Le dernier film de Bouchareb jugé « négationniste » par un député français

Le député français UMP des Alpes-Maritimes, Lionel Luca, fustige le caractère « négatif et négationniste » du dernier film du Franco-algérien Rachid Bouchareb, « Hors-la-loi », qui relate notamment le massacre de Sétif, en 1945. Un film que l’élu n’a pas encore vu, et qui sera présenté au prochain Festival de Cannes.

Le réalisateur franco-algérien Rachid Bouchareb, en février 2009 au Festival du film de Berlin. © AFP

Le réalisateur franco-algérien Rachid Bouchareb, en février 2009 au Festival du film de Berlin. © AFP

Publié le 23 avril 2010 Lecture : 3 minutes.

Pas encore projeté mais déjà contesté. Hors-la-loi, le dernier film de Rachid Bouchareb et qui sera en compétition pour la Palme d’or à Cannes, est déjà attaqué sur ses fondements historiques. La fronde vient du député UMP Lionel Luca qui – avant-même d’avoir vu le film – dénonce une « falsification » de l’histoire, en référence au passage évoquant le massacre de Sétif, en Algérie, en mai 1945.

« Bouchareb est un partisan (…), un irresponsable qui met le feu aux poudres de manière insupportable », s’est emporté le député des Alpes-Maritimes devant l’AFP. « Autant Indigènes (le précédent film de M. Bouchareb, NDLR) était dans un esprit positif de réhabilitation, autant celui-ci est dans un esprit négatif et négationniste. Ca ne va pas se passer comme ça », a-t-il menacé.

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Hors-la-loi, produit avec des fonds algériens, français et belges, retrace le parcours de trois frères qui, après avoir survécu aux massacres de Sétif, partent en France et s’engagent pour l’indépendance de l’Algérie. Le 8 mai 1945, entre plusieurs milliers et plusieurs dizaines de milliers d’Algériens sont tués. Cette répression faisait suite à des manifestations pro-indépendantistes d’Algériens qui avaient dégénéré, et fait plus de cent morts parmi les Européens.

Le service historique de la Défense au rapport

Pour Rachid Bouchareb, il s’agit de « faire la lumière sur ce pan de l’histoire commune aux deux pays » et de « rétablir une vérité historique confinée dans les coffres », a-t-il confié au journal algérien El Watan. Le réalisateur avait déjà concouru à Cannes en 2006, pour Indigènes. Un film qui raconte la vie de quatre jeunes Algériens appelés au front pour libérer la France de l’Allemagne nazie pendant la Seconde Guerre mondiale. Les acteurs du film avaient alors remporté un prix d’interprétation collectif.

Mais cette fois-ci, l’œuvre ne fait pas consensus. Ce sont des interviews du réalisateur et la crainte que Hors-la-loi ne soit sélectionné sous les couleurs françaises à Cannes (le film sera finalement en compétition sous pavillon algérien) qui ont poussé le député Lionel Luca à saisir, courant 2009, le secrétaire d’État à la Défense et aux Anciens combattants, Hubert Falco. Ce dernier avait alors demandé au service historique du ministère de la Défense (SHD) d’émettre un « avis historique » sur le projet de Rachid Bouchareb.

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Après un examen attentif du scénario, le général de division Gilles Robert, chef du service historique de la Défense, a rendu son rapport en septembre. Il y relève des « erreurs et anachronismes (…) si nombreux et si grossiers qu’ils peuvent être relevés par tout historien ». Il indique ainsi que « le réalisateur veut faire croire au spectateur que le 8 mai 1945 à Sétif, des musulmans ont été massacrés aveuglément par des Européens. Or, ce jour-là, c’est le contraire qui s’est produit. (…) Cette version des faits est admise par tous les historiens. (…) c’est en réaction au massacre d’Européens du 8, que les Européens ont agi contre des musulmans ».

Bouchareb ferait des porteurs de valises des « héros »

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Le député des Alpes-Maritimes s’appuie sur ce rapport et parle de « falsification » de l’histoire par le réalisateur. « Mon intention n’est pas de contester que les Français aient commis un acte condamnable. Mais la veille, ils avaient été tirés comme des lapins ! » a précisé Lionel Luca. Il accuse également Rachid Bouchareb de faire des « porteurs de valise » des « héros ». Pour lui, ces sympathisants du FLN chargé du transport de fonds et de documents confidentiels à l’intérieur de la métropole sont des « traîtres ». Ambiance… (avec AFP)

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