Raout à Tunis pour une économie africaine forte et intégrée
Réunis à Tunis pour trois jours à l’invitation de la BAD, les meilleurs économistes africains vont débattre des conditions nécessaires au décollage économique du continent. L’intégration régionale et l’importance d’un consensus continental lors des négociations internationales sont au centre des débats.
« Cet évènement est devenu au fil des ans la référence sur le développement africain. » C’est en ces termes que Pascal Lamy, président de l’Organisation mondiale du commerce (OMC), a tenu à saluer ce matin l’ouverture de la 5e conférence économique africaine organisée par la Banque africaine de développement (BAD).
Réunis pour trois jours à Tunis, du 27 au 29 octobre, les meilleurs économistes du continent vont échanger leurs points de vue et expériences pour dessiner ensemble les contours du plan d’actions, qui pourrait offrir à l’Afrique une croissance à long terme.
Une voix significative à l’international
À la tribune, Donald Kaberuka, président de la BAD depuis 2005 et récemment réélu pour un second mandat, s’est réjoui du nouvel intérêt porté depuis quelques années au continent. « Ce n’est pas encore la flamboyance, mais nous ne sommes plus dans l’afro-pessimisme des années 1980 et 1990, s’est-il félicité. J’appellerai ça de l’afro-réalisme. »
Mais il a insisté pour que la voix de l’Afrique soit plus forte au niveau international. « Jusqu’à ce qu’on entende le rugissement du lion, c’est toujours le cri du chasseur que l’on entendra », a t-il résumé dans une métaphore.
Plus mesuré, Abdoulie Janneh, secrétaire exécutif de la Commission économique des Nations unies pour l’Afrique (CEA), a rappelé que même une croissance économique à 5 %, ce qui est plus ou moins attendu pour 2010 et 2011, n’est pas suffisante pour sortir le continent de la pauvreté. Si les Africains représentent 15 % de la population mondiale, le PIB du continent ne dépasse pas lui 2,5 % de la richesse globale.
Des économies africaines qui pourraient par ailleurs souffrir dans les mois à venir de la baisse de la demande induite par les politiques d’austérité annoncées dans les pays développés. Dans un contexte postcrise le patron de la CEA a rappelé le rôle important que peuvent jouer les États dans la planification des économies.
C’est pour assurer au continent de meilleures perspectives, qu’Abdoulie Janneh et Donald Kaberuka ont appelé de leurs vœux un accord dans le cadre des négociations du cycle de Doha pour le commerce international débuté en 2001. Les participants à la conférence de la BAD ont aussi pour ambition d’apporter matière à réflexion au G20, qui se réunira à Séoul en novembre.
L’antienne de l’intégration économique
L’intégration régionale constitue selon les représentants de la BAD, de l’OMC et des Nations unies le meilleur moyen de profiter collectivement des efforts produits en matière de développement économique. Certes l’Afrique affiche un PIB et une population comparables à la Chine ou l’Inde, mais ce n’est pas un seul et même pays. Et de nombreux obstacles réglementaires subsistent pour améliorer le commerce entre les États du continent.
Si en Asie, les échanges régionaux représentent près de 40 % du total, ils atteignent à peine 20 % en Afrique, le commerce informel inclus. Le déficit d’infrastructures logistiques constitue également un frein majeur en la matière.
Un plaidoyer pour un rapprochement des économies africaines a été défendu avec conviction par le Premier ministre tunisien Mohammed Ghannouchi. Il a rappelé que son pays avait depuis longtemps choisi cette voie en trouvant entre autres des accords avec l’Union européenne, l’Égypte, la Jordanie, la Turquie et que des négociations sont en cours avec l’Union économique et monétaire ouest africaine (UEMOA), la Communauté des États d’Afrique centrale (Cemac) et l’Algérie.
Des accords équitables, basés sur des concessions réciproques, qui prennent en compte les écarts de développements entre les parties. « À cette condition, a affirmé Mohammed Ghannouchi, nous ferons de l’Afrique un moteur pour l’économie mondiale. »
Si le consensus semble être fait sur l’environnement nécessaire au décollage de l’Afrique, Donald Kaberuka a insisté sur le fait qu’il existe plusieurs chemins vers le développement, et « qu’il était une erreur d’avoir pu penser par le passé qu’il n’en existait qu’un ».
Toutefois pour peser lors des négociations internationales, les Africains doivent parler d’une seule voix, a insisté Pascal Lamy : « Les études le prouvent, l’Afrique ne souffre pas de l’absence d’entreprises compétitives mais d’un système compétitif. »
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