Quand les islamistes traînent la police devant la justice
Sept membres de la confrérie islamiste Al Adl wal Ihsane, arrêtés en juin dans le cadre d’une sombre histoire d’enlèvement, viennent de porter plainte pour torture contre la police.
Al Adl wal Ihsane n’a qu’un rêve : islamiser – au sens radical du terme – le Maroc. Le mouvement, non reconnu mais qui compterait quelque 100 000 membres ou sympathisants, est l’un des plus influents du royaume dont il répudie la monarchie chérifienne. À la fois politique et mystique, il embarrasse de plus en plus Rabat.
Dernier épisode en date, mercredi 2 septembre. Les familles de sept militants d’Al Adl ont « porté plainte contre la police pour torture pendant leur garde à vue ». Ils avaient été arrêtés à Fès (centre) le 28 juin dernier après qu’un avocat de cette ville, Mohamed El Ghazi, ait porté plainte contre eux pour « enlèvement et violence ». Selon certains journaux, ils soupçonnaient « El Ghazi, un ancien membre d’Al Adl wal Ihssane, d’avoir fourni des renseignements [à la police, NDLR] sur leurs activités politiques ».
Rêve prophétique
« Ces militants ont déposé lundi par le biais de leurs avocats une plainte contre la brigade nationale de la police judiciaire parce qu’elles ont été torturées. Leurs aveux ont été extirpés sous la violence », a expliqué l’un de leurs avocats, Mohamed Aghannaje, qui s’exprimait lors d’une conférence de presse mercredi à Rabat. Des allégations que la police, bien-sûr, nie en bloc.
Selon les partisans d’Al Adl, toute l’affaire ne serait qu’un complot pour décrédibiliser le mouvement islamiste. Et freiner ses ardeurs alors qu’il se mobilise de plus belle cette année, comme en 2006.
La raison de l’agitation des adlistes tient vraisemblablement à l’un des rêves prophétiques du guide de l’organisation, Abdessalam Yassine. La confrérie se donnant comme but ultime la qawma, c’est-à-dire soulèvement en masse des fidèles, on imagine facilement la teneur des songes de cheikh Yassine. Et la nervosité de Rabat.
Human Rights Watch s’en mêle
D’autant que l’organisation américaine Human Rights Watch (HRW) a volé au secours des sept islamistes, en critiquant dans un communiqué les conditions de leur arrestation et de leur détention.
« Ils ont été arrêtés à l’aube sans mandat judiciaire. La manière dont les opérations de recherche à domicile ont été effectuées laisse penser que la justice n’était pas une priorité », écrit l’ONG. Qui ajoute que les sept prévenus « ont déclaré à leurs avocats que la police les a mis dans des cellules individuelles, nus, les yeux bandés, sans nourriture et les a brutalisés physiquement ». Ils auraient en outre attendu une semaine avant de pouvoir bénéficier d’un examen médical.
Le parquet de Fès, quant à lui, les accuse d’« appartenance à une association non reconnue ». Ils sont incarcérés à la prison Aïn Kaddouss de Fès et la date de leur procès n’a pas encore été fixé, le juge d’instruction n’ayant achevé que mardi leur audition.
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