Affaire Ben Barka : le juge Ramaël a perquisitionné les locaux de la DGSE française

Le 11 octobre, des sources proches de l’enquête sur l’enlèvement de l’opposant marocain Mehdi Ben Barka ont révélé que le juge français Patrick Ramaël avait perquisitionné en juillet et en août derniers les locaux des services français de la sécurité extérieure, la DGSE. Une première.

Une pancarte devant la Brasserie Lipp à Paris, en octobre 1998, lors d’un rassemblement en hommage © AFP

Une pancarte devant la Brasserie Lipp à Paris, en octobre 1998, lors d’un rassemblement en hommage © AFP

ProfilAuteur_PierreFrancoisNaude

Publié le 12 octobre 2010 Lecture : 3 minutes.

Le juge Patrick Ramaël est décidément sur tous les fronts. Et sait soigner son image dans les médias. Alors qu’il connaît un sérieux revers en Côte d’Ivoire, où il enquête sur la disparition du journaliste Guy André Kieffer et sur le bref enlèvement de l’avocat Xavier Ghalber,, on a ainsi appris, lundi 11 octobre, que le magistrat français avait perquisitionné au siège de la Direction générale de la sécurité extérieure (DGSE), boulevard Mortier à Paris (XXe arrondissement).

C’est la première fois que le siège de la DGSE est perquisitionné depuis qu’il a été classé secret-défense. Selon une source proche du dossier, les visites du juge ont eu lieu à deux reprises, le 29 juillet puis le 3 août. Objectif : connaître ce que les services secrets français savent de l’enlèvement de l’opposant au roi marocain Hassan II Mehdi Ben Barka en 1965 à Paris. Celui-ci avait disparu lors d’une opération menée par les services marocains avec la complicité de policiers et de truands français. L’affaire n’a jamais été totalement élucidée, le corps de Ben Barka n’ayant jamais été découvert.

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Déclassification temporaire

Cette percée dans l’enquête est due à la première application des dispositions relatives à la protection du secret de la défense inscrites dans la loi du 29 juillet 2009. Celle-ci instaure une classification non seulement des documents, mais aussi des lieux les abritant, selon les sources. Cette loi de compromis avait découlé d’un vif débat à l’Assemblée nationale, où certains députés disaient craindre l’instauration de « zones de non-droit législatives ».

Accompagné du président de la Commission consultative du secret de la défense nationale (CCSDN), Jacques Belle, comme le prévoit la nouvelle loi, le juge Ramaël s’est présenté à la « Piscine », demandant sur place puis obtenant du ministre de la Défense, Hervé Morin, la déclassification temporaire du lieu.

Dossiers sensibles saisis

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Dans les filets du juge, 23 dossiers d’époque sur la disparition de l’opposant marocain ont été saisis au service des archives centrales du Sdece-Service de documentation extérieure et de contre-espionnage, devenu DGSE en 1982. Parmi ces dossiers figurent celui du roi Hassan II, du général Mohamed Oufkir – condamné par contumace à la réclusion à perpétuité en 1967 lors d’un premier procès -, de Medhi Ben Barka, de correspondants du Sdece et de malfrats soupçonnés d’avoir trempé dans l’enlèvement.

Mais on compte aussi ceux concernant le général Hosni Benslimane, ex-capitaine aujourd’hui chef de la gendarmerie royale, et Miloud Tounsi, alias Larbi Chtouki, un membre présumé du commando marocain auteur de l’enlèvement. Ces deux derniers sont deux des quatre Marocains visés par un mandat d’arrêt international émis par le juge Ramaël en octobre 2007 et bloqués depuis par le ministère de la Justice.

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Mais rien n’est encore définitif. La CCSDN doit publier d’ici la fin de semaine son avis sur la déclassification des documents saisis, selon une source proche du dossier. Il revient ainsi au ministre de la Défense, Hervé Morin, de suivre ou ou non cet avis et de déclassifier ou pas les documents qui intéressent le magistrat.

Cependant, la quasi-totalité des avis de la CCSDN ont été suivis. Et devraient l’être encore, à moins que des intérêts politiques priment sur la marche de la justice.
L’enquête sur l’enlèvement de Ben Barka est régulièrement source de tensions entre la France et le Maroc, la famille de la victime ne cessant de dénoncer une absence de volonté des deux pays pour faire éclater la vérité. (Avec AFP)

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