Fadela Amara prend ses distances
La « grande gueule » de l’ouverture sarkoziste fustige la position de Brice Hortefeux et, au-delà, la direction empruntée par le gouvernement sur les expulsions de Roms, la déchéance de la nationalité française et la stigmatisation des étrangers.
En plein débat sur des sujets concernant l’immigration et les droits des étrangers en France, Fadela Amara « l’insoumise » fait entendre une voix discordante. La secrétaire d’État chargée de la Politique de la ville s’en prend directement aux propositions et déclarations des membres du gouvernement et de la majorité, dénonçant les attaques récurrentes contre les étrangers. Sa cible principale : Brice Hortefeux, le ministre de l’Intérieur. Ou plutôt le virage sécuritaire qu’il a engagé aux côtés de Nicolas Sarkozy.
Mardi 31 août, elle s’est ainsi ouvertement démarquée de la position du locataire de la place Beauvau sur la question de la déchéance de la nationalité. Alors que Brice Hortefeux préconise son élargissement à d’autres crimes que ceux admis jusque-là comme susceptibles d’entraîner la perte de la nationalité française – atteinte aux intérêts de la nation ou terrorisme -, elle a dénoncé dans une interview sur RTL une « surenchère » dangereuse. Le ministre de l’Intérieur voudrait pouvoir élargir la privation de la nationalité aux cas d’excision, de traite d’êtres humains ou d’« actes de délinquance grave », prenant pour exemple l’affaire Lies Hebbadj. Tandis que Nicolas Sarkozy avait lui évoqué l’atteinte à la vie de policiers, de gendarmes ou de tout dépositaire de l’autorité publique.
« L’insécurité n’a pas de couleur »
L’ancienne présidente de Ni putes ni soumises s’est aussi déclarée « contre les expulsions de Roms » qui font grand bruit depuis plusieurs semaines. Brice Hortefeux avait la veille stigmatisé cette population en révélant qu’ « un vol sur cinq à Paris est commis par un roumain ». En 2009 déjà, alors que Brice Hortefeux passait, à la faveur d’un remaniement ministériel, du département de l’Immigration à celui du Travail devenant ainsi son ministre de tutelle, elle avait rappelé qu’elle ne partageait pas sa position sur les expulsions massives.
Aujourd’hui, et contrairement au porte-parole de l’UMP Frédéric Lefebvre, pour qui « chacun sait qu’il y a des liens entre immigration et délinquance », Fadela Amara prend position pour une politique, certes ferme, mais non discriminatoire en matière de sécurité. Ainsi, précise-t-elle : « L’insécurité n’a pas de couleur de peau. […] Nos parents n’ont pas immigré pour que leurs enfants basculent dans la délinquance. »
Garder intacte sa détermination
En 2007, Fadela Amara – comme Rama Yade ou Rachida Dati – symbolisait doublement la « rupture » voulue par Nicolas Sarkozy, d’abord comme personnalité politique classée à gauche, mais aussi comme une femme « issue de la diversité ». Trois ans après, on peut dire qu’elle est restée cette indomptable qu’elle a incarnée du temps où elle dirigeait les militantes de Ni putes ni soumises dans les manifestations. « Nous sommes en démocratie, nous pouvons avoir des désaccords », réclame-t-elle. Tout comme Bernard Kouchner et Hervé Morin, tous deux réservés quant aux récents choix sécuritaires de la majorité.
Elle refuse toutefois de parler de désaveu, affirmant que ses divergences d’opinion ne l’empêcheront pas de mener à bien sa mission : « Je ne suis pas quelqu’un qui jette l’éponge. Je reste et je continuerai ».
Pourtant, à quelques semaines d’un remaniement du gouvernement qui pourrait stopper son programme « Espoir banlieues », Fadela Amara semble vouloir se retrouver en accord avec la « femme de gauche » qu’elle a toujours revendiqué être… N’hésitant pas à avouer : « Si je ne sens pas la même détermination intacte, je pense que je ne resterai pas. »
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