2007 et 2012 (soit plus de 15 % de la production globale en Afrique). De quoi inonder un marché continental de la bière qui, selon les analystes, devrait croître de 5 % à 6 % par an au cours des prochaines années.heineken info

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Moteurs

Heineken dispose de deux places fortes : le Nigeria, où ses filiales Nigerian Breweries et Consolidated Breweries dominent le secteur ; et la RD Congo, où la Primus est une véritable institution. Pour gagner des parts de marché, au-delà du développement de ses marques phares (Primus, Star, Gulder, Mützig, Maltina et Turbo King) et des innovations marketing, le brasseur combine acquisitions, croissance organique et optimisation de son réseau de distribution. « Notre portefeuille de marques, l’investissement dans nos capacités de production et notre force de frappe commerciale sont et resteront nos moteurs de croissance », résume Siep Hiemstra, président du groupe pour l’Afrique et le Moyen-Orient. En sept ans, le géant néerlandais a investi 2,2 milliards d’euros sur le continent, dont 450 millions en 2012. « Nous investissons avec un temps d’avance afin de pouvoir répondre à la demande. Nous construisons des brasseries technologiquement en pointe, ce qui nous permet de maintenir des coûts de production faibles », précise Siep Hiemstra.

Heineken prête aussi une attention particulière à son réseau de distribution. « C’est l’un des facteurs clés de sa réussite, souligne Andy Gboka, analyste chez Exotix. Au Nigeria, il a développé une base de données qui regroupe l’ensemble des distributeurs, prenant ainsi une longueur d’avance sur la concurrence. Cet outil va être répliqué dans d’autres pays, ce qui va lui permettre d’optimiser son maillage. »

Pour pousser ses pions sur un continent où le tandem SAB Miller-Castel règne en maître (les deux ont noué une alliance stratégique en 2001), le groupe néerlandais a multiplié les acquisitions. En janvier 2011, il a gonflé d’un tiers sa capacité de production au Nigeria en rachetant cinq brasseurs locaux à Sona Group. Sept mois plus tard, il a acquis deux brasseries en Éthiopie, à Bedele et à Harar, pour 59 millions et 54 millions d’euros. Et l’an dernier, il a annoncé la construction d’une nouvelle brasserie à Kilinto, à proximité d’Addis-Abeba, moyennant un investissement de 120 millions d’euros. Une société baptisée Heineken East Africa Import Company a, par ailleurs, été établie au Kenya en 2012. « Il s’agit d’une représentation commerciale qui servira de base pour se développer en Afrique de l’Est », indique Andy Gboka.

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Coopératives

Dernière corde à son arc : le développement durable, que Heineken a placé au coeur de sa communication depuis 2010 via son programme « Brewing a Better Future » (« brasser un avenir meilleur »). Le groupe s’est engagé à ce que 60 % des matières premières utilisées soient d’origine locale en 2020. En pratique, il s’agit de mettre à contribution le secteur agricole via des coopératives de fermiers, avec une chaîne d’approvisionnement intégrée, afin d’accroître la productivité, de sécuriser les stocks et de stimuler l’économie locale.

Cet engagement se traduit pour l’instant par 8 projets : en Sierra Leone, au Nigeria et au Burundi pour le sorgho, en Égypte, en Éthiopie et en Afrique du Sud pour l’orge, au Rwanda pour le maïs et en RD Congo pour le riz. « L’ensemble de ces projets implique 100 000 familles et bénéficie à plus de 600 000 personnes », précise Patrick Villemin, responsable des relations institutionnelles en Afrique et au Moyen-Orient, qui ajoute : « Le programme lancé en 2009 en RD Congo a permis de récolter 40 000 t de riz, ce qui correspond à une hausse de 62 % de la production nationale en trois ans, et d’injecter 20 millions d’euros dans l’économie congolaise tout en augmentant significativement les revenus des agriculteurs. »

Heineken a tout à y gagner : produire local revient à sécuriser la chaîne d’approvisionnement, met à l’abri des variations du cours de l’orge et limite les frais de transport. Une donnée non négligeable alors qu’un programme de réduction des frais a été mis en oeuvre en 2012 afin de réaliser 525 millions d’euros d’économies d’ici à 2014.

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