Les Forces nouvelles font un (petit) pas en avant
Lors d’une cérémonie à Korhogo, les ex-rebelles des Forces nouvelles ont lancé officiellement leur opération de regroupement et de désarmement, en vue de la réunification du pays. Un début bien timide et symbolique qui ne convainc pas tout à fait les observateurs.
Faut-il y croire ? Est-ce une avancée symbolique remarquable ou, plus prosaïquement, un simple geste de communication politique sans grande portée pratique ? Mardi 15 juin, le scepticisme l’emportait chez beaucoup d’observateurs ivoiriens et internationaux, quand l’ex-rébellion des Forces nouvelles (FN) du Premier ministre Guillaume Soro, qui contrôle le Nord ivoirien depuis son coup d’État manqué de 2002, a entamé officiellement le regroupement de ses hommes dans des casernes.
La première cérémonie de cette démobilisation a eu lieu à Korhogo (plus de 600 km au nord d’Abidjan). À l’entrée du camp militaire, des ex-combattants avaient déposé leurs armes à un râtelier – une petite dizaine de pistolets-mitrailleurs seulement. Les habitants avaient sorti en grand nombre des drapeaux aux couleurs nationales, mais avaient l’air de se réjouir pour tout autre chose. Dans tous les esprits, la perspective de voir le duel Côte d’Ivoire-Portugal au Mondial de football en Afrique du Sud, qui s’est soldé par un nul (0-0), semblait l’emporter sur les considérations politiques…
Objectif : encaserner 5 000 éléments des FN
La cérémonie pourrait néanmoins avoir marqué le premier pas décisif vers le « désarmement » et la réunification du pays, prévue dans les accords de paix signés fin 2008 (quatrième accord complémentaire de celui de Ouagadougou), mais qui était jusqu’à présent resté lettre morte. « Aujourd’hui marque le début de toutes les opérations nécessaires pour que le désarmement soit une réalité », en vue d’« une paix durable et (des) élections », a affirmé le ministre de la Défense Michel Amani N’Guessan, qui avait fait le déplacement à Korhogo.
Dans cette grande ville du Nord, environ 500 éléments sont censés rejoindre prochainement les casernes, l’objectif final étant d’y regrouper 1 200 hommes. Mais le chiffre global devrait être encore plus important. Les Forces armées des Forces nouvelles (FAFN) « vont encaserner à partir de ce jour un effectif de 5 000 éléments » qui devront intégrer à terme la nouvelle armée, a précisé le chef d’état-major des FAFN, le général Soumaïla Bakayoko, sans donner plus d’indication sur les délais du regroupement. Le camp du président Laurent Gbagbo exigeait jusqu’à présent que le « désarmement » des ex-rebelles soit, comme prévu, bouclé deux mois avant le scrutin présidentiel. Mais la date de ce dernier reste inconnue…
L’opération de « désarmement » doit s’accompagner également d’une réorganisation des FN, avec en particulier un redécoupage de la moitié Nord en quatre « groupements d’instruction » : Korhogo, Bouaké au centre, Séguéla et Man dans l’oOuest. Des zones qui remplacent celles, au nombre de dix, que dirigeaient les commandants FN, les fameux « com-zones ».
Le coût de la réunification
Agrandie à des régions limitrophes, la zone de Korhogo a été confiée à Martin Kouakou Fofié, l’un des plus célèbres « com-zones », connu pour ses efforts de « bâtisseur » – mais aussi pour les sanctions onusiennes dont il fait l’objet depuis 2006… Quant aux trois autres « groupements », c’est encore le flou…
Reste plusieurs incertitudes, notamment sur le coût de la réunification et de la démilitarisation du pays. Lors de la cérémonie de mardi, le général Bakayoko a insisté sur l’enjeu financier qui continue de planer sur la pérennité de l’opération. « La guerre coûte cher, mais la paix n’a pas de prix », a-t-il déclaré. « Les finances arriveront », a assuré, quant à lui, le ministre de la Justice Mamadou Koné, représentant de Guillaume Soro.
Dernière question : que faire des ex-combattants FN qui ne seront pas retenus pour l’armée ? Une prime de 500 000 FCFA (750 euros) avait été promise pour chaque démobilisé, mais les autorités ont fait savoir que les contraintes budgétaires ne permettraient pas pour l’instant de la verser.
Selon les chiffres officiels, sur les quelque 33 000 ex-combattants FN enregistrés, près de 12 000 ont été déjà démobilisés, dont 5 700 seulement ont été pris en charge par des structures de réinsertion. Par ailleurs, 4.000 éléments ex-rebelles sont censés rejoindre les brigades du Centre de commandement intégré (CCI), au côté du même nombre de loyalistes. Mais cet état-major mixte chargé de sécuriser les élections souffre aussi d’un manque criant de moyens
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