Le Kadhafi circus n’a pas eu lieu

Le Guide libyen n’a pas obtenu gain de cause auprès de ses frères, chefs d’État africains. Loin des débats sur l’évolution des institutions de l’organisation, terrorisme et justice internationale ont été au cœur du 15e sommet de l’Union africaine.  

Mouammar Kaddafi au 15e sommet de l’Union africaine à Kampala. © Elise Colette/J.A.

Mouammar Kaddafi au 15e sommet de l’Union africaine à Kampala. © Elise Colette/J.A.

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Publié le 28 juillet 2010 Lecture : 3 minutes.

Le 15e sommet ordinaire de l’Union africaine (UA) s’est terminé ce mardi 27 juillet en fin de journée. La dispute sur l’évolution de l’organisation vers davantage d’intégration n’a finalement pas eu lieu. On s’attendait à une passe d’armes sérieuse entre les tenants du statu quo et les partisans de la transformation de la Commission de l’UA en une Autorité de l’Union (avec trois postes de ministres). Mais, au grand dam de Mouammar Kadhafi, qui porte la bataille du changement, la discussion – pourtant inscrite a l’ordre du jour – a été reportée sine die.

Le président en exercice de l’UA, le Malawite Bingu wa Mutharika, a mené les échanges d’une main de fer. Ouvertement soutenu par certains participants et discrètement approuvé par la majorité silencieuse, il a décidé de ne pas prêter l’oreille au Guide libyen qui a tenté à plusieurs reprises de remettre la question sur le tapis.
En lieu et place de ce débat qui anime les sommets de l’UA depuis 2007, les chefs d’État africains ont évoqué longuement d’autres questions, davantage liées à l’actualité.
 
Non aux « deux poids – deux mesures » de  la CPI

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Conformément à l’opinion déjà fréquemment exprimée par certains chefs d’État du continent et par l’UA, le double mandat d’arrêt émis contre le Soudanais Omar el-Béchir a été condamné par la Conférence dans son document final. Qui argue que, loin de vouloir défendre l’impunité, l’UA estime qu’un processus bien défini incluant la consultation de l’organisation, doit être suivi quand des poursuites judiciaires de cette importance sont lancées contre un chef d’État dûment élu.

L’UA a également rejeté sans ambiguïté la demande de la CPI d’ouvrir un bureau à Addis-Abeba, brandissant le fameux fanion du « deux poids – deux mesures ». Pourquoi, ont-ils estimé, la CPI ouvrirait-elle un bureau dans la ville où siège notre organisation continentale, sans demander également d’ouvrir des représentations à Paris, Bogota ou Phnom Penh, par exemple ?
 
Renforcement de la lutte anti-terroriste

Somalie, Aqmi… Deux semaines après les attentats qui ont ensanglanté Kampala, et au lendemain de la revendication par Al-Qaïda au Maghreb islamique de l’assassinat de l’otage français, Michel Germaneau, les dirigeants africains ont voulu exprimer clairement leur engagement contre le terrorisme et leur volonté de s’organiser pour lutter contre les milices Chaabab en Somalie, les groupes armés au Sahel et toute autre forme d’extrémisme violent.

La veille, les bailleurs de fond – Américains en tête – avaient déjà décidé de collaborer encore plus activement avec le gouvernement fédéral de transition (TFG) à Mogadiscio et avec la force de l’UA en Somalie (Amisom). C’est également 2 000 soldats supplémentaires que certains États africains (Guinée, Djibouti) devraient envoyer, d’ici quelques semaines, en Somalie, portant le total des troupes à 8 000 hommes.

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Ce 27 juillet, c’est la Mauritanie, particulièrement touchée par le phénomène Aqmi, qui a présenté une résolution condamnant le terrorisme tandis que l’UA a rappelé, dans un communiqué, qu’elle interdit le paiement des rançons, estimant que cela participait au financement du terrorisme.

Cap sur Malabo 2011

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Le sommet de Kampala restera donc dans les annales comme celui où Kadhafi n’a pas réussi –  malgré ses apartés et sa préparation minutieuse de l’échéance à N’Djamena, lors d’un sommet de la Cen-Sad (Communauté des États sahélo-sahariens) tenu fort à propos juste avant celui de l’UA – à emmener ses pairs vers les « États-Unis d’Afrique ».

Pour lui, rendez-vous est déjà pris à Addis-Abeba, où se tiendra la prochaine réunion, en janvier 2011, avant le 17e Sommet de l’UA qui, lui devrait avoir lieu en juillet 2011 à Malabo (Guinée équatoriale). C’est ainsi qu’en a décidé l’Afrique centrale, à qui revient le tour de présider l’organisation panafricaine.

L’Afrique australe terminera en effet sa présidence en juillet prochain quand le chef de l’Etat malawite, Bingu wa Mutharika passera la main. Avant lui, l’Afrique du Nord avait dirigé l’organisation, avec le Libyen Mouammar Kadhafi, qui avait lui-même succédé au Tanzanien Jakaya Kikwete pour l’Afrique de l’Est. L’Afrique de l’Ouest a eu la présidence sous le Ghanéen John Agyekum Kufuor, en 2007. Les sommets semestriels se tiennent systématiquement en janvier au siège de l’UA, à Addis-Abeba (Éthiopie) et, normalement en juillet, dans le pays qui tient la présidence en exercice.

Mouammar Kadhafi a bien tenté de faire adopter par ses pairs la décision de tenir les « sommets de juillet » dans son pays, à Syrte. Une proposition qui a été repoussée par la majorité des États membres. Ce qui ne l’empêchera pas d’abriter, respectivement en octobre et en novembre prochains, les sommets UA-Ligue arabe et UA-Union européenne. Jolis lots de consolation…
 

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