Washington propose l’annulation du prix Unesco-Obiang Nguema

Le sort du prix Unesco-Obiang Nguema, du nom du président équato-guinéen, doit être fixé cette semaine. Les États-Unis proposent l’abrogation de cette distinction, mais les représentants africains la soutiennent.

Le président équato-guinéen Teodoro Obiang Nguema, le 16 juin 2009 à Libreville. © AFP

Le président équato-guinéen Teodoro Obiang Nguema, le 16 juin 2009 à Libreville. © AFP

ProfilAuteur_PierreBoisselet

Publié le 12 octobre 2010 Lecture : 3 minutes.

Les nuages s’amoncellent au-dessus de la relation entre Malabo et Washington. Les États-Unis ont entrepris de mener la contestation contre le prix Unesco-Obiang Nguema pour la recherche dans les sciences de la vie, institué en 2008 mais jamais décerné du fait de longues polémiques successives.

À la faveur de l’ouverture de la session du Conseil exécutif de l’Unesco, lundi 11 octobre, la délégation américaine au sein de l’institution a expliqué à la presse sa proposition, déposée le 8 octobre, d’abroger purement et simplement le prix.

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« On ne pouvait pas savoir ce que ce prix allait engendrer », explique un haut responsable de la délégation américaine à l’Unesco, faisant référence à la campagne lancée par de nombreuses ONG contre ladite distinction. « Le prix ternit l’honneur de l’organisation. […] Maintenant nous savons qu’il n’est pas viable. Nous sommes très inquiets des effets négatifs que son adoption a eu et va avoir sur l’Unesco s’il n’est pas annulé. »

Inquiétudes dès la création du prix

Pour justifier son point de vue, Washington dit craindre une rupture de l’organisation avec les ONG. « L’Unesco est une organisation unique, qui a été conçue pour être infiltrée par la société civile. Or celle-ci ne veut pas de ce prix », explique le même responsable de la délégation américaine. Qui soutient que les États-Unis ont exprimé leurs « inquiétudes » dès la création du prix en 2008, même si elles n’étaient pas publiques.

La position de Washington paraît courageuse – les entreprises américaines font partie des principaux opérateurs dans le secteur du pétrole en Guinée équatoriale – mais elle est loin de suffire à entraîner l’annulation du prix. En témoigne notamment la médiatisation du dossier par les États-Unis, plutôt inhabituelle à l’Unesco, une institution où, de l’aveu même de la délégation américaine, les décisions sont souvent prises par consensus.

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De fait, la rancœur de certains pays arabes suite au rejet de la candidature de l’Égyptien Farouk Hosni dans des conditions rocambolesques l’année dernière, ne devrait pas aider Washington à susciter un large mouvement en faveur de sa proposition.

Un air de Nord contre Sud

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Ensuite et surtout, l’initiative de Teodoro Obiang Nguema jouit de l’appui de nombreux représentants africains et, à l’Unesco, le camp « occidental »  ne pèse pas très lourd face aux pays du Sud. En comptant l’Europe de l’Est, il ne totalise que 16 sièges sur 58. Sans compter qu’il est « insuffisamment uni », d’après un membre d’ONG. La position très engagée de certains pays, notamment scandinaves, tranche avec celle, plus mesurée, de pays comme la France par exemple.

Enfin, si les ONG occidentales attaquent le président équato-guinéen sur la question des droits de l’homme et de la corruption, les Africains font malicieusement remarquer qu’il existe aussi un prix Unesco-L’Oréal, alors que l’actionnaire majoritaire de cette maison de cosmétique, Liliane Bettencourt, est en délicatesse avec la justice française, notamment pour fraude fiscale présumée.

Le représentant sénégalais à l’Unesco, Papa Momar Diop, tente pour sa part une médiation auprès de la Guinée équatoriale. Une des solutions de compromis évoquées consisterait à changer le nom du prix. Mais elle est vivement rejetée par la délégation américaine. « Nous ne pensons pas que nous pouvons continuer avec ce prix. Nous devons trouver une solution plus créative », affirmait toujours le même responsable de la délégation américaine, lundi.

Les États-Unis iront-ils jusqu’à mettre leur départ de l’Unesco dans la balance ? On n’en est pas là, assure en substance la délégation américaine, dont l’attitude n’est sans doute pas étrangère à la nouvelle doctrine Obama en matière de développement. En 1984, sous l’impulsion de Ronald Reagan, Washington avait quitté l’organisation, trop budgétivore et pas assez malléable à son goût dans le cadre de la guerre froide. Un retrait qui avait duré près de dix-neuf ans…

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