Jusqu’où ira le bras de fer entre l’opposition et Meles Zenawi ?
Rien ne va plus entre le Premier ministre éthiopien Meles Zenawi et l’opposition qui refuse de reconnaître les résultats des législatives du 23 mai et réclame l’organisation d’un nouveau scrutin. Mais cette dernière est-elle prête à prendre le risque d’une répression sanglante, comme en 2005 ?
Cinq ans après les législatives contestées de 2005 qui avaient débouché sur une répression sanglante faisant environ 200 morts, l’opposition éthiopienne et le pouvoir central viennent d’engager un nouveau bras de fer. « Nous n’allons pas accepter les résultats [des législatives de dimanche dernier, NDLR] et nous allons demander de nouvelles élections », a affirmé Merara Gudina, l’un des principaux dirigeants du Forum pour la démocratie et le dialogue (Medrek), la coalition d’opposition regroupant huit partis, à l’issue d’une réunion collective.
Réplique immédiate du Premier ministre et ancien chef de guérilla Meles Zenawi, qui envisageait il y a peu de prendre sa retraite : « Ces appels pour un nouveau scrutin sont complètement injustifiés (…). S’il peuvent prouver que 50 % ou 100 % des sièges ont été gagnés de façon illicite, alors ils ont leur chance devant un tribunal. Mais ils appellent à de nouvelles élections sur la base d’allégations infondées », a-t-il déclaré à la presse.
Le président du Parti de l’unité pan-éthiopien (AEUP), Hailu Shawl, qui dirigeait la coalition d’opposition lors du bain de sang de 2005, s’est montré plus timoré, reconnaissant les fraudes, appelant à l’organisation d’un nouveau scrutin, mais refusant d’appeler à manifester. « Nos observateurs ont été chassés de la plupart des bureaux de vote du pays et ils n’ont pas pu observer le processus », a-t-il simplement expliqué.
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Rassemblement de partisans du gouvernement le 25 mai 2010 à Addis Abeba (AFP).
Meles Zenawi, l’allié incontournable
Sans doute sait-il aussi que le Front révolutionnaire et démocratique des peuples d’Ethiopie (EPRDF), parti au pouvoir depuis 1991 et qui a largement remporté le scrutin, ne plierait à aucune pression, qu’elle soit légale ou non, nationale ou internationale. Selon des résultats officiels partiels portant sur 536 circonscriptions – les résultats définitifs doivent être publiés le 21 juin -, le Medrek n’a gagné qu’un seul siège sur 547, tandis que le parti de Meles Zenawi en a conquis 499, plusieurs partis alliés de ce dernier en remportant 36.
« Ils ont le droit de protester ou de rejeter les résultats, tant qu’ils n’enfreignent pas la loi », a reconnu le Premier ministre, qui n’a évidemment pas intérêt à ternir son image vis à vis de ses alliés. Mais il se sait en position de force, étant un partenaire incontournable des occidentaux dans la Corne de l’Afrique pour contenir la fièvre islamiste.
Les Etats-Unis affichent ainsi un soutien de façade à l’opposition, estimant, par la voix du secrétaire d’Etat adjoint aux affaires africaines, Johnnie Carson, que « les élections ne présentaient pas les normes internationales. » requises.
Le chef de la mission d’observation de l’UE, Thijs Berman, arbore une mine contrite, le 25 mai à Addis Abeba (AFP).
Quant aux observateurs de l’Union européenne (UE), ils ont été plus explicites. « Le processus électoral n’a pas été à la hauteur d’un certain nombre de normes internationales, en particulier en matière de transparence et en raison de l’absence de conditions équitables pour toutes les parties », selon leur rapport intérimaire. Mais la haute représentante de l’UE pour les Affaires étrangères, Catherine Ashton, a exprimé une position officielle beaucoup plus conciliante, en se félicitant mardi du « déroulement pacifique » du scrutin. La France, enfin, a salué mercredi « l’efficacité » de la commission électorale. C’est bien le moins…
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