Présidentielle : Marie-Reine Hassen, une femme contre Bozizé

L’ancienne ministre déléguée Marie-Reine Hassen veut succéder à François Bozizé lors de la prochaine présidentielle. L’ex-épouse de Jean-Bedel Bokassa a-t-elle ses chances ? Certains lui prédisent une cuisante défaite, si du moins elle est autorisée à concourir.

Marie-Reine Hassen a été trois fois ministre déléguée en Centrafrique. © D.R.

Marie-Reine Hassen a été trois fois ministre déléguée en Centrafrique. © D.R.

Publié le 18 novembre 2010 Lecture : 3 minutes.

Pour certains Centrafricains, son nom n’évoque rien. Pourtant, Marie-Reine Hassen a été première dame, indique Dark Age, The Political Odyssey of Emperor Bokassa (de Brian Titley, Mc Gill – Queen’s University Press, 272 pages, 7 euros). Interrogée par jeuneafrique.com, Marie-Reine, qui brigue la magistrature suprême, raconte. Retour en 1974.

Pour la protéger du futur empereur, sa mère, institutrice, tente de fuir au Cameroun avec ses enfants. Arrêtés, ils sont enfermés dans les geôles tristement réputées de Ngaragba. Deux années plus tard, en 1976, âgée de 13 ans, la jeune Franco-Centrafricaine sort, amaigrie, pour être mariée au « dictateur mégalomane », qui peu après libérera les siens.

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« Il aurait pu me brutaliser dès le départ. Cela aurait été un moyen de plus pour se venger de mon père (ancien conseiller français du président David Dacko en fuite, NDLR). Il ne l’a pas fait. Par la suite, il m’a traitée avec beaucoup d’égards. »

Féminiser le développement économique

Il n’empêche. Elle veut recouvrer la liberté et simule la folie. Son mari s’en sépare au bout de deux ans et, avant son départ pour la France, elle garde en mémoire la « prospérité et la stabilité » de son pays. Un « âge d’or » qu’elle espère ressusciter en devenant la deuxième présidente d’un État africain. Après la Libérienne Ellen Johnson-Sirleaf.

Mais ulcérée par le « jeu » autour de la date limite de dépôt des candidatures et le manque de « transparence » dans le processus électoral, Marie-Reine Hassen « refuse de déposer [son] dossier tant que les autorités ne font pas un effort pour assurer la sécurité, un bon recensement, une commission électorale fiable… ».

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Quel programme propose la deuxième candidate à la présidentielle centrafricaine, après Jeanne-Marie Ruth-Rolland, en 1993 ? Elle promet la sécurité, l’eau, la nourriture, l’éducation, l’électricité, la santé et la justice. Nécessaire, mais rien de vraiment révolutionnaire. En revanche, l’économiste formée en France et aux États-Unis pourrait se démarquer avec son projet de féminiser le développement économique…

L’élégante métisse de 46 ans a-t-elle réellement ses chances ? « C’est une femme très brave, très adroite et qui peut faire beaucoup de choses. Le problème, c’est qu’elle n’a pas de pouvoir financier et qu’elle n’est pas très connue », souligne une grande avocate centrafricaine, qui votera pour Marie-Reine Hassen même si elle pense « qu’elle ne va pas passer ».

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Durs auspices

Pas évident de s’imposer face au chef de l’État sortant François Bozizé et à tous ces « ex » : Ange-Félix Patassé (ancien président), Martin Ziguélé (Premier ministre de 2001 à 2003), Eloi Anguimaté (ancien ministre). Celle qui se veut rassembleuse a tout de même été diplomate et ambassadeur itinérant au Sénégal, de 2003 à 2006, avant d’occuper trois postes de ministre déléguée : aux Affaires étrangères, puis à l’Économie et enfin à la Présidence.

Elle démissionne en octobre 2009, concluant « que le pays est entre de très mauvaises mains et que sa situation est catastrophique ». Le ras-le-bol, aussi, des vexations, des conditions de travail exécrables… et de l’inaction des autorités après une « tentative d’assassinat » perpetrée contre elle en juin 2009.

« Tentative d’assassinat ? s’interroge, incrédule, Alain-Bertrand Kogalama, responsable du journal Nouvelle Vision. C’est plutôt un braquage. Les gens ne blaguent pas avec les armes ici. Si c’est pour tuer, ils tuent. Mais si ce n’est pas pour tuer, ils ne tuent pas… »

Reste qu’après l’attaque, la divorcée mère de trois enfants – sportive, guitariste et chanteuse à ses heures perdues – s’est exilée en France. D’où elle a appris qu’en mai une « dizaine de militaires » avait forcé sa résidence à Bangui. « Incurable optimiste », elle compte toujours battre campagne au pays si sa candidature est retenue. Mais sous protection de la Force multinationale en Centrafrique.
 

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