Mouammar Kadhafi : « Al-Qaïda au Maghreb islamique n’existe pas »
Le Guide libyen a accordé une interview depuis Tripoli à RFI et France 24. Dans cet entretien, Mouammar Kadhafi revient sur l’enlisement du processus de paix au Darfour et sur la situation en Somalie que n’arrange en rien, selon lui, la politique de l’Union africaine. À quelques jours d’un sommet de cette organisation à Kampala (Ouganda), le dirigeant libyen se montre sévère à son égard et insiste sur son attachement à la création des États-Unis d’Afrique. Extraits.
« Khalil Ibrahim n’est pas notre ‘‘protégé’’ »
La Libye abrite depuis quelques semaines Khalil Ibrahim, leader du Mouvement pour la justice et l’égalité (JEM), un groupe rebelle actif au Darfour et qui refuse d’entrer dans le processus de négociations initié à Doha entre le gouvernement soudanais et les milices armées.
« Sa présence est embarrassante, et il est normal que le Tchad et le Soudan s’en préoccupent. Mais on lui a retiré ses papiers, il ne peut aller dans aucun autre pays étranger. Et nous lui avons interdit de diffuser tout message, sauf s’il s’agit d’un message de paix ou un appel à déposer les armes. (…) Il n’est pas notre ‘‘protégé’’, nous essayons seulement de conserver notre rôle, qui est celui de réconciliateur, d’intermédiaire régional. Il n’y a pas d’autre solution que le processus de Doha. »
Mouammar Kadhafi a réaffirmé qu’il ne reconnaissait pas la Cour pénale internationale (CPI) et donc le mandat d’arrêt émis contre le président Omar el-Béchir, indiquant qu’il serait prêt à recevoir son homologue soudanais en Libye. Il a qualifié la CPI d’« instrument au service du colonialisme et du terrorisme international ». « Avant de juger El-Béchir, il faudrait juger un certain nombre de dirigeants occidentaux et israéliens (…), tous ceux qui ont commis des génocides et qui continuent de le faire, en ne respectant pas la charte des Nations unies. »
« Pas d’autre solution que le référendum au Sahara occidental »
Selon le dirigeant libyen, le conflit entre l’Algérie et le Maroc au sujet du Sahara occidental ne pourra se régler que par une consultation populaire sur l’autodétermination des Sahraouis. « Il n’y a pas d’autre solution que le référendum ou le plébiscite. Le Maroc se montre hésitant mais Hassan II (roi du Maroc de 1961-1999) y était favorable, nous étions d’accord là-dessus. Évidemment, le Polisario récuse l’autonomie comme solution », a-t-il déclaré.
« Ben Laden peut se comporter en responsable »
Al-Qaïda au Maghreb islamique (Aqmi) ? « Il n’existe pas d’organisation de ce type. C’est de la rumeur, de la simple propagande. Il n’y a même pas d’Al-Qaïda. En réalité, il s’agit de petits groupes criminels, comme les Brigades rouges italiennes à l’époque. Même Ben Laden n’est pas responsable de leurs actes. Il peut se comporter comme quelqu’un de raisonnable, il a d’ailleurs proposé une trêve à l’Europe ». Selon Kadhafi, les attaques et les revendications d’Aqmi n’« ont rien à voir avec la religion, avec l’islam, et ces groupes n’ont aucun programme ».
« L’Union pour la Méditerranée est un bébé mort-né »
« Je ne me suis jamais enthousiasmé pour l’Union pour la Méditerranée, mais pour une Union méditerranéenne, c’est-à-dire des pays – spécifiquement africains et européens – riverains de cette mer. Je suis contre une adhésion des États asiatiques, mais Nicolas Sarkozy a dû écouter la chancelière allemande (Angela Merkel) en ramenant toute l’Europe dans cette union. Alors j’ai proposé, pourquoi pas, de ramener toute l’Afrique. Mais cela n’a pas été accepté. L’UPM est un bébé mort-né ».
« La négociation est impossible avec les Shebab »
« Les Shebab n’écoutent personne. Avec eux, la négociation est impossible, ils n’ont même pas de dirigeants officiels. (…) La politique de l’Union africaine en Somalie n’est pas la bonne, et l’envoi de troupes n’est qu’une formalité (l’Amisom, la force de paix des pays de l’UA, est présente en Somalie, NDLR). Il faudrait une véritable armée de l’Union africaine avec plus d’un million de soldats si l’on voulait mater la rébellion. Et non des troupes burundaises, des troupes ougandaises dont les missions sont mal définies. (…) Il faut laisser les Somaliens régler leurs problèmes… »
« Il faut unir l’Afrique comme les Etats-Unis d’Amérique »
Pour régler les problèmes en Afrique, comme en Somalie par exemple, Mouammar Kadhafi estime qu’ « il faut d’abord unir l’Afrique ». Selon lui, les coups d’État, les putschs militaires révèlent l’échec des politiques des États, des élections nationales… « Après l’établissement de l’UA, rien n’a été réalisé. Ces pays sont encouragés à la division, afin que les puissances étrangères puissent asseoir leur domination ». « Il faut que l’Afrique s’unisse en un seul État comme les États-Unis d’Amérique, avec une seule armée, une seule économie, une seule monnaie. »
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