Umaru Yar’Adua est décédé, laissant un pays divisé

Le président du Nigeria, Umaru Yar’Adua, est décédé le 5 mai à son domicile des suites d’une longue maladie cardiaque. Il doit être inhumé aujourd’hui. C’est Goodluck Jonathan, déjà président par intérim, qui prendra sa succession jusqu’en 2011, alors que le pays est en proie à de vives tensions ethniques et religieuses et que le parti au pouvoir est lui-même victime d’une dangereuse lutte de clans.

Umaru Yar’Adua, le 29 mai 2007 à Abuja. © AFP

Umaru Yar’Adua, le 29 mai 2007 à Abuja. © AFP

ProfilAuteur_PierreFrancoisNaude

Publié le 6 mai 2010 Lecture : 4 minutes.

C’est le quotidien This Day qui a révélé l’information mercredi sur son site internet, avant qu’elle ne soit officiellement confirmée. Le président du Nigeria Umaru Yar’Adua est décédé le 5 mai à 58 ans, des suites de problèmes cardiaques déjà responsables de son retrait de la vie politique depuis plus de six mois mois.

Malade depuis longtemps – il a toujours été de santé fragile -, Umaru Yar’Adua avait été hospitalisé en novembre en Arabie saoudite durant des semaines, avant de revenir le 24 février, incognito, dans son pays. Son état de santé était resté tellement secret que M. Jonathan avait reconnu publiquement n’avoir même pas été autorisé par son épouse, Turai Yar’Adua, à lui rendre visite. Des chefs religieux avaient pu aller le voir cependant début avril, mais n’avaient rien indiqué sur son état de santé.

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Le président du Nigeria s’est éteint dans sa résidence présidentielle. Son enterrement est prévu aujourd’hui – le plus rapidement possible selon la tradition islamique –  dans l’État de Katsina, dans le Nord, d’où il est originaire, a déclaré le porte-parole du président intérimaire, Ima Niboro. Sept jours de deuil national ont été décrétés et le jour de l’enterrement sera ferié.

Le vice-président Goodluck Jonathan, a appris la nouvelle avec « choc et tristesse. La nation est en deuil et je suis sûr que le monde aussi est en deuil avec nous ce soir », a-t-il poursuivi. Lui qui avait déjà été chargé par le parlement d’assumer le pouvoir le 9 février, prêtera serment jeudi pour devenir pleinement président et mener l’actuel mandat présidentiel à son terme en avril 2011.

Dauphin d’Obasanjo

Né le 16 août 1951, Umaru Yar’Adua était issu d’une famille très impliquée dans la vie politique du pays. Son père avait été ministre dans le premier gouvernement formé après l’indépendance, en 1960. Son triomphe à la présidentielle de 2007, où il succédait à Olusegun Obasanjo qui l’avait désigné comme son dauphin au sein du Parti démocratique du Peuple (PDP), avait été entachée par des accusations de bourrage des urnes et d’intimidation des électeurs, dénoncés par les observateurs de l’UE. Mais son arrivée à la présidence marquait un tournant dans une histoire parsemée de coups d’État militaires : pour la première fois, le pouvoir passait d’un président civil à un autre.

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En pleine campagne électorale, cependant, il avait déjà montré des signes de faiblesse. Il avait été exfiltré en catastrophe vers l’Allemagne pour y recevoir des soins et, depuis son élection, il avait effectué au moins quatre séjours de santé à l’étranger. La longue absence et la pénurie d’informations quant à l’état du président depuis février avaient fait place aux spéculations, certains évoquant même un coma ou son décès. Il n’a donné qu’un seul signe de vie depuis son départ, lors d’un entretien à la radio britannique BBC, le 12 janvier. Malade depuis des mois, Umaru Yar’Adua, avait été hospitalisé en novembre en Arabie saoudite durant des semaines avant de revenir au Nigeria, en février. Sa mort intervient alors que des violences inter-communautaires ont fait des centaines de morts depuis le début de l’année dans le centre du pays.

Le président américain Barack Obama a également exprimé sa tristesse. « Nous nous souviendrons avec respect de la profonde intégrité personnelle du président Yar’Adua et de son profond engagement pour le service public, ainsi que de sa croyance passionnée dans l’immense potentiel et le brillant avenir de 150 millions de Nigérians », a notamment affirmé le chef de l’exécutif américain dans un message de condoléances.

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Au sein du PDP, les couteaux sont tirés

Pour éviter que le huitième exportateur de pétrole ne plonge dans le chaos, le parlement avait fini par demander au vice-président d’assurer temporairement la présidence, M. Yar’Adua ne lui ayant pas formellement transmis les pouvoirs exécutifs avant de partir.

Depuis, malgré les efforts de M. Jonathan, les membres du PDP sont à couteaux tirés en prévision des élections générales de l’an prochain où chacun essaie de se placer. Les tensions sont telles que le président par intérim a dû, fin avril, sommer ses pairs du PDP de « serrer les rangs » plutôt que d’étaler leurs dissensions.

M. Jonathan, un ancien gouverneur issu du Sud pétrolier – une première au Nigeria – ne devrait pas être le prochain candidat, selon un règlement interne au parti. Chaque candidat investi et élu effectue deux mandats, soit huit ans, mais il doit être, en alternance, originaire du nord ou du sud de la fédération. M. Yar’Adua étant du Nord, un candidat de cette région devrait être choisi pour lui succéder.

Mais au sein du parti, nombre de « réformateurs » n’ont pas dit leur dernier mot. Une campagne d’affichages à l’effigie de Goodluck Jonathan a déjà envahi Abuja. La mort de Yar’Adua survient à un moment difficile pour le Nigeria, le pays le plus peuplé d’Afrique avec 150 millions d’habitants.

Des violences intercommunautaires ont fait des centaines de morts depuis le début de l’année dans le centre du pays, tandis que l’amnistie promise par le président défunt aux rebelles du Sud pétrolier, le Delta du Niger, tarde à donner ses effets. Le Mend, notamment, commence à relancer ses attaques contre la principale source de devises du pays.

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