Un journaliste s’invite au Palais présidentiel

Alors que le chef de l’État tunisien s’apprêtait à prononcer un discours allant dans le sens de la modernisation des médias pour la journée mondiale de la liberté de la presse, lundi 3 mai, un journaliste et blogueur a fait irruption au Palais présidentiel pour témoigner des conditions dans lesquelles il exerce sa profession. Le président Zine el-Abidine Ben Ali a, quant à lui, réaffirmé son engagement pour le pluralisme et la liberté d’expression.

Le président Zine el-Abidine Ben Ali veut « consolider le pluralisme » médiatique de la Tunisie. © Reuters

Le président Zine el-Abidine Ben Ali veut « consolider le pluralisme » médiatique de la Tunisie. © Reuters

ProfilAuteur_PierreFrancoisNaude

Publié le 4 mai 2010 Lecture : 2 minutes.

Le chef de l’État tunisien, Zine el-Abidine Ben Ali, était en train de s’engager à reformer la loi sur les médias électroniques. Cela n’a pas empêché Zied el-Heni, 46 ans, rédacteur du quotidien arabophone progouvernemental Essahafa et blogueur très critique vis-à-vis du pouvoir, de faire irruption au Palais présidentiel de Carthage, bravant l’interdiction de manifester publiquement pour la liberté de la presse.

« J’ai forcé la grille au volant de ma voiture et on m’a reçu. J’ai consigné par écrit tout ce que j’ai enduré depuis le jour où j’ai demandé à manifester en cette journée mondiale de la liberté de la presse », a raconté le journaliste à l’AFP.

la suite après cette publicité

« C’est un acte improvisé que j’ai eu ce matin lorsque, accompagnant mes trois filles à l’école, j’ai été pris en chasse par la police, très présente depuis la veille dans mon quartier et autour de mon domicile », a précisé El-Heni.

Inquiétude des journalistes

En avril, avec un autre cyberjournaliste, il avait écrit au ministère de l’Intérieur pour demander une autorisation de manifester publiquement durant une heure, le 3 mai, « en faveur de la liberté d’information et de presse et pour l’égalité devant la loi » en Tunisie. « Depuis ce jour, la police ne m’a plus lâché », a déclaré le journaliste, affirmant avoir été l’objet d’injures et de menaces anonymes par téléphone.

Dirigeant d’un syndicat des radios libres (non reconnu) et de l’ancienne direction du Syndicat national des journalistes (SNJ), Zied el-Heni se plaint de la censure de son blog, du piratage de son courrier électronique et réclame la légalisation de sa radio. Et il n’est pas le seul.

la suite après cette publicité

La censure sur internet était par ailleurs l’objet d’une table ronde organisée par l’hebdomadaire d’opposition Al-Mawkif. « Internet est devenu un refuge pour les Tunisiens confrontés au verrouillage », a indiqué son rédacteur en chef, Rachid Khechana. « Or, la censure sur internet a dépassé toutes les bornes dans notre pays », a-t-il affirmé.

Le président destitué du SNJ Neji Bghouri dénonçait, quant à lui, dans un rapport transmis à l’AFP, « un climat asphyxiant du fait de la politique de verrouillage, de confiscation des libertés et de violation des droits de journalistes ».

la suite après cette publicité

Pour la promotion de l’information électronique

De son côté, le gouvernement tunisien se défend toujours de pratiquer la censure et affirme interdire seulement les sites pornographiques et terroristes. Dans son message de vœux à la presse, le président Ben Ali a promis, lundi, de « consolider le pluralisme dans le paysage médiatique » et de « promouvoir le dispositif législatif régissant l’information électronique ».

Il a, dans le même temps, assuré qu’il n’y avait en Tunisie « aucun tabou ni interdit » et affirmé que les médias pouvaient « traiter tous les dossiers et toutes les questions, sans aucune forme de censure autre que celle que leur impose leur conscience dans le cadre du respect de la loi et de l’éthique professionnelle ».

Un discours bien perçu par le Syndicat national des journalistes, qui s’est félicité de l’engagement du chef de l’État de promouvoir l’information électronique. Il a cependant relevé qu’un « vide juridique prive les cyberjournalistes du moindre droit ». Dans son rapport annuel, ce syndicat appelle à la suppression des « aspects repressifs » du code de la presse, notamment la privation de liberté pour délits de presse. (avec AFP)

La Matinale.

Chaque matin, recevez les 10 informations clés de l’actualité africaine.

Image

Contenus partenaires